Just strangers passing by the street

Louise De La Rose

Il la regarde. Elle est de l'autre côté de la rue, assise à une table de café, seule. Son chocolat liégeois fume encore devant elle. Elle sourit, savourant d'avance la crème chantilly dans sa bouche et le chocolat chaud coulant dans sa gorge.

Il se souvient. Il se souvient de cette fois où il l'avait emmené dans le meilleur café de la ville pour boire un chocolat. Ils avaient ri aux éclats, et c'était là qu'ils s'étaient rendus compte l'un et l'autre que quelque chose les attendait.

Désormais elle n'est plus en face de lui, à le dévorer du regard avec ce si beau sourire. Elle est seule, et lui aussi.

Elle lui parait si loin, tout en étant si proche. 

Elle ne sait pas qu'il est là, elle ne l'a pas vu, trop occupée à regarder le ciel en buvant dans sa tasse. Il se rappelle qu'elle adore regarder le ciel.

Il sourit en repensant à sa bouche. A ce si joli rire. Avant, elle riait tout le temps lorsqu'ils étaient ensemble. Il avait beau dire les pires bêtises, elle riait aux éclats, et jamais ne se moquait de lui.

Il était lui même, et elle était elle même.

Puis il a fait un choix. Qu'il a regretté longtemps. Le choix d'abandonner, de plier devant les difficultés. Elle n'a pas voulu se battre contre lui, elle n'en avait pas la force. Elle a eu le cœur brisé. Et elle lui a manqué chaque jour. Il a essayé de l'oublier avec une autre, mais ce n'était pas elle. 

Elle n'a eu personne, elle est restée seule. Il en était heureux, même si il savait qu'elle était malheureuse, savoir qu'elle lui appartenait lui faisait du bien. 


Il la regarde, se dit qu'elle est sienne et le restera, puisqu'entre eux ce sera toujours pareil. 

Puis un homme vient s'asseoir en face d'elle. Elle sourit encore plus, l'homme se penche et l'embrasse et elle rit.

Ce rire qu'il croyait sien.

Elle regarde l'homme comme elle le regardait, avec des yeux pleins d'amour et d'admiration. L'homme la fait rire, et commande un café.


Il a mal. Elle n'est plus sienne. Il paye l'addition et repart, le cœur lourd et douloureux. 

Il redevient un simple passant dans la rue.


Elle le regarde partir. Elle est heureuse. Pourtant elle sait que l'homme en face d'elle, celui qui boit du café, ne sera jamais celui avec qui elle buvait du chocolat.

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