La Borne : Résumé, notes du metteur en scène et de l'auteur
Gilbert Libé
RÉSUMÉ
Pas de logement, pas de travail ! Pas de travail, pas de logement !
Face à ce constat, la « Grande Cause Nationale » du Ministère des Exclus a décidé d’édifier, un peu partout dans la ville, des « Bornes de Survie » réservées aux sans abris et aux exclus.
Elles ont pour fonction principale de fournir une adresse de domicile fixe aux laissés pour compte de la société afin qu’ils décrochent un emploi et réciproquement qu’ils obtiennent ainsi un domicile grâce à leurs revenus. Pouvant enfin justifier d’une adresse, ils seront mieux armés pour s’intégrer à nouveau dans le système…
Quatre exclus de longue date : Dédé, concepteur de la borne, au chômage longue durée ; Josette, quadragénaire joviale, ancienne « Dame Pipi », purgeant une peine de travail d’intérêt général suite à un redressement fiscal, en charge de l’entretien de la borne ; Jacquot, ancien cadre RH recyclé en contrôleur, fonctionnaire du ministère ; et enfin Josiane, petite amie de Dédé, ancienne maîtresse du ministre corrompu… virevoltent autour de l’engin en rêvant à des jours meilleurs.
Cette kyrielle de personnages, hauts en couleur, va défiler dans cette structure dédiée aux SDF et exclus de tous poils. Le bon sens et la générosité de ces personnages gravitant autour de ce domicile de substitution va nous faire découvrir un monde parallèle des exclus aux antipodes des clichés et larmoiements reçus…
Au terme de leurs pérégrinations, leur rêve deviendra réalité. Ils retrouveront leur dignité, se libéreront de leur nouvelle prison en faisant un « bras d’honneur » à cette société aseptisée.
NOTES DU METTEUR EN SCÈNE
Ma rencontre avec Gilbert Libé, l’auteur de la pièce fût surprenante.
Tout comme «La Borne» le texte qu’il m’a envoyé deux jours à peine après que je l’ai rencontré ! J’ai lu la pièce et immédiatement j’ai ressentie l’envie très claire de la monter. Pour la première fois mon deuxième moi - qui généralement s’efface pour laisser la place au premier - me disait clairement, «vas y, tu dois le faire» !
Pleine de poésie, avec quatre personnages de chair. Puis, un personnage, le cinquième, moderne, multi-fonction, qui se module, véritable mystère qui anime les quatre autres : «La Borne», qui va réagir, dominer, trôner au milieu du décor et faire s’interroger sur le monde dans lequel sont projetés nos quatre protagonistes, obligés de survivre aux tâches pénibles et impitoyables auxquelles ils sont soumis.
Deux femmes et deux hommes qui auraient pu être n’importe qui mais dotés d’une grâce particulière et de réflexes de survie. Une histoire simple, actuelle hélas, mais qui transporte, qui jamais ne place le spectateur dans le malaise du monde d’aujourd’hui mais plutôt dans une sorte de voyage auquel il s’adonne avec plaisir, au cours duquel il va prendre conscience....Une véritable découverte...!
La pièce a une trame de tragi-comédie, on rit, on se questionne, on se prend aussi à rêver pour ces quatre personnages. Vont ils trouver un « monde meilleur» ? Pour que toute cette histoire se termine bien... Mais finira-t-elle bien ?
J’ai réuni et choisit trois camarades de plateau, surprenants et dont j’aime le travail et la personnalité !
Le reste de l’équipe est issu de la même veine. S’entourer de courage, de force et de poésie, tel est mon objectif…
Sophie Gourdin
(Ancienne élève du Conservatoire National Supérieur d'Art Dramatique de Paris)
NOTES DE L’AUTEUR
La devise de la République française repose sur les trois mots magiques gravés aux frontons de nos monuments publics : Liberté, Égalité, Fraternité…
La déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 définit ainsi la Liberté : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » ; Elle déclare que Égalité signifie que «Tous les hommes sont égaux par nature et devant la loi » ; Et enfin Fraternité est ainsi définie, dans la Déclaration des droits et devoirs du citoyen : « Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qu'on vous fît ; faites constamment aux autres le bien que vous voudriez en recevoir ».
Dans une société individualiste qui rejette cinq millions d’individus, la devise est mise à mal avec les principes mêmes de la République !
Il est inconcevable qu’au 21ème siècle des gens soient rejettes ainsi d’une société dite civilisée et basée sur ces principes. Autant la liberté et l'égalité peuvent être perçues comme des droits, autant la fraternité est une obligation de chacun vis-à-vis d'autrui.
On ne peut pas vivre à notre époque « formidable » sans être interpellé dans la vie courante, par la misère qui vous saute aux yeux à chaque coin de rue, sur les quais de métro, aux portes des magasins ou à chaque feu rouge.
Il faut faire quelque chose ! Il faut réagir, il faut donner aux grandes quêtes nationales, il faut acheter « Faim de siècle, Macadam, le Lampadaire, le Réverbère… » Il faut s’engager dans les mouvements associatifs, les Restos du Cœur, le Secours Populaire, l’Armée du Salut, le DAL, Emmaüs, le Secours Catholique, l’Entraide Protestante, le Fond Social Juif Unifié, le Croissant Rouge, l’ATD Quart Monde, les Petits Frères des Pauvres et j’en passe…
Bien entendu, IL FAUT, et beaucoup de gens sont touchés, et FONT.
Une pièce qui tente de faire rire le public avec la misère du monde s’engage dans une voie périlleuse, pour ne pas dire dangereuse !
Ma contribution, à moi, raconteur d’histoire, est de faire un spectacle où l’on parlera de « ça » autrement que par les voies traditionnelles, cérémonieuses, racoleuses ou culpabilisantes. J’ai pris le parti de faire rire et d’amuser en écrivant une comédie de mœurs mettant en scène le « Syndrome De la France ».
« Liberté, Egalité… Précarité n’est pas un pamphlet, ni une leçon de morale ou même un message politique. C’est simplement un constat, un cri du cœur. Un regard sur la société où l’on vit et qui nous jette à la figure ses dérives, ses bassesses et son impuissance à permettre à tous d’accéder à des conditions de vie décentes.
Ce vaudeville moderne doit pétiller comme un cocktail comique concocté à partir d’ingrédients faits de situations loufoques et de personnages communs englués dans leurs tristes conditions. Quand on peut y ajouter un zeste de fête, une pointe de poésie et une pincée d’optimisme, on peut penser que l’humour et la dérision permet d’aborder des sujets aussi grave que celui-là.
Gilbert LIBE