La chambre de Jeanne
Joelle Eymery
Ta chambre est une pure merveille,
Emplie d'objets anciens venus des colonies,
J'y ai rêvé souvent, cherchant le sommeil,
Sur des airs d'Afrique, d'Amérique et d'Asie.
J'étais à l'abri sous la moustiquaire,
Dans ces pays lointains aux mille histoires,
Les yeux fermés, je traversais les mers,
Sous des soleils que nul autre ne pouvait voir.
La fièvre me rongeait, sous tous ces paysages,
Une fièvre brûlante que tes chants apaisaient ;
Lorsque tu partis, laissant pour tout héritage
Les empreintes coloniales de ton odorant passé.
Lorsqu'un matin, à l'heure où la cigale chante,
Je m'étirais, lascive, sur tes coussins de soie,
Je vis du papier pendu sous la soupente,
Qui éveilla ma curiosité et mes sens, ma foi !
Je me levai, bénissant encor ce décor,
Et vis des étiquettes marquées : "IKEA"
Tout le reste a fondu en un éclair d'or,
Coloniale tu étais ... sans bouger de chez toi ...
(Joëlle Eymery - 2014)