La Faute à la vie - Chapitre Vingt-Quatre
Julie Vautier
J'ai rencontré ta mère, Cassie. Je crois que j'aurais préféré éviter cette rencontre. Elle me hait. Elle me hait tellement. J'ai lu toute la haine du monde dans son regard. Même Poutine se serait chié dessus en croisant ce regard. Je ne suis pas Poutine. Je te laisse imaginer mon état. Elle me criait dessus. Elle me traitait de tous les noms. J'ai eu droit à tout. Salopard. Raclure. Enfoiré. Drogué. Junkie.
Je peux que la comprendre. Elle aurait pu m'insulter plus. Je méritais tous ces noms. Je lui ai volé sa fille. Sa fille. La prunelle de ses yeux. Je t'ai volée à elle. Elle m'en veut. Elle me hait. Je la comprends. Je me hais aussi. Il y a des jours où je me hais moins. C'est pas souvent. Mais ça arrive. Et puis, il y a les jours où je regrette le fait d'être né.
La vie aurait été tellement plus simple si j'avais pas été là. Si j'avais pas croisé ton chemin. Tu serais en vie à l'heure qu'il est. T'aurais jamais dû venir me voir. Venir me parler. C'était une mauvaise idée. Tu le savais. C'est pour ça que t'es venue. Braver les interdits. C'était trop tentant. Alors, t'es venue. Mais t'aurais jamais dû. Moi, j'aurais jamais dû te répondre.
T'es devenue importante pour moi trop vite. Je l'avais pas prévu. Je voulais juste m'amuser un peu et te renvoyer chez toi. Ça s'est pas passé comme prévu. Je suis tombé amoureux. C'est con à dire. Mais c'est la vérité. Je t'ai aimée plus vite que tu m'as aimé. Je l'avais pas prévu comme ça. Mais c'est arrivé.
Ta mère, elle a raison quand elle dit que j'aurais dû crever à ta place. Pete, il veut pas l'entendre ça. Il m'a pardonné. Cool. Fêtons son pardon tous en chœur. Moi, je me suis pas pardonné. Je me pardonnerai jamais. Je peux pas. C'est comme ça. Je suis content que Pete m'ait pardonné. Non, vraiment. Il y a au moins une personne sur Terre qui m'apprécie. Mais c'est bien le seul.
J'ai fait trop de dégâts. Faut que j'arrête d'empoisonner vos vies. Faut que j'arrête de vous faire du mal à tous. Faut que je disparaisse. Que je vous laisse tranquille. Ta mère, elle a raison de me haïr. Pete, je sais pas pourquoi il m'aime bien. Alors que je lui fais du mal. Je lui rappelle tous les jours que tu es morte à cause de moi. Tous les jours, il le lit sur ma tronche. « Assassin de Cassie. » Voilà ce qu'il lit sur ma tronche. J'aurais préféré qu'il y lise « Géo Trouvetou. »
Géo Trouvetou, au moins, il a pas tué sa copine.