La France du milieu du 17e siècle

Dominique Capo

Thèse personnelle en doctorat d'Histoire, pages 8 à 10 :

La parfaite entente entre les couronnes de Paris et de Londres qui régnait jusque là, finit malgré tout par s'étioler en 1627 : la politique expansionniste de Richelieu, le nouveau premier ministre de Louis XIII, finit de semer la discorde entre les deux pays. Dès lors, à partir de Mai, le duc de Buckingham s'emploie à préparer depuis Portsmouth une expédition navale contre la France. Cette flotte lève l'ancre le 30 Juin ; et porte environ 10 000 hommes sur plus de 80 vaisseaux. Le duc en prend aussitôt le commandement, accompagné par Soubise. Le 10 Juillet, il entre dans la rade de La Rochelle. Mais, contre tout attente, l'adhésion des rochelais à cette révolte ouverte contre l'autorité royale ne va pas de soi. La fidélité des Protestants à la dynastie n'est pas un vain mot lorsque Buckingham et Soubise se présentent aux portes de la cité : les échevins rochelais leur en refusent l'entrée.

Malheureusement, la duchesse douairière de Rohan, présente en ville à ce moment là, attire à sa suite le petit peuple du port. En dépit des magistrats, elle fait ouvrir les portes à son fils. Et une semaine plus tard, les Anglais débarquent sur l'île de Ré ; tandis que de son coté, le maréchal de Toisas, avec ses 3000 hommes, s'enferme dans la citadelle de Saint Martin.

Une fois de plus, Louis XIII doit donc reprendre la route de l'Ouest à la tète de ses régiments. Richelieu l'accompagnant, ils arrivent ensemble devant La Rochelle le 12 Octobre. Mais cela fait un mois que les lignes de siège sont déjà posées. Le 8 Novembre, la flotte Anglaise hisse les voiles. Et en partant, Buckingham promet aux rochelais l'envoi de prochains secours.

Malgré tout, l'avenir demeure incertain : En Languedoc, Rohan lance toutes ses forces dans la guerre, entraînant l'une après l'autre les petites cités huguenotes. Il met en campagne une troupe très mobile de 5000 homes environ. Condé et Montmorency ne parviennent d'ailleurs pas à la contenir. En Mai 1628, un assaut des royaux est victorieusement repoussé par les rochelais, qui attendent toujours les renforts anglais promis. Or, la famine et les épidémies déciment les assiégés à partir du mois de Juin. Avant que leurs espoirs ne soient balayés par l'échec de Lindsey. De fait, Rohan, toujours maître du haut Languedoc, est désormais assiégé dans les Cévennes, et se retrouve incapable de leur envoyé du secours. Le 28 Octobre, des députés sortent de la ville pour offrir la capitulation sans conditions. Dès le lendemain, les portes sont ouvertes aux royaux. Et c'est d'abord un corps de gardes en bon ordre, puis des convois de ravitaillement, qui viennent soulager la misère des assiégés.

En Languedoc cependant, Rohan demeure invaincu. Ce n'est qu'après les succès rapides des armées royales dans les Alpes que Louis XIII et Richelieu s'attachent à la réduction de ce dernier refuge Huguenot. La ville fortifiée de Privas, puissamment assiégée, est prise le 26 Mai. Cette petite cité à majorité Protestante, forte de près de 3000 habitants, a toujours travaillé le drap et le cuir. Elle est vidée de ses habitants, qui sont massacrés ou chassés. Et le site ne retrouvera une vie citadine que dans les années 1640. Mais la terrible nouvelle du saccage de Privas décide les autres places languedociennes à capituler. Et le duc de Rohan lui-même, fait soumission, s'exilant ensuite avec ses partisans à Venise.


Dès lors, dans les années qui suivent, les combats entre Catholiques est Protestants ne sont plus que sporadiques. Malgré tout, les révoltes populaires couvent encore sous le feu. Croquants et Nus Pieds prennent régulièrement les armes contre le pouvoir royal, et surtout contre Richelieu, devenu avec le temps bouc émissaire de tous les maux des miséreux. Car ces mécontentements sont plus ou moins entretenus par une noblesse humiliée par ses échecs passés. Et cette dernière est désormais encore plus étroitement surveillée par le pouvoir, puisqu'elle présente un péril toujours redoutable.

Des princes mécontents ont en effet le prestige social nécessaire pour cristalliser les oppositions, rallier une province comme le Languedoc, voire, le pays tout entier. On retrouve d'ailleurs ces idées dans le « Manifeste pour la Justice des Princes de la Paix », publié en 1641, lors de l'ultime grande conspiration princière du règne de Louis XIII.

En fait, tout débute quelques années plus tôt, lorsque Louis II de Bourbon, comte de Soissons et prince de sang – issu de la souche des Bourbons-Condé – s'illustre en reprenant Corbie en Novembre 1636. Comme tant d'autres à cette époque, il s'indigne bientôt de l'influence écrasante de Richelieu dans le royaume. Il s'associe de près ou de loin à de nombreux conciliabules. La plupart de ces derniers, d'ailleurs, sont associés au duc de Rohan, de retour en France depuis 1634.

Craignant pour sa sécurité, le duc de Soissons cherche dès lors asile dans la petite cité souveraine de Sedan, puisqu'elle appartient au duc de Bouillon. Car, depuis des années, Sedan est devenue le refuge des mécontents. Et ceux-ci y sont soutenus par le duc de Lorraine, dont la province a été envahie par les forces françaises en 1632. Il faut en effet souligner qu'à cette date, le duc de Lorraine ne voulait pas se soumettre à l'autorité royale, bien que son territoire soit entré dans la mouvance française à la suite de son mariage avec une fille de France. Le duc de Lorraine n'a jamais accepté cet état de fait, et soutien depuis tous ceux qui se rebellent contre Louis XIII et Richelieu.

Grace à son aide, au début de1641, le duc de Soissons parvient donc à lever une petite armée de quelques milliers d'hommes. Pour bien montrer qu'il n'en veut qu'au ministre détesté, lors de son entrée en France, il demande à ses soldats de porter l'écharpe blanche du service du roi. Aussitôt, le maréchal de Chatillon est chargé par le souverain, avec 10 000 hommes, d'arrêter l'armée rebelle dès sa sortie de la trouée de Sedan. La rencontre a lieu le 9 Juillet 1641, près d'une forêt de la Meuse appelée « la Marfée ». Chatillon y est défait, et l'armée victorieuse du comte de Soissons est sur le point de s'avancer en Champagne, lorsque son chef meurt soudainement dans les derniers instants du combat. Ce décès, opportun pour Richelieu, contribue d'ailleurs à la dispersion de l'armée sedanaise.


A suivre...

Signaler ce texte