LA GRANDE BIBLIOTHÈQUE (suite)
damerouge04
ÉPISODE UN : Lundi 9 juillet 2012. Sur la banquette arrière de la voiture, assise dans son rehausseur, la petite fille aux jolies boucles rousses qui jouait sans grande conviction avec sa poupée de chiffon, soupira : « Maman, quand est-ce qu’on arrive ? — Nous arriverons chez Tata Irène dans l’après-midi, à l’heure du goûter ma chérie, répondit la maman. — A midi on s’arrêtera quand même pour manger ? lança Jérémie. — Oh ben j’espère bien que Papa et Maman ont prévu de satisfaire les estomacs qui crient famine ! renchérit le grand-père d’un air complice. — Ne vous inquiétez pas, rassura le papa. J’ai prévu que nous fassions une halte déjeuner dans un relai routier qui doit se trouver sur notre chemin. Alors voyons voir, dès que nous quitterons l’autoroute A7 à la hauteur de Valence, nous devrons bifurquer sur la nouvelle autoroute en direction du Puy en Velay, et le resto devrait se trouver à une petite centaine de kilomètres. Euh, ce sera… l’A666. — Une autoroute 666 ? s’écria le grand père — alors que Jérémie et sa petite sœur Virginie applaudirent la décision de leur papa — comme le nombre de la Bête… l’Apocalypse selon St Jean… ! T’es tombé sur la tête ou quoi mon petit ? — Ah Ambroise ça suffit hein ! ordonna le papa à son beau-père. Avec tout le respect que je vous dois vous commencez à me chauffer les oreilles avec vos histoires plus farfelues les unes que les autres, vos croyances et superstitions en tous genres ! Depuis le temps que vous fustigez la plupart de mes gestes et de mes dires, vous pourriez reconnaître quand même qu’aucune malédiction ou catastrophe surnaturelle ne nous est jamais tombée dessus enfin ! ». Le papa se retenait de hausser la voix par convenance et puis pensa qu’une fois de plus il était ridicule rentrer dans le jeu d’Ambroise. « Certes, capitula le grand-père non sans mal ». Et pour couper court à la conversation quelque peu houleuse entre son mari et son père, Élise, la maman, réfléchit à haute voix : « Encore une autoroute à la sortie de Valence ? ». Elle se saisit de la carte routière qui se trouvait dans la boîte à gants, l’examina soigneusement mais ne reconnut pas l’itinéraire dont parlait son mari. Confortée dans son idée, elle poursuivit : « Ah ça m’étonnait aussi qu’une autoroute traverse désormais les monts d’Auvergne. Irène me l’aurait précisé, tu dois te tromper David. Et pourquoi ne pas tout simplement nous en tenir au trajet qu’elle nous a très exactement retranscrit dans son dernier mail ? — Je ne me trompe pas du tout, répondit son mari. Mais c’est sûrement très récent je te l’accorde. En tous les cas c’est l’itinéraire indiqué par le GPS en première intention. Cependant, j’avoue que je n’ai pas plus regardé la carte, que lu le mail d’Irène. Grâce à ce bijou d’électronique, ajouta t-il en exhibant fièrement l’objet, incontournable de nos jours, je ne me pose plus de question lorsque je dois préparer un déplacement. Je rentre l’adresse de destination et hop ! Je n’ai plus qu’à suivre les instructions ! — Oui, bof, encore une autoroute… c’est un peu monotone, observa Élise. — mais non, les paysages sont malgré tout différents et puis de toute façon, une autoroute sera toujours plus directe et de ce fait plus rapide que des routes départementales à travers des montagnes ! Ce qui est non négligeable lorsque l’on voyage avec des enfants, conclut-il une fois pour toute, ayant décidé de conserver l’itinéraire de son GPS. — Raisonnement irréfutable ! argua Jérémie qui se plaisait à jouer l’intellectuel de la famille. — Même si celle-ci nous conduit en enfer ? riposta Ambroise mi-colère mi-sourire. — Papi tu me raconteras l’histoire du 666 ? chuchota Jérémie à l’oreille de son grand-père. » C'était une magnifique journée de juillet, la famille Berger au grand complet avait quitté sa Camargue si chaude et si sèche, pour rejoindre les monts verts et frais de l’Auvergne. Il y avait David, le père âgé de 39 ans architecte, et Élise, la mère de 35 ans, illustratrice d’ouvrages pour enfants. Ils voyageaient avec leur petite fille de 5 ans qui se prénommait Virginie et leur fils Jérémie qui aurait 13 ans dans quelques jours. Était aussi du voyage Ambroise, le grand père maternel. Veuf depuis plus de 8 ans ce papi excentrique, affable, et gourmand, était venu vivre dans le grand mas familial entre Arles et Salin de Giraud. Pendant que les parents travaillaient, Ambroise faisait office de nounou pour les enfants. Le seul souci avec cette nounou nouvelle version c’était son côté exagérément mystique. Né sous les bombardements pendant la seconde guerre mondiale, il criait toujours à qui voulait l’entendre qu’il était la réincarnation d’un célèbre soldat et il adorait entre autre raconter d’étranges histoires aux enfants, notamment sur l’existence de plusieurs mondes parallèles. Si cette mère de famille avait proposé d’emmener sa tribu au vert pendant ces quelques semaines chez Irène, c’était qu’en plus d’être une amie très chère elle était aussi son éditrice. Pendant que toutes deux décideraient des dernières modifications à apporter au sixième tome de leurs célèbres « chats fantômes », mari, père et enfants pourraient profiter de la magnifique propriété d’Irène qui se situait en Haute Loire, dans le Massif Central. « Des forêts, des rivières, des montagnes, un patrimoine volcanique, et même des prés avec des vaches de toutes les couleurs », avait annoncé Irène. Tout le monde était ravi des vacances qui s’annonçaient et tout particulièrement Ambroise. Il était tout excité car de nombreuses légendes planaient autour des volcans et il avait bien l’intention de ne pas rater ainsi l’occasion de parfaire l’éducation mystique de ses petits-enfants. Bien qu’Élise émit un doute par rapport à cet itinéraire plus que surprenant, elle trouvait cet autoroute bien agréable, étonnamment peu fréquentée par ailleurs pour une journée de juillet, mais en même temps c’était lundi. Elle profitait du calme et ferma les yeux jusqu’à ce qu’ils arrivent enfin au restaurant. Elle avait la faculté de s’endormir avec une étonnante rapidité, était capable de rêver dans la foulée et bien sûr se souvenait pratiquement à tous les coups de ses rêves. Certains de ses amis d’ailleurs l’enviaient. Ambroise, son père lui avait toujours soutenu qu’en fait de rêves, Élise basculait tout simplement dans un monde parallèle, et que c’était pour cela qu’elle se souvenait toujours de tout. De plus elle retrouvait très souvent dans ses rêves l’univers des contes qu’elle représentait dans ses livres, ainsi que les nombreux personnages qui y figuraient. D’aucuns diraient qu’il serait normal de retrouver dans ses rêves la matière qui occupe la plupart de nos journées de travail, mais pour d’autres… « Nous sommes arrivés ! s’écria Jérémie, alors que David stoppait le monospace rouge carmin métallisé devant la pompe à essence. — Minute les enfants, personne ne descend. Je fais le plein et ensuite j’irai garer la voiture sur le parking du restaurant. Là seulement vous aurez le droit de descendre ». Et voyant son beau-père qui était en train d’ôter sa ceinture de sécurité, David reprit : — Et c’est valable aussi pour vous Beau-Papa ! C’est quand même un monde ça. Comment voulez vous que les enfants suivent les instructions si vous-même, ne donnez pas l’exemple ? — Désolé David mais je crois qu’il va falloir faire une exception. J’ai un besoin très pressant. De plus, je veux bien faire comme si de rien n’était , faire l’impasse sur le fait que nous circulons sur une voie dénommée Autoroute 666 mais vous ne m’empêcherez pas d’aller inspecter les lieux. Et ne vous déplaise mon cher beau-fils, je me rendrai au restoroute à pied. Ne m’attendez pas. » Sur ce, le grand-père sortit de la voiture et l’air renfrogné se rendit aux toilettes de la station service. « Je suis désolée mon chéri, tu sais bien comme Papa peut être superstitieux parfois, expliqua Élise à son mari. — Superstitieux et borné surtout. Et de fait, ridicule et limite perturbant pour les enfants ». David avait accepté qu’Ambroise vienne définitivement vivre chez eux en Camargue à la suite du décès de son épouse huit ans auparavant, car Élise très proche de ses parents, avait bien évidemment assez mal vécu de perdre sa mère trop tôt. De plus, les enfants adoraient leur grand-père. Et si Virginie, la benjamine de la famille, âgée de cinq ans aujourd’hui n’était pas encore née à l’époque, les Berger avaient, déjà bien, deux enfants : Jérémie, et Juliette qui était l’aînée. Alors que cela faisait tout juste trois ans que le grand-père vivait avec ses enfants, et qu’Élise allait mettre au monde Virginie, Juliette disparut tragiquement d’une leucémie. Elle était alors âgée de dix ans mais s’était bien battue contre sa maladie, convaincue qu’elle arriverait alors à vivre un jour toutes les aventures auxquelles elle avait rêvées, durant ses nombreux mois d’hospitalisation. Contrairement à Virginie, ravissante petite fille, timide aux longs cheveux ondulés tout roux comme son père, Juliette était une jolie brunette qui affichait un solide caractère et qui déjà à son âge, était encore plus déterminée que son grand-père. Elle avait hérité de sa mère ses cheveux presque noirs dont les boucles flottaient sur les épaules, et de son père ses yeux vert émeraude. C’est à ce moment là, qu’Ambroise avait commencé à inventer de drôles d’histoires pour que Jérémie, âgé de huit ans, parvienne à mieux surmonter le décès de sa grande sœur. Le grand-père avait même été jusqu’à acheter une poupée de chiffon, qui avait à la fois une troublante ressemblance, et, le prénom de Juliette. Il l’offrit à Jérémie comme pour immortaliser sa sœur décédée et dès que Virginie fut en âge de comprendre, il lui raconta l’histoire de Juliette, sa sœur aînée disparue dans un monde différent du notre, où la vie n’était qu’une succession d’aventures plus insensées les une que les autres. David le père, n’était pas vraiment d’accord avec la façon d’agir de son beau-père mais en même temps cela semblait apaiser Jérémie, et permettre à Virginie de découvrir l’existence de sa sœur, sans que cela soit devenu un sujet tabou. Enfin, Élise et lui se sentaient tellement rassurés qu’après la perte de leur fille aînée, leurs enfants ne traînent pas entre les nounous et les garderies, qu’il acceptait, non sans parfois rechigner, les travers de son cher beau-père. Une fois arrivés dans le relai routier, les esprits quelque peu échauffés par le comportement excessif du grand-père, l’ambiance s’apaisa. Chacun alla se rafraîchir aux toilettes, puis se dirigea vers le self service, afin d’y faire le plein de mets divers et variés et de caler les estomacs vides et de se remettre les idées en place. Tandis que les enfants chahutaient gentiment ; Ambroise se délectait de son entrecôte grillée sauce poivre vert et de ses sacro-saintes frites. David, malgré une assiette pleine de spaghettis sauce bolognaise, prenait un malin plaisir à asticoter son beau-père, en lui piquant des frites dans l’assiette, et celui-ci bien sûr bon public, bougonnait de plus belle ; Élise était songeuse. L’atmosphère lui semblait pesante. Depuis qu’elle s’était réveillée en arrivant à la station service, elle avait comme la sensation que quelque un la suivait. Dans son rêve elle avait cru apercevoir sa fille Juliette décédée depuis maintenant cinq ans, qui l’appelait. Juliette ne semblait pas si heureuse qu’Ambroise pouvait l’en persuader. Non, Élise à l’instant éprouvait un drôle de sentiment. Pour ne pas céder à la panique et donner raison à son père en rentrant dans son délire d’autoroute maudite, elle choisit, alors qu’ils n’en étaient qu’au dessert, de sortir faire un tour afin de calmer son anxiété sans inquiéter personne. Elle se leva, embrassa ses enfants tendrement comme elle le faisait si souvent sans motif particulier, et avisa sa petite famille qu’elle avait besoin de téléphoner pour son travail et qu’elle le ferait en allant prendre un peu l’air dehors. Dès qu’elle fut à l’extérieur, Élise se sentit immédiatement plus légère, moins oppressée. Le soleil étant à son zénith, la chaleur qui s’en dégageait l’attirait irrésistiblement vers le chemin ombragé qu’offrait la forêt au bout de l’aire de jeu. Elle s’y rendit, essayant de mettre de côté ses tourments, de relativiser ses rêves et ses croyances, s’accrochant à la réalité, afin de pouvoir garder l’équilibre indispensable à son bonheur et à celui de sa famille. Tout en se dirigeant vers les bois, Élise pensa qu’ils avaient encore le dessert et le café à avaler, sans compter que les enfants souhaiteraient sûrement se détendre un peu et jouer aux balançoires avant de repartir, cela lui laissait bien le temps de réfléchir au calme et à la fraîcheur tout en se promenant. Le repas terminé, la famille sortit du restaurant et comme l’avait prévu Élise, pendant que David feuilletait son journal sur un banc à l’ombre, les enfants s’amusaient sur l’aire de jeux. Ambroise avait comme à l’accoutumée allumé sa pipe de fin de repas et se dégourdit les jambes, essayant entre autre de repérer où sa fille avait bien pu se caler, si elle blaguait toujours au téléphone ou bien si elle s’était endormie au pied d’un arbre. Une heure plus tard, tandis qu’Ambroise faisait la sieste à l’ombre sur une couverture, et que les enfants s’en donnaient à cœur joie sur les balançoires, David battit le rappel des troupes afin qu’ils puissent reprendre la route sans trop tarder. Il leur restait encore bien un quart du chemin à faire. C’est à ce moment-là qu’il réalisa qu’il n’avait pas revu son épouse depuis la fin du repas. Il s’étonna de ce fait, mais surtout de n’avoir pas réagi plus tôt. Il était habitué à ce que sa femme aille souvent se promener seule, sans but précis, profitant ainsi de se plonger mentalement dans ses futurs dessins. Il ne s’était donc pas affolé sur l’instant. Il composa tout naturellement son numéro de téléphone portable craignant par exemple qu’elle ne se soit égarée dans cette forêt qu’elle ne connaissait pas, mais ça sonnait dans le vide. Surpris, il informa le grand-père et se mirent alors à crier son nom un peu de partout, en allant ici et là, mais Élise semblait s’être volatilisée. Les employés du restoroute avaient été avertis, mais l’établissement n’avait pas accueilli grand monde. Les rares clients de ce début de semaine étaient déjà tous repartis, et personne n’avait été en mesure de donner quelque nouvelle que ce soit de la jeune femme. Virginie, trop jeune pour prendre réellement conscience de la gravité de la situation, restait collée à son grand-père et s’amusait, à qui crierait le plus fort, en appelant sa mère. Jérémie en revanche était mitigé. Il avait décidé, sûrement par pur mécanisme de défense, que sa maman avait momentanément basculé dans un monde parallèle et qu’elle reviendrait en temps voulu. Quand le père, effaré par la réaction de son fils de treize ans, lui demanda pourquoi elle n’avait pas changé de monde une fois qu’ils seraient arrivés à destination par exemple, Jérémie répondit que ce relai routier devait être le carrefour de plusieurs mondes parallèles. Et que c’était pour cela que les initiés avaient appelé cette autoroute 666. « Ah nous y voilà ! Tu déraisonnes complètement Jérémie ! hurla David. Je savais bien que les imbécilités de ton grand-père te monteraient au cerveau à toi aussi ! ». Ambroise qui était un peu plus loin entendit toute la scène mais fit comme si de rien n’était, sachant que de toutes façons son gendre était trop soucieux pour discuter de ces choses, qu’il passait son temps à réfuter. L’inquiétude grandissant, David appela Irène pour savoir si, déjà, c’était à elle que son épouse avait téléphoné après le repas, puis l’avertit de ce qui se passait, lui précisant au passage, qu’il ne savait pas quand ils arriveraient. A la suite de ce coup de fil, Il découvrit en fait que son épouse n’avait pas appelé son éditrice et d’un coup, tout se bouscula dans sa tête. Qu’était-il arrivé ? Élise avait-elle été kidnappée ? Avait-elle abandonné sa famille volontairement, comme ça, sans crier gare ? Où était donc passée son épouse adorée, sa fidèle compagne depuis quatorze ans, la mère de ses enfants, celle qui était aimée de tous ? Certes, elle semblait souvent lui fausser compagnie pour aller rejoindre le monde dans lequel elle vivait —un monde couleur pastel, dans lequel elle était entourée de ses drôles de petits chats, le genre qui font ami-ami avec les oiseaux et les souris— mais malgré tout Élise était une personne solide et fiable pour cette famille. Et il avait pu s’en rendre compte entre autre, lorsque leur fille aînée Juliette, avait traversé la rude épreuve de la maladie et qu’Élise l’avait aidé à franchir ce passage dans l’au-delà, tout en se préparant elle-même à mettre au monde une autre fillette. Une épouse et une mère merveilleuse ! C’est exactement tout ce que David avait confié au capitaine de gendarmerie. En effet, après avoir cherché, attendu, contacté ses amis, David et Ambroise avaient décidé de prévenir la gendarmerie dont dépendait le relai routier. Cela faisait maintenant quatre heures que cette jeune mère de famille s’était volatilisée et ils étaient à bout d’argument. Au téléphone le brigadier de gendarmerie leur avait bien précisé que du moment qu’Élise était une personne majeure, saine de corps et d’esprit, ils ne pourraient pas ouvrir une enquête pour disparition dans l’immédiat. En effet comme le disaient les textes de loi : « …du fait de la liberté du majeur à se retirer volontairement de son environnement habituel. », elle était libre de s’enfuir sans donner d’explication et avait droit au respect total de sa liberté tant qu’elle ne causait aucun tort à personne. Une des choses qu’ils allaient pouvoir faire malgré tout, outre expliquer les démarches à entreprendre, c’était de se rendre sur place au restoroute, afin de vérifier qu’il n’y ait quand même aucune trace de violence qui pourraient justifier un enlèvement. En l’occurrence au vu des circonstances, le capitaine de gendarmerie après avoir effectué les vérifications d’usage, déclencha une procédure pour disparition inquiétante de personne majeure, de par le caractère inexpliqué de la dite disparition. Une mère de famille partant en vacances avec les siens ne se volatilisait pas comme ça dans la nature. Tout fut donc mis en œuvre pour tenter d’apporter des réponses, afin de résoudre cette énigme. En attendant, et sur les conseils des gendarmes, le mari de la victime avait plutôt intérêt à loger sur place afin d’être au plus près, si quelque chose se passait. Les employés du restoroute avaient fournis à David des adresses de gîtes proches du relai routier, point de départ de la disparition de la mère de famille. Ambroise proposa à son beau-fils de prendre le monospace et de finir le voyage avec les enfants, pour de ne pas trop gâcher leurs vacances et surtout pour les lever de là. De plus, ils étaient plus proches de chez Irène que de chez eux. David acquiesça, même si Jérémie s’inquiétait de voir leur père rester tout seul ici. Il craignait que l’A666 n’emmène aussi son père dans un monde parallèle. Élise se réveilla la bouche pâteuse, il lui semblait avoir dormi plus que de raison. Et malgré tout, elle se sentait encore, vraiment très fatiguée. Elle se trouvait dans une sorte de réduit, propre mais sobre, dont l’entrée ne possédait pas de porte. Elle était confortablement allongée dans un lit très sommaire, son corps vêtu d’un jean et d’un pull tout ce qui avait de plus banal. Elle regarda autour d’elle, mais aucun souvenir, sentiment, aucune pensée, aucune réflexion ne parvenaient à atteindre ses neurones. Elle se releva, elle avait l’air en bonne santé, sans aucun problème physique qui aurait impliqué qu’on la mette au repos dans un hôpital ou un endroit de ce genre. De plus elle n’était pas en pyjama. Puis, elle jeta un coup d’œil vers l’entrée de la pièce car elle entendait en continu un léger brouhaha, qui d’ailleurs, semblait être volontairement dissimulé par une musique plutôt douce et pas désagréable. Le son couvrait, juste comme il fallait, les bruits de voix, de telle sorte que l’on n’en distingue rien de compréhensible. Où diable se trouvait-elle ? Avait-elle le droit de sortir de cette chambre improvisée ? Il n’y avait rien qui ressemblait à un téléphone ou une sonnette, et en même temps elle n’était ni enfermée, ni entravée. Il lui fallait juste réunir suffisamment de force et de courage pour se lever et sortir de cette pièce. Tout à coup, alors qu’elle s’apprêtait à se lever, son attention se porta vers le couloir sur lequel donnait sa chambre. Elle fut attirée par une silhouette gracile qui gesticulait dans tous les sens, portait de drôles de vêtements, et qui discutait avec véhémence. Soudain, Élise reçut de la visite. FIN