la muscaphobie

misshoes

Je hais les mouches ! Elles tournoient dans la cuisine, se sauvent dans les autres pièces et prennent un malin plaisir à bourdonner dans mes oreilles. Elles sont là, posées sur la vitre à se frotter les pattes, jubilant de la misère qu’elles se préparent à causer.

Je les hais ! Des plus petites aux plus grosses. Je les hais ! Surtout les grosses, celles où l’on peut voir les poils sur leur dos ! Je suis invalidée par leur existence. Leur présence me déconcerte, me débecte, m’horripile, m’horrifie. Mouches domestiques, moucherons, taons,…de leur naissance à leur physionomie tout me répugne ! Elles me font peur avec leurs ailes transparentes, leurs pattes velues, leur trompe infâme et leurs yeux ! AH ! Leurs yeux !

Leurs yeux remplis d'autres yeux qui remplissent d'autres yeux ! AHHHH !

D'ailleurs, des fois j'ai l'impression de perdre le contrôle de moi-même, comme si je m'éloignais de mon corps avec la sensation qu'une mouche veut me le voler... C’est l’angoisse lorsqu’elles se posent sur moi. Ça me rend tellement dingue qu’à la vue d’une de ces bestioles je me mets à danser la zumba !

Tant pis pour l’environnement je suis prête à les tuer à coup de vaporisateur pour toilette.

Ne riez pas nous sommes tous atteint d’une façon ou d’une autre.

Chacun son histoire, voici la mienne.

Connaissez-vous ce mal que peu d’entre nous osons partager ? Un mal si profond que même les plus raisonnables en perdent la raison ?

Oui la muscaphobie existe et j’avoue en avoir pris conscience réellement que récemment.

Pourtant tous les signes étaient bien ancrés dans mon subconscient.

Tout a commencé par cette peur que beaucoup avoue : la peur des abeilles et autres cousines hyménoptères.

C’est vrai après tout qui ne s’est jamais fait piquer par l’un de ces insectes volant ?

Leur bourdonnement déclenche dans notre cerveau une alarme étourdissante. Le genre de message amygdalien qui nous prépare à survivre au pire. Comment le reconnaitre ? Une liste non exhaustive de signe peut déjà aiguiller un lecteur bien aguerri.  Le poil s’hérisse, les pupilles tremblent, les battements de notre cœur s’accélèrent, tous nos sens sont alertes. C’est le début de l’angoisse.

Pour ma part ce fut une piqure d’abeille à la tête qui devint le vaccin radical à mon inconscience.

Que faire dans ce cas pour vivre normalement ?

Nous ne pouvons tous les éradiquer… j’ai lu que des scientifiques avaient fait le triste bilan que les abeilles étaient nécessaires à notre écosystème Que sans elles il ne nous resterait que 4 ans à vivre.

Mouais et bien si c’est 4 ans sans la crainte de se faire piquer je veux bien faire l’échange avec 40 ans d’angoisse… Malheureusement les apiculteurs, ces judas, voudront se venger et je me retrouverais donc dans la peur de me faire enfumer par l’un d’eux.

Pour le moment, je dois coexister avec ces nuisibles.

Et puis regardez les autres ! Les guêpes ou bien ces fourmis volantes ! N’est-ce pas juste révulsant de voir leur tête séparée du thorax  par un si tout petit cou qu’il semble invisible ?!

Invisible comme ces saletés de moustiques d’ailleurs. Dans la nuit alors que nous attendions ce moment propice pour recharger nos batteries. Ce moment où nous pouvons enfin voyager dans l’univers. Ce moment gâcher par l’arrivée effroyable de ce prédateur. Voilà qu’un bzzzi agaçant vient polluer vos songes. Et comme si ce n’était pas suffisant au petit matin les cicatrices d’une guerre perdue d’avance apparaissent. Des boursoufflures défigurantes, qui nous démangent à en perdre la raison, dispatchées un peu partout sur notre corps parfait la veille. Ce traitre ou devrais-je dire cette traitresse (puisqu’encore une fois des scientifiques nous informent que seules les femelles piquent) choisi le moment où nous sommes les plus vulnérables pour nous sucer jusqu’à la moelle. A croire que notre boulot ne nous pompe pas tout notre flux.

Cependant si ces peurs peuvent s’expliquer par une piqure fortuite à la suite d’une rencontre avec l’un de ces nuisibles la muscaphobie est très peu compréhensive.

Même le dictionnaire n’ose mettre la définition  de cet handicape sur ces pages. Ce mot est le produit d’un savant mélange de mots latin. Une déduction logique de maux pour en faire sortir l’un de nos pire cauchemar : la peur des mouches !

Pour moi il fallut trois évènements pour provoquer l’alarme  pour ce bzzi particulier.

Le premier fut mon grand-père. Que Dieu est son âme, mon grand-père est l’un de ces grands hommes dont le courage ne faiblissait jamais. Et de façon à ce que je suive ses traces, il eut la bonne idée pour m’ôter la peur des abeilles de les comparer à ces dits inoffensifs insectes. Lorsqu’une abeille fonçait vers moi tel un missile guidé et que j’hurlais de terreur mon aïeul me rassurait par la phrase suivante :

« Voyons ce n’est rien. C’est une mouche à miel. »

Une mouche à miel mais c’est vraiment dégueu ! Vous imaginez une mouche en train de faire du miel ?! D’un autre côté il suffit de regarder les abeilles noires de corse pour vite faire une comparaison… C’est juste immonde. Et de quel couleur serait le miel ?

Selon vous pourquoi existe-t-il différents ton de miel ? Récemment, les ruches alsaciennes ont rendu perplexe les apiculteurs qui ont dut résoudre le mystère du miel bleu. Et  l’explication est simple. Selon leurs études les butineuses lassaient des fleurs du pré seraient parties se repaitrent d’une usine de bonbons.

Donc je vous repose la question comment serait ce miel de mouche ?!

Le deuxième évènement fut une expérience traumatisante où l’un des plaisirs primaires fut ébranlé. Ce jour-là, ma mère me donnait mon gouter alors que je revenais de l’école. Toute guillerette, avec la musique de Cabrel en fond sonore, je dégustais goulument mes barquettes de LU au chocolat. Je me rappelle encore de cette chaleur estivale frappant sur ce vieux tacot où la climatisation n’était qu’un luxe que nous ne pouvions nous offrir. Et je me souviens surtout du moment où je croque avec appétit dans ce biscuit au chocolat fourré à la mouche morte.

Il va s’en dire que depuis ce jour il m’est impossible d’ingurgiter de quelques façons que ce soit ce biscuit dont je raffolais tant.

Enfin le troisième et pas des moindres est l’usage en science de la drosophile. Mon professeur Madame Bonhome insistait lourdement sur les expériences de transfert de gènes qui nécessitaient la présence de ce cobaye au combien dégueulasse. Mouche savante qui me valut de nombreux zéros.

Voyez donc les prémisses d’une victime de la mouche !

Pour vaincre ma peur je devais donc en connaitre d’avantage sur l’ennemie. Plus j’avançais dans mes recherches et plus la connaissance zoologique de ces diptères appuyait cette peur.

Car un lourd constat s’en suivit : les mouches d'aujourd'hui ne sont plus les mêmes que les mouches d’autrefois.

Dans mon enfance elles allaient se coller joyeusement par centaines, par milliers peut-être
sur du papier fait pour les tuer. Elles patinaient, piétinaient, trépassaient par centaines, par milliers peut-être… elles foisonnaient, elles vivaient.

Maintenant elles surveillent leur démarche.  Elles sont moins gaies, plus lourdes, plus majestueuses, plus graves, plus conscientes de leur rareté. Elles se savent menacées de génocide. Elles sont devenues plus intelligentes, plus rapides !

L’expression « il faut faire mouche » commence à prendre de son sens.

Je hais les mouches ! Elles me narguent.  Elles se posent dans la gamelle de mon chat, tournent autour de mes poubelles, pullules quand les beaux temps arrivent. Elles savent que le simple fait de les éclater à coup de chaussures me dégoute. Elles se défendent et foncent vers moi lorsque j’agite une serviette pour leur assener le coup fatal. Elles sont là et me gâchent l’existence !

La mouche tsé-tsé finalement n’est rien d’autre que la complice du moustique… alors méfiance. Et surtout armez-vous comme moi de torchons, tapettes, papiers collants, tue-mouches électriques et pulvérisateurs en tout genre pour survivre à cette guerre que nous n’avons pas déclenchée. Et puis pour les plus écolos d’entre nous il reste toujours la possibilité de domestiquer une chauve-souris ou une grenouille.

Signaler ce texte