La peur, ça craint
Sania Ginzburg
Je voulais parler de la peur
Vous allez rire
J'ai eu peur
De pas trouver les mots pour dire
Toute la sagesse de cette valeur
Que mon père m'a transmise un soir
De sa vie
De sa voix de savant
Il m'a dit
Surtout
Surtout
N'aie pas peur
Si ce n'est l'espace d'un instant
Plonges-y les doigts
Tu vois ?
De la boue
Mais mets-toi debout
Tu verras
Que tu marches droit quand c'est pas
Les chocottes qui guident tes pas
La peur, c'est qu'un gorgée de vodka
Un coup de jus
Une coupe d'éclairs
Mais si elle te fout la gueule de bois
Si tu te laisses glacer, tu perds
Car dès que tu lui offres cette chance
Sois en sûr qu'elle la saisira
Et qu' elle te serrera la gorge
Et qu'elle te ligotera les bras
Et là, une fois bien ficelé
Tu verras dans ton nœud de pendu
Que tes chaînes, tu les a ciselées
Que tes pièges, tu t'les es tendu
Et ta peur, ce n'est que Gollum
Un tout petit bonhomme tout blême
Dans une toute petite cave
Qui se cache même de lui même
Et toi, tu l'as laissé te bercer
Sans essayer de le maîtriser
Te griser pour t'hypnotiser
T'ankyloser pour te briser
N'aie pas peur
La douleur s'efface
Le gris passe
Si tu le trouves risible
Combien de fois l'homme réussit
Oubliant que c'est impossible
Sans se poser dix mille questions
Juste une
Mais la plus importante
Si tu sais que tu ne peux pas perdre
Qu'est ce qui te tente ?