LA ROUE TOURNE

makara

La roue tourne. La roue tourne. Tourne l'heure. C'est long.

La machine, affligée de ses chiffres fluorescents, me nargue du regard. Cliché immuable de l'existence.

Si la vie ressemblait à une machine à laver, ce serait plutôt triste. Tout n'aurait que 3 vitesses, la première celle des rêves immaculés, des grandes passions, et des blanches errances. La réussite parfaite, idyllique. Le top du top. Hélas, ce stade ne dure jamais longtemps car le moindre mélange le ternit et le transforme en mélasse décoloré. Pour prévenir cela, il faudrait abolir nos chimères les plus intimes, nos fantasmes chastes et notre âme innocente. Ce que tout le monde fait, ne nous leurrons pas, celui qui n'a jamais été taché est un menteur.

La seconde au rythme plus stable et aux couleurs chatoyantes serait le temps de la sécurité et celui de l'équilibre. On essaie d'y rester le plus longtemps. On y fourre un peu de tout, parfois trop de choses. On bourre, on bourre parce qu'on veut aller vite de peur de tout perdre, de pas pouvoir revenir et de recommencer. On a laissé de côté nos utopies essorés, car à force d'être douchés, on a finis par les oublier.

La dernière phase, assurément, emmagasinerait les petits malheurs ou les grands, les moments où l'on se sent trop faible pour combattre et trop couard pour espérer. Cette phase laineuse qui garde l'esprit à sa merci et vous compresse jusqu'à l'épuisement. Le fond du trou. La déprime bimensuelle, croit-on.

Fichue machine va ! Laisse-moi vivre un peu ! A tambour battant tu m'as trop joué de tours. J'ai le tournis.

Je ne gravite pas moi, je tombe, encore et toujours, asphyxiée par la phase 3. Sans espoir de changement.

Un bip retentit, je respire soudain. La machine c'est arrêtée.

Vingt minutes trop tôt.

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