Le Caprice des dieux
Noiret Tina
Jeunes assistants, lobbyistes, journalistes, fonctionnaires, quelques représentants du bon peuple, des avocats, des économistes se pressent dans l'agora. Ils discutent de concours injustes, de promotions canapé, de nominations non règlementaires, de l'utilisation des budgets dans la coopération au développement ou du bombardement d'un hôpital subsidié par les deniers européens et jamais utilisé en zone de guerre africaine. Des mains influentes se serrent hello my dear how are you today nice to meet you. Les femmes se font remarquer par leurs jambes gainées de soie et leurs décolletés. Est-on dans un parlement ou dans un défilé de mode ? Les députées rivalisent avec leurs secrétaires. Mieux payées, elles emportent la palme de l'élégance bon chic bon genre malgré leur âge. Les déesses sont immortelles, belles à jamais.
Fusent de partout des rires et des réparties spirituelles. Avec ravissement, ils communient « dans la caste et les privilèges » jetant un regard fugitif sur les badges qui indiquent qui est qui. On ne peut mieux dire qu'Albert Cohen. Chaque fonction a une couleur, rouge pour les externes, vert pour les assistants, jaune pour la presse. Le badge suprême est celui de député our brave new world. Ici, ils sont les rois ou plutôt les dieux, tout droit descendus de l'Olympe et vénérés comme tels.