Le goût du voyage

Camille Mourier

Une lumière faible éclairait la bibliothèque du 19 rue Jouallan. Lové dans un fauteuil élimé, le vieil homme poursuivait son voyage.

Ce voyage, il l’avait entrepris il y a près d’un siècle. Un périple féerique, dramatique, romantique qui l’avait mené au plus près des peuples, dans les pays les plus lointains.

Il avait découvert la tyrannie des régimes, la beauté des paysages, la complexité des hommes.

La musique d’une vie.

Il ne faisait pas partie de cette génération de « globe-trotters » à laquelle appartenaient ses petits-enfants. Son voyage au centre de la Terre, il l’avait fait à travers ses livres. Ses livres étaient son univers, sa poésie et son remède. Ils l’avaient suivi et aujourd’hui eux-mêmes avaient une âme. L’âme de cet homme, son odeur, la marque de son crayon.

Une lumière faible éclairait le salon du 41 rue Faidherbe. Lovée dans un canapé Ikea, la jeune fille poursuivait son voyage.

Ce voyage, elle l’avait entrepris il a à peine vingt-deux ans. Un périple féerique, dramatique, romantique qui l’avait mené auprès des hommes et de leur cœur, vers des terres étrangères.

Elle avait découvert la variété de la nature et s’était aventurée sur le parcours tortueux des hommes.

La musique d’une vie.

Elle faisait partie de la génération des « globe-trotters » à laquelle, dans cet univers mondialisé, elle se devait d’appartenir. Mais son plus beau voyage, elle l’avait fait à travers la passion de cet homme pour les livres. Il lui avait donné le goût d’apprendre et d’aimer ces pages qu’il reliait. Dans ces livres qu’il lui avait transmis, elle pouvait y retrouver l’âme de cet homme, son odeur, la marque de son crayon.

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