Le Jour où j'ai choisi le Bonheur.

francesyl

Récit caustique de la construction d'une femme tourmentée, à travers différents portraits et souvenirs ... (suite, L'exil...)

Nous avons choisi par ailleurs de mettre beaucoup plus de distance cette fois, de s'exiler complètement et cette terre tropicale s'imposa à nous comme l'endroit idéal pour abriter le début de notre nouvelle vie, et réchauffer mon cœur tellement abîmé.

Bizarrement j'ai dû mal à écrire sur cette période car elle aura été la plus reposante pour moi, apaisant très rapidement tous mes maux et me laissant presque totalement sereine.

En effet, ma vie se déroulait paisiblement sous la chaleur des tropiques, comme ralentie par l'étouffant climat chaud et humide ; et cette sensation générale d'être dans un petit paradis, à l'écart du stress des villes de métropole.

Je me sentais bien loin de mes repères, capable de me construire sans aucun jugement extérieur, de me faire des amis pour recréer du lien, d'ancrer plus profondément cet attachement pour mon petit garçon.  

Les jours se suivaient tous plus doux les uns que les autres, dans notre petite maison au bord de l'océan, nous étions biens tous les trois, totalement recentrés.

Il y a sur terre des petits paradis où l'on se sent comme dans un cocon, protégé du reste du monde, de ses agressions, de ses obligations, ici loin de tout je me sentais bien ; bizarrement bien alors que ce Département d'Outre-Mer est réputé pour son taux de criminalité et l'hostilité de la faune et de la flore qui s'y développe.

Je crois que la distance avec mes parents m'a permis de grandir, comme si à leur contact je ne pouvais me décoller de cette image de petite fille mal dans sa peau, m'éloigner pour casser le schéma, couper tous liens pour essayer de se trouver vraiment. Et cette nouvelle étape m'a permis de prendre confiance en moi, trouver un nouveau job qui me plaisait, créer des liens d'amitié sincères, devenir petit à petit une femme épanouie ou presque…

Nous nous sommes alors créé un nouveau cercle d'amis, et étant tous des « expatriés », les liens étaient beaucoup plus fort, plus sains, débarrassés des contraintes que peuvent générer les liens familiaux.

Chaque week-end étaient ponctués de découvertes de lieux tous plus différents les uns des autres, passants de la jungle tropicales, aux plages de sables de petites iles, et toujours agrémentés de rires et de bonne humeur.

 

Mais, la routine nous a rattrapés, car même sous les tropiques elle est perfide et peu distiller ses poisons, surtout chez les personnes qui, comme moi, ne trouvent le bonheur que dans cette quête éperdue de changement et de nouveauté.

Effectivement, j'ai appris que le changement et les projets étaient mes moteurs, et qu'après chaque étape il me fallait en trouver une autre pour me sentir bien.

Eternelle insatisfaite selon « mon père », envie d'avancer et de se réaliser « selon mon psy » ; bordel innommable pour ma petite personne !

Alors, me voilà mariée, un petit garçon, un boulot qui me plait, une vie au paradis en somme ; alors non ! ne pas profiter de ce bonheur, se compliquer la vie, aller voir ailleurs, pour trouver ce petit plus, mais lequel ?

Je suis donc repartie à sa recherche, cet Amour parfait et idéal qui me semblait se trouver en lui… retourner à mes 18 ans pour être sure, savoir pourquoi, essayer de le retrouver, de vivre maintenant Notre histoire.

J'ai donc décidé de reprendre contact avec lui et malgré la distance, nous avons pu nous retrouver virtuellement, au fil de longues conversations téléphoniques. Mon cœur s'est à nouveau emballé, regonflé de sensations, rempli de papillons à chaque sonnerie de téléphone, à chaque mot semblant chargé de sens.

Je me sentais totalement connecté avec lui, comme si je savais depuis toujours que c'était Lui, celui avec qui mon Bonheur serait parfait, la partie de moi qui me manquait.

Pas cet Amour de raison que la vie m'avait aidé à choisir, celui qui me faisait vivre une vie conventionnelle, mais un Amour puissant déraisonnable mais tellement plus vibrant…

Enfin, j'imaginais notre relation comme cela, même si je ne la vivais pour le moment qu'au travers d'un écran d'ordinateur et au son de sa voix.

Nous nous retrouvions quasi quotidiennement pour de longs échanges sur la vie, l'amour, le pourquoi de cette situation, le pourquoi de nous tout simplement ; mais nous vivions chacun de notre côté notre vie « réelle », lui à Paris, moi en Exil. Alors évidemment, rien n'était simple, il fallait se retrouver seule, payer de lourdes factures de téléphone, attendre, mais je me sentais bien, dans cette histoire parallèle.

Je n'ai jamais su son ressenti, car il excellait dans l'art de ne jamais trop se dévoiler, il fallait toujours décrypter, analyser pour tenter de comprendre. Alors, comment construire quelque chose, avec tous ces obstacles, ma famille, la distance, ses doutes ; la situation était bloquée et ne pouvait s'éterniser au-delà de ces quelques mois.

Je m'éloignais de fait de mon M. qui ne pouvait rivaliser avec ce sentiment inachevé qui me faisait rêver ; il était tant ancrer dans la vraie vie, affectionnant de son côté, ce train-train quotidien qui le rassurait. Il n'avait jamais su m'emmener si loin, dans ce tourbillon d'émotions, lui me ramenait sur terre, dans un bonheur plus basique qui ne semblait pas me correspondre.

Alors, je n'attendais qu'une seule chose, c'est que mon Prince Charmant me demande de tout quitter, de faire mes valises avec mon fils et de le rejoindre, pour enfin goûter nos corps, ses lèvres, sa peau et vivre enfin la réalité de notre histoire.

J'avais enclenché l'amorce de cette nouvelle vie, organiser les démarches administratives, informer mes parents, et je désespérais que nos conversations ne se terminent jamais par un : «  je t'attends… ».

Je devenais folle, chacun de ses appels me laissant plus confuse, ne sachant plus si tel mots avait le sens donné, cherchant toujours l'indice, le détail qui m'indiquerait que lui aussi en avait envie, envie de cet Amour. Mais, jamais je n'ai su, jamais il n'a prononcé ce que j'espérais.

Alors, déjà bien loin de mon M. et après de nombreuses discussions je me décidais à lui dire que je ne pouvais plus vivre avec lui, que mon Amour s'était étiolé et que je devais le laisser trouver une femme qui le rendrait plus heureux. Alors voilà, j'en étais là, revenue à mes tourments, perdue entre cette envie de découvrir une vie qui ne me garantissait rien et cette peur de m'ennuyer dans une autre qui me garantissait tout.

Mais je ne m'attendais pas à ce que mon M. m'aime plus que tout, qu'il est suffisamment d'amour pour nous deux, nous trois ; qu'il soit assez fort pour me porter vers lui et me faire oublier que mon cœur saignait.

Je suis rentrée quelques semaines en France, pour prendre du temps pour moi, mais soyons honnête, pour donner à mon Prince une dernière chance de m'enlever, la distance étant effacée. Mais il était trop tard, il semble qu'il avait eu peur, je pense qu'il ne pouvait me prendre moi et mon package de failles, qu'il n'était pas assez mur pour vivre une vie d'adulte, une vie avec un enfant à gérer.

Je crois qu'il était encore trop centré sur lui-même, avec l'impossibilité de donner tout cet amour que je lui demandais, il voulait vivre vite, plus fort, plus loin et ne penser qu'à son propre plaisir…

Mais moi aussi je voulais vivre vite, peut-être encore plus fort, mais je pensais pour deux et j'étais beaucoup moins forte que lui, aurait-il eu la force de nous porter ? Quoiqu'il en soit, il ne voulait pas faire partie de ma vie, et je devais être heureuse pour mon petit gars, alors je suis retournée dans mon paradis lointain et j'ai essayé, j'ai avancé en tentant de l'oublier, en essayant de rallumer la flamme de mon amour de raison. Et avec l'épaule forte et rassurante de mon M., j'ai su que j'y arriverai, que le temps me permettrait de repartir vers des horizons plus sereins…

A suivre (sans Lui)

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