Le jour où j'ai choisi le Bonheur.

francesyl

Récit caustique de la construction d'une femme tourmentée, à travers différents portraits et souvenirs ... (suite, Le Retour et Changer de Vie...)

Cette parenthèse virtuelle m'a surtout permis de grandir encore, de me connaitre un peu mieux, de comprendre tous les mécanismes mis en place ; d'ouvrir les yeux sur mon M., sur cet homme merveilleux qui n'avait de cesse de m'aimer, de me dire combien notre histoire était merveilleuse.

Je ne pouvais le quitter car je l'aimais encore, je comprenais enfin que cet Amour était plus profond et solide que celui entrainé par la passion.

Moi qui croyais que lui seul nous portait, je compris enfin que mon cœur battait aussi pour lui, et cet Amour que j'avais failli abandonner pour un fantasme, une passion non partagée, allait devenir ma priorité.

Il a fallu également prendre conscience que ma quête éperdue de nouveauté était inutile, car quoiqu'il arrive le quotidien nous rattrape toujours et l'essentiel est de se sentir bien avec la personne qui partage notre vie.

Et je me sentais clairement bien à ses côtés, jamais lassée du temps partagé, des longues balades au bord de l'océan, de son corps musclé, de son odeur d'homme fort, de son instinct « sauvage » renforcé par la dureté de son quotidien professionnel.

Alors, nous nous sommes redécouverts, nous avons renoué ces liens du passé et nous nous sommes à nouveau unis pour donner naissance à notre second enfant.

Ce petit être né sous les tropiques, est venu sceller notre Amour, et nous donné un nouvel élan pour continuer notre aventure ; mais cette fois en France, de retour dans nos montagnes, car la chaleur tropicale avait fini par nous lassé, et l'envie de retrouver des hivers, des couleurs d'automne avait finalement définitivement mis un point finale à cet exil.

 

5/ LE RETOUR

 

Que de chamboulements durant ces quelques mois de l'été de notre retour, entre les préparatifs du retour, le long voyage jusqu'à nos Montagnes adorées, notre petite famille agrandie et mes hormones en désordre…

Mais que de bonheur dans cet environnement magnifique, entre lac et montagnes, dans un nouvel appartement, une nouvelle vie à se recréer, vers la trentaine assurée.

Je me suis sentie beaucoup mieux, durant ces quelques années, comme après chaque changement, mon moteur à idée fonctionnait à plein régime et tout allait pour le mieux.

De toute façon et je sais désormais que cette tendance ne représente en rien une défaillance comportementale, chacun est motivé par les changements, ce sont les projets qui nous emmène loin du train-train quotidien, qui nous permettent de développer une nouvelle énergie, d'améliorer sa personne et de mieux se connaitre. Il m'aura fallu dix ans pour comprendre que je n'étais pas anormale, malgré les discours étriqués de mes parents, que j'étais juste comme la plupart des gens, emportée par un mouvement perpétuel: la vie.

 Certes la mienne, était plutôt jalonnée par des hauts (très hauts) et des bas (encore plus bas) ; mais j'ai compris maintenant, jeune quadra post dépression, que mon enfance était la seule cause de cette instabilité. Cette enfance, en quête perpétuelle d'Amour et de reconnaissance, perdue dans une sphère d'indifférence.

 Je vous épargnerai donc ces années de montagnes russes, entre retour rapide aux vieilles habitudes « alimentaires », changement de job, déménagements et toutes sortes de projets avec plus ou moins d'intérêt.

 

Mais, il y a des moments qu'il est nécessaire d'évoquer, les merveilleux d'abord : comme la venue de ma petite princesse, comme un cadeau pour unir cette jolie famille que nous nous sommes créée et qui restera pour toujours le centre de mon bonheur, cocon rassurant et perpétuelle source de plénitude.

Foyer solidement protégé par mon Grand Amour qui garde toujours une épaule à disposition pour me soutenir et avec qui j'adore toujours autant partager tous ces moments de complicités amoureuses.

Cette maison toujours animée par ces trois bonheurs que je ne me lasse pas de regarder grandir, s'épanouir dans la vie d'adulte, ou découvrir les tourments de l'adolescence, quand la petite dernière nous ravi encore de ses premières découvertes de petites filles.

Tout cet Amour qu'ils me donnent, si pur qu'il panse les plaies les plus anciennes, me permettant de vaincre les plus résistants démons de mon passé.

 

Car, il reste des mauvais moments, bien sûr , comme cette dépression à quelques mois de mes quarante ans, qui m'a fait couler dans une si grande tourmente que j'ai bien cru ne jamais pouvoir en réchapper.

Cette difficulté à entretenir de bons rapports avec mes parents, qui n'ont toujours pas compris que seul leur Amour me suffisait et non leurs conseils de biens pensants.

 Mais j'avance, je me connais désormais plutôt bien et je me sens apaisée, plus calme intérieurement.

 Avec néanmoins en arrière-plan de ce décor d'une vie très banale finalement, ce lien régulier et épistolaire avec ce Prince Charmant, qui n'aura de cesse d'entretenir le mystère sur son ressenti, sur son refus de me revoir, sur son intérêt quant à ma petit personne. Très bizarre comme ce lien « parallèle » a perduré entre nous, entretenant certainement cette nostalgie du temps passé, de l'adolescence insouciante.

Car oui, cet « homme charmant » alimente encore régulièrement mes rêves, toujours fantasmé, représentation d'une liberté qui de mon côté se serait perdue dans les mailles de ma vie de mère de famille très occupée.

 Mais finalement, je crois que je pourrais déployer une énergie folle pour pouvoir le retrouver et enfin découvrir s'il n'était qu'un fantasme ?

 Et si je pouvais écrire l'histoire en toute liberté…

 

 

6/ CHANGER DE VIE

 

- 05/09/2018 –

 

Ma décision est prise, je dois sauter le pas, prendre ce risque puisqu'il n'est pas prêt à le faire ; alors je vais aller vers lui, car l'incertitude me ronge et je veux désormais me libérer de cette histoire.

 J'ai enfin obtenu le nom de l'endroit où il travaille, et je vais le prendre ce TGV pour Paris.

Comment organiser ce voyage express sans éveiller les soupçons de mon M., qu'irais-je donc faire à Paris, moi qui ne m'aventure jamais très loin de ma petite vallée.

 J'ai bien évidemment trouvé une prétendue formation professionnelle imposée, pour justifier cette absence de 2 jours, qui m'éloignera du domicile conjugale.

 Je suis terrorisée uniquement à l'idée de mentir, quelle idiote je suis, après tout je ne fais rien de mal, je vérifie tout simplement.

Et contre toute attente, je me prends au jeu et arrive presque à me convaincre du caractère tellement rebutant de cet aller/retour dans cette ville que je déteste comme toutes les autres, leurs préférant sans hésitation la tranquillité des petits villages de montagne.

 Mon périple se concrétise petit à petit, réservation du voyage, de l'hôtel à proximité et mise en place des différents leurres pour alimenter mon mensonge et lui donner plus de crédibilité.

 Ce matin, exercice difficile consistant à obtenir les informations nécessaires sur la présence de Mathieu au restaurant le Pourquoi Pas, où il exerce ses talents de chef cuisinier. Je me concentre pour que ma voix ne trahisse pas la peur qui m'envahit lorsque je dois déployer des trésors de persuasion pour expliquer à la personne à l'autre bout du fil, que oui je dois lui faire une surprise, que évidemment il ne doit pas être informé, et quelle émotion il aura en revoyant cette cousine de suisse, dont il n'a plus entendu parlé depuis plus de 20 ans.

 Alors, je suis totalement satisfaite lorsqu'enfin, j'arrive à me faire confirmer ses horaires et que se dessine un peu plus précisément les contours de cette rencontre.

 J- 10 avant ce jour tant attendu, j'en parle du bout des lèvres à ma psy pour qu'elle puisse mieux appréhender la suite des évènements et les éventuelles conséquences qui pourraient en découler. Elle doit me prendre pour une dingue, mais elle est vraiment gentille et douce, alors elle me met en garde, mais m'encourage vers cette liberté qu'enfin je m'autorise.

 Je me retrouve alors dans un état de béatitude inédit, qui précède ce moment tant désiré, tant de fois imaginé, rêvé, mais cette fois je suis dans le réel, cela va se produire, je vais le voir « pour de vrai » ; et finalement à cet instant plus rien ne compte vraiment.

 

Jeudi 27/09/2018, petit matin d'automne que j'affectionne tout particulièrement pour la fraicheur retrouvée, pour les couleurs chatoyantes qui recouvrent désormais les arbres, pour les reflets presque magiques du soleil sur le lac ; mais aujourd'hui rien ne me préoccupe plus que mon cœur qui ronronne de plus en plus fort, prêt à défaillir sous les assauts de mon cerveau qui l'abreuvent de mille et une pensées plus folles les unes que les autres.

 Doucement, essayer de rester calme, savourer chaque instant, ressentir son corps dans ce moment si particulier qui ne se reproduira plus jamais, se sentir libre de tout envisager.

Le TGV m'emmène presque trop rapidement en gare de Lyon, j'ai à peine le temps de revoir le scénario à interpréter, je dois désormais me recentrer pour me déplacer dans Paris, moi qui suis si facilement désorientée et qui déteste la foule.

 Sur le quai de la gare, je reste un instant figée, prenant conscience de la situation où je me retrouve et m'interrogeant sur le chemin parcouru depuis 20 ans, depuis cette dernière fois où nous nous étions quittés sur le pas de sa porte, après une nuit tellement torride et hors du temps. Etait-ce le bon choix ? et ma famille si parfaite, mon mari si amoureux ? tout cela allait-il voler en éclat pour Lui, Mathieu ?

 Trop tard, impossible de reculer, emportée par le flot de mes émotions, j'active l'appli' plan de mon téléphone afin de me diriger vers l'hôtel réservé à proximité du quartier du marais.

 Finalement, ce petit périple me servira au moins à ancrer mes certitudes quant à la vie en ville, car ici tout me stresse : des odeurs, au bruit, en passant par les gens ; à mon grand désarroi, je dois bien admettre que je m'approche sérieusement du caractère asociale d'un ermite, tendance quadra déjantée !

 Mais, je trouve le temps de me poser tranquillement dans cette petite chambre d'hôtel, pour attendre 20h et le moment où il faudra affronter mon Prince.

 Je vous laisse imaginer le soin apporté au choix de la tenue à revêtir, ni trop décolletée, ni trop décontractée, pas plus sophistiquée, mais en fait que pourrait-il bien aimer ?

Aucune idée, et bien entendu impossible de retrouver ce look des années 90, où je rentrais dans du 36.

J'ai donc décidé d'opter pour un classique jean, tshirt savamment décolleté, veste cintrée et foulard coloré.

Finalement, la tenue dans laquelle je me sens bien, belle et sexy malgré mes quelques kilos en trop, maitrisant complètement mes atouts. Coiffure habituelle, maquillage un peu accentué et mon parfum préféré Un Jardin sur le Toit, d'Hermès.

 Chaque minute qui s'écoule me laisse un peu plus dans un état de nervosité impressionnant, presque difficilement contrôlable, me donnant envie de laisser tomber cette entreprise périlleuse.

Franchement, qu'est-ce que je croyais, qu'il me suffirait de venir à lui pour qu'il m'ouvre son cœur, qu'à la simple vue de ma petite personne il me referait vivre l'intense passion de Meryll Streep et de Clint Eastwood dans ce film dont j'oublie toujours le nom ?

Je ne sais plus, mais le temps des doutes est terminé, il faut avancer, et de toute façon peut-être que lui ne me plaira pas, que mon cœur ralentira la cadence pour se contenter de battre de joie, à de simples retrouvailles d'amis du passé.

 Stop, cette fois-ci je suis à deux pas du restaurant et bizarrement l'environnement me semble beaucoup moins hostile que tout à l'heure, la nuit tombée les lumières réchauffent cette petite rue du Marais et les gens me semblent beaucoup plus sympathiques, comme si ils avaient pris la mesure de la scène qui allait se jouer sous leurs yeux et qu'ils me soutenaient, spectateurs bienveillants de la rencontre que j'allais vivre.

 Nous y sommes, je suis installée dans ce charmant restaurant à la déco très bobo/chic, et aux effluves relaxantes qui s'en dégagent. Mais, en fait, cette odeur je la connais, la reconnais, souvenirs de soirées passées, où je testais mes limites, mais oui c'est bien du cannabis que je sens, oh mais dingue ! ce restaurant propose des plats à la composition pour le moins surprenante ; alors là je reste interloquée par le menu qui affiche burgers, thons, risotto ou autres brownies saupoudrés d'un trait de cannabis.

C'est fait, je me sens totalement arriérée, ignorant l'existence de ce genre de restaurant, mais qu'est-ce que je fiche ici, il va me prendre pour une vieille campagnarde descendue de sa montagne, je m'active à rassembler mes affaires pour m'échapper, mais le serveur arrête mon élan.

Oh mince, il va falloir affronter ce jeune branché et comment oser lui demander si il est possible de voir Mathieu ?

 

  • << Je me retrouve alors dans un état de béatitude inédit, qui précède ce moment tant désiré, tant de fois imaginé, rêvé, mais cette fois je suis dans le réel, cela va se produire, je vais le voir « pour de vrai » ; et finalement à cet instant plus rien ne compte vraiment.>>

    · Il y a plus de 5 ans ·
    Humain

    Pas Humain

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