Le musée de bateaux Vikings _ Oslo
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Le musée des bateaux Vikings
A peine l’entrée franchie la magie opère. Le brouhaha ambiant n’enlève rien au silence qui se fait à l’intérieur de moi. Il est d’une beauté incroyable. Je ne pensais pas le voir un jour. Pourtant, ce matin c’est fait. Les flashs sont là pour le fixer sur la carte mémoire. Il est là, noir, majestueux, devant moi. Du haut de ses siècles ils nous toisent. Sa splendeur n’a d’égal que tout ce que j’ai imaginé. A dire vrai, j’ai du mal à croire qu’il se trouve devant moi. Non. Je trouve devant lui ! Imperturbable il nous défi. Les siècles, les générations qui se sont succédé, lui doivent le respect. Bâti pour voguer vers les dieux il a silencieusement traversé l’Histoire. Mes yeux ne sont pas assez grands pour l’admirer. A ma grande joie il est possible de le photographier. En le faisant, je garde par devers moi une part de cette histoire. C’est étrange. Cela n’est pas « mon » Histoire mais je m’en sens si proche. C’est curieux tout de même la vie. J’ai écris un roman et me voilà presqu’à l’intérieur ! Pour moi, cela n’est pas seulement une étape sur un programme. C’est bien plus ! Mon inconscient matérialise des choses pas ordinaires. Je me surprends à penser à sa construction, aux hommes qui y ont participés. Les sculptures, sur la proue, sur ses flancs, reflètent la grande maîtrise des charpentiers de marine et qui lui ont donné vie. Fait pour partir vers la combustion et la destruction il est toujours là. Il est une tombe à la hauteur d’une reine. Enfoui pour servir de dernière demeure il est devenu le « livre » du passé. L’envie est grande de passer ma main au-dessus de cette « dentelle » en bois, de le toucher. Je n’en fais rien. Il est fragile et l’on y doit un total respect au-delà des raisons matérielles. Je m’approche. Je suis sous le charme absolu. C’est comme un objet qui vous obsède. Vous voulez y accéder sans pouvoir le faire. Une chose en interdit l’accès. La barrière est faite pour le protéger. Pourtant, je peux presque sentir le souffle du vent qui courrait sur lui. Je suis certaine qu’il n’attend pas grand-chose pour…
A l’intérieur des vitrines qui se trouve près de lui des objets sont exposés. Il reflète la ferveur des croyances. Elles devaient être fortes pour le garnir ainsi de tout ce qui entourait la reine. Ils sont chargés de symboles. Les meubles, les bijoux, tout ce qui est utile pour la vie future de la défunte sont présents. Situé tout proche du navire, ils restent dans son sillage. Ils sont tous les témoins sur la culture et l’essence même du pays qui les honorent par le fait de faire venir les enfants auprès d’eux. L’univers de ces hommes, de ces femmes, n’étaient pas seulement celui de la violence comme il est souvent enseigné. Il y avait un réel raffinement. C’est une civilisation qui ne nous est pas encore totalement connue. L’inconnu fait peur. Nous ne voyons que ce qu’il nous plait de voir. Ils furent craints et pour de bonnes raisons. Ils furent aussi des pragmatiques. Ils ont été par delà les mers et les fleuves en quête de richesses mais aussi de terres à conquérir pour s’y installer et vivre, simplement. Une autre femme se trouvait à bord. Esclave elle l’a accompagné dans la mort et dans l’éternité. La reine a gardé son mystère. Les noms et les visages des hommes se sont effacés. Peut être pas tout à fait… Qui sait si, la nuit, ils ne hantent pas les murs qui les emprisonnent ? Leurs âmes se sont-elles envolées ou restées prisonnières dans le bois des navires présents ? Je n’ai pas de réponse. Je tourne et vire autour le lui. Il semble vraiment venir de l’au-delà. Le temps passe et mon regard ne peut pas se détacher des ses courbes élégantes. Il est là tandis que d’autres ont sombrés ou ont été de leur temps désarmés. Qui peut dire s’il n’attend pas que l’eau remonte ? Ne rêve-t-il pas de briser ses amarres et d’aller vers des terres vierges ? Ne rêve-t-il pas de rejoindre les autres navires partit dans la cendre, vers les étoiles ? Mon âme rôde autour de sa coque. Je tourne et vire sans but. Je cherche dans sa beauté son salut. Mes yeux brillent. Je pense à autre chose de ce qui se déroule sous mon regard absent. Ne serait-ce pas moi, au final, qui a envie de briser les cordages qui m’enchainent ? A-t-on besoin de partir physiquement ? Les mots ne sont-ils pas un autre moyen de le faire ? Des mots mènent à une histoire. Une histoire fait voyager l’âme et donner envie d’aller plus loin. L’âme de l’un ne conduit elle pas celle de l’autre, inconnue ? L’inconnue ne sert elle pas de la première pour sortir de l’oubli ? La foule ne voit rien, n’entend rien. Que lui importe le souffle d’une âme. Ce qui intéresse c’est le navire et ce qu’il représente, dans le passé. Personne ne prête attention aux bruits, aux murmures. Ils ne sont, ces bateaux, que des « objets » que l’on exploite. Pourtant, sur la coque sont gravés les dessins qui racontent autre chose. Que disent-ils ? Je l’avoue, je n’en ai aucune idée. Les signes s’entrelacent. Ils sont comme une bande dessinée qui parle de…. Silence. Les dieux endormis peuvent entendre ! Où sont-ils ? Peut être cela leurs donneraient envie de revenir ? Et puis, il ne faut pas troubler le repos de ces femmes, si différentes, unies dans la mort. Dans le silence intérieur qui est le mien je me sens partir. J’entends le bruit des vagues qui se meurent contre les montagnes. Le fjord n’est pas loin. Suis-je prête à embarquer ? Embarquer vers le passé et l’imaginaire qui m’emporte dans un monde qui n’est pas le mien. Il faut raison garder. Pourtant, je n’en ai pas vraiment envie. Il me revient en écho dans la tête les images à qui j’ai donné la vie. Ont-ils connus ces navires ? Les leurs n’étaient-ils pas plus beau, plus forts ? Certainement. Sinon, comment auraient-ils, en leur temps, vogués par delà les océans ? Le présent et le passé se mêlent en un seul lieu.