Le Poil, Courbet et la boulangère - 4 -

scribleruss

Les avatars de Jean-Gilbert Cramoiseau

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- 4 - Cynthia la duplice

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 Il y a du monde monsieur Cramoiseau !

   Cramoiseau touche les doigts de Cynthia en lui donnant les pièces.  " Je n'oserais toucher le bout de votre doigt et vous m'éblouissez comme un ange qu'on voit " dit Ruy Blas à la Reine, mais c'est une autre histoire. Têtu Cramoiseau veut conclure, il ne peut déchoir. Il a trop fait son cinéma.

-   Et pour en finir avec le poil, quand vous verrez " L'Origine du monde " vous comprendrez et tomberez à la renverse !

   Jean-Gilbert Cramoiseau se retourne vers la queue qui bout dans des frémissements de jacquerie... il y a quand même bien ici des messieurs dames qui comprendront. Silence ! un ange passe, oui les anges existent j'en ai entendu.

   Cramoiseau finit par saisir son pain et sort en passant devant la queue qui le vrille de regards étonnés, méchants, haineux. Il va être l'heure de passer à table. Les nouilles vont être trop cuites. L'omelette sera sèche, Madame doit s'énerver à la maison. Madame attend.

     Dans la queue une voix aigrelette de bonne femme grimaçante s'exclame grinçante :

-   Ma pauvre que voulez-vous y'a plus que de vieux cinglés maintenant sur la terre et ça viole à tous vents. Méfiez-vous mademoiselle Cyndie. Des pervers comme ça, ça peut vous attendre au coin de la rue.

-    Pas Cyndie, madame Meuche ! Cynthia ! dit en sortant Cramoiseau.

   Cynthia a remis la file en mouvement. Elle seule sait qu'elle tient un blog sur un site internet pour adulte sur lequel elle exprime ses fantasmes, s'affiche, s'exhibe, s'ouvre, jette sa chatte à la concupiscence des voyeurs. Elle a intitulé son blog : " La petite pute du soixante neuf " qu'elle a introduit et présenté ainsi : " Ils disent que je suis une pute alors ne les décevons pas, feignons de l'être ".

     La vieille dame aigre en rajoute : " A qui aujourd'hui peut-on donner le bon dieu sans confession, cet homme pourtant faisait bonne impression, somme toute, un vicieux, un vieux cochon, un vieux fou lubrique ".

   Elle les connaît bien Cynthia les vieux cochons sur la toile. Ils frappent par centaines à la porte de son blog. Et pas seulement à la porte de son blog. Il faut dire qu'elle y met de sa personne pour les provoquer. Et beaucoup d'elle même pour le reste c'est du haut débit, du quatre G, ça tangente même le cinq G.

   Le coup de feu est passé. La clientèle s'est espacée. Cynthia se tourne vers l'aide boulangère la stagiaire et lui dit :

- Non, mais tu as entendu tout ce qu'il m'a sorti le vieux ! Je t'assure que le patron je vais lui en parler. Il a de la chance que c'est un bon client, qu'il nous achète tous les matins pour cinq euros de viennoiseries mais c'est un malade ce type, la vieille d'ailleurs l'a dit c'est un vicieux, un obsédé. Il m'a toute chamboulée.

   Cynthia se relisse la mèche sur le front et remet droit un bouquet de baguettes en désordre. Cynthia est une petite garce.

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A suivre

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