Le Printemps de Peter Flash (extrait)
lucphilogyne
Aucune reproduction, même partielle, autres que celles prévues à l'article L 122-5 du code de la propriété intellectuelle, ne peut être faite de cet extrait ou du site sans autorisation expresse de l'auteur.
Aymeric Pouderoux glissa son regard vert autour de lui. Vingt-deux ans, fils aîné d’Alain et de Dominique Pouderoux, professeur de dessin et mère au foyer respectivement. Cheveux bruns coupés assez courts mais qui révéleraient ses origines s’il les laissait pousser très longs. Bordelais du côté paternel, corse et andalou par sa mère. Il faudra mettre ajouter une arrière-grand-mère issue d’une grande famille marocaine s’il fallait bien fouiller dans l’arbre généalogique. Il faut bien avouer que Dominique, malgré sa situation, serait pourtant née avec une cuiller teintée d’argent. En effet, son père fut un brillant négociant de tissus avant que celui-ci connaisse la banqueroute. Dominique avait tout de la femme venue du sud : le caractère, la taille menue, l’énergie nécessaire pour élever deux enfants et tenir son ménage si ce n’est fournir quelques efforts physiques pour le sport ou les discussions qui virent au pugilat. Sa fille cadette Ocilia, quatre ans plus jeune que son frère aîné. Ocilia, que certains membres de la famille surnommait Pallas, du prénom de sa grand-mère paternelle, dont elle avait hérité la mèche blanche plantée dans un océan de jais échouant jusqu’aux reins.
Aymeric rappelait beaucoup son père par sa démarche, d’abord, caractéristique aux Pouderoux, puis une grande réserve teintée d’une nonchalance qui pouvait tantôt dérouter, tantôt séduire les interlocuteurs d’en face. Aymeric était assez loin d’être un garçon charismatique mais il était d’une compagnie agréable. Il avait longtemps pratiqué du judo et du roller skate pour avoir cette attitude leste et quelque peu féline quand il se déplaçait.
De l’avis de tous ceux qu’il approchait, il n’avait pas l’assurance d’un meneur mais il parlait et présentait plutôt bien. Mesuré, volubile mais sûrement pas prétentieux, ni frimeur. C’est aussi ça qui avait séduit Daisy, dès le départ. Même si leur tout nouveau couple semblait quelque peu antinomique, aux yeux des rares personnes à connaître leur relation.
Aymeric venait d’achever ses études. Le bac L en poche et une première année en BTS communication des entreprises avortée, il venait d’enchaîner de petits boulots en missions d’intérim, tout cela en l’espace d’un an. Aymeric, désirant observer une courte période de réflexion et ou débauche auprès de Pierre-Aimé Dallongeville, le permis B en poche depuis deux ans mais toujours pas de véhicule en main jusqu’à que Mme Pouderoux se décide enfin à s’acheter sa voiture et la partager avec son fils qui semblait plus à l’aise qu’elle derrière un volant. Une Classe B 190 Avant-Garde de couleur grise métallisée. … Le piège parfait à fille, selon Pierre-Aimé qui aimait s’afficher à l’avant du véhicule à chaque sortie nocturne. Selon toute apparence, les Pouderoux n’étaient pas pour autant privilégiés. Le voisinage n’était pas dupe du statut d’Alain Pouderoux, professeur de dessin dans le privé. Alain était lui aussi issu d’une bonne famille girondine, principalement de Pessac, cette même ville qui l’a vue naître et vu ses premiers amours dont Dominique devait – furtivement – en faire partie. Des grands-parents partis de rien et des parents destinés, bon gré mal gré, à devenir des enseignants dotés d’un mode de vie assez confortable. Mais cette ascendance n’avait jamais empêché Aymeric et sa sœur cadette de fréquenter leurs camarades de classe du quartier du Val d’Argent.
Daisy fouilla dans son sac à main, puis en sortit un morceau de papier sur lequel était inscrit un numéro de portable.