L'ensorceleur de sorcière

Malou

2017

Paris je te quitte épuisée.

J'essaie d'apprivoiser mon tempérament addictif.
C'est dur.
Dur de lutter contre l'angoisse de dire adieu. De discerner mes hallucinations et mes paranoïas de la réalité.
D'accepter, de comprendre. Je ne dois pas délaisser ma chère solitude pour ton amour. Tu ne voudrais pas et ne dois pas m'aimer comme mon être entier te le réclame à grand cris. Car je m'y perdrais et toi tu t'userais.
Tu sais aimer mon indépendance, et elle ne doit pas être incompatible avec ce qui nous lie.
Je ne veux pas que ma folie te perde; j'ai trop d'amoures assassinées de mes propres mains dans mon cimetière et si je tue le tiens, je serai obligée de lui offrir la plus belle des sépultures.
A chaque fois que je me suis séparée de toi, j'ai senti que l'air me manquait, que les moments sans toi n'allaient être que des étouffements. Cette fois-ci ton départ a été précédé par un orgasme qui a fait trembler la terre. Dans la salle de bain de la chambre d'hôtel, je me suis effondrée. Tu as du partir en courant car tu es toujours en retard quand je suis nue. Ça ressemble déjà à une habitude.
Mon souffle était court, mes joues rouges, et les hoquets de mon orgasme se sont petit à petit métamorphosés en sanglots. Tu es parti à temps pour ne pas voir des grimaces bien différentes déformer mon visage. Je n'avais pas pleuré comme ça depuis longtemps. je t'ai regardé entrer dans la navette depuis la fenêtre, entourée d'avions, et j'ai gémis comme si tu venais de mourir.
Tu as ouvert toutes les vannes de mon corps, et des torrents s'en sont échappés. 

J'ai envie d'arracher toutes les pages. Elles n'ont fait que mentir en cherchant obsessivement des couleurs dans des instants trop ternes. Mon esprit connaît bien son théâtre, il sait inventer mille saveurs à chaque plat trop fade. Il m'a toujours trompé pour que je me sente vivante. Pour me protéger de la vacuité et de son vertige. Il sait chercher minutieusement l'intensité partout. Dans chacun de vous, il a bluffé. La mascarade à pris fin et c'est peut être pour ça que je pleure tant.
Je contemple le triste spectacle des mes illusions mises à nues. Comme dans une rave party lorsque le jour se lève et que la drogue se dissipe. Je les voit telles qu'elles ont toujours été. Le masque est tombé. J'ai joué la comédie. J'ai joué des tours à mon âme. J'ai fait semblant d'aimer, d'embrasser, de fusionner. Je voulais y croire ! Bornée, j'y croyais peut-être un peu. Comme je me rends à l'évidence...
Je hume, je lèche chaque partie de ton corps comme s'il était mien depuis des temps immémoriaux. Comme si je connaissais ta chair. Tout m'enivre, rien ne me répugne. Je contemple le chaos de ces dernières années, ses fausses tragédies, son vide émotionnel. Les moments de vie avec toi glissent, coulent et éclaboussent. Rien ne leur met d'entraves.
Quelque chose s'est calmé, un manque s'est comblé.
Il y a une grande paix derrière ce ravage.

L'oiseau inquiet dans mon cœur se repose enfin.

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