Les Eaux Claires   

My Martin

La boîte rose

Angoulême, 1998 

Jeudi 3 décembre 1998, fin d'après-midi. Employée d'une plateforme du groupement Intermarché de Roullet-Saint-Estèphe, Francesca Parra-Palmero (30 ans. Née le 5 août 1968. Jolie brune) se présente à la gendarmerie, pour une affaire de sac à main et de chéquier volés, en août 1998. Elle est convoquée pour le samedi 5 décembre (utilisation de son chéquier dans une proche station-service) mais souhaite rencontrer un gendarme au plus vite 

Jean-Marie Parra, l'un des cinq frères de Paquita. « Paquita se sent menacée, demande à être placée sur écoute. On lui demande de repasser plus tard. Aucune question ne lui est posée » 

Le gendarme ne prend pas de déposition et l'invite à revenir, le jour de sa convocation après-demain 

Paquita Parra regagne son domicile à Villebois-Lavalette -26 km, au sud d'Angoulême. Contrairement à son habitude, elle ne s'arrête pas chez sa mère, Carmen, qui habite sur sa route 

Elle quitte précipitamment son domicile vers 18 heures 30 

 

 

Vallée des Eaux Claires, parking de Puymoyen -à 5 km d'Angoulême sud-est   

Vendredi 4 décembre 1998, peu après 3 heures du matin. Deux gendarmes découvrent la carcasse d'une Fiat Uno rouge qui achève de se consumer 

Au volant du véhicule, un corps en partie carbonisé 

Empreintes dentaires. Francesca ‘Paquita' Parra. Paquita Parra pour son entourage. Son domicile est situé à une vingtaine de km de Puymoyen 

 

 

Les experts examinent la carcasse du véhicule   

Intact, le pare-brise est déposé à côté de la voiture calcinée -faire un appel d'air, afin que le feu prenne de l'ampleur 

Les portières ne sont pas verrouillées 

En raison de l'incendie, toute prise d'empreintes s'avère impossible 

A la hauteur des pédales, un petit tube métallique de peintre, un cutter, des allumettes et un produit inflammable 

Le siège conducteur est reculé à son maximum, alors que Paquita mesure 1mètre 65               

Aucun périmètre de sécurité n'est établi 

 

Autopsie. Enfoncement sur le côté droit de la tête. Dans les poumons de Paquita, aucune trace de suie ou de fumée. Lorsque la voiture a été incendiée, Paquita était morte 

 

 

Deux témoins se manifestent 

Le premier témoin a vu Paquita Parra vivante, à 21 heures 30. Elle semblait attendre quelqu'un 

Le second témoin a vu des flammes, vers 23 heures 30, à l'endroit où la voiture a brûlé 

 

 

Selon certains témoignages, Paquita traversait une période difficile. la famille dément 

 

Paquita Parra a une vie sentimentale agitée 

Depuis huit mois, elle fréquente un collègue, Patrick. Il sait que Paquita continue à voir Franck C. Patrick a un alibi. Le soir du drame, il regardait un match de football à la télévision 

 

Paquita a un amant, son ex. Franck C., artiste peintre (né en 1969), son compagnon pendant quatre ans. Marginal, violent. A plusieurs reprises, pendant leur relation, Paquita a eu le visage tuméfié 

Début 1998, ils rompent. Selon plusieurs témoignages, Franck C. S'il fait quelque chose un jour contre Paquita, "personne n'en saurait rien" 

Les amants continuent à se rencontrer 

 

 

Perquisition au domicile de Franck C. Des tickets de caisse 

Jeudi 3 décembre 1998, le jour du meurtre de Paquita Parra, Franck C. a acheté trois bidons d'essence et une paire de gants en latex. Pour des travaux de peinture 

Garde à vue. Alibi. Franck C. a dîné avec un ami au restaurant, à 10 km de la Vallée aux Eaux Claires. Le patron de l'établissement, des clients, confirment. Mais après le repas, il avait le temps de se rendre aux Eaux Claires pour tuer Paquita 

Le tube de peinture dans la Fiat Uno ? Franck C. utilisait parfois la voiture de Paquita 

La psycho-criminologue Michèle Agrapart-Delmas (criminologue, née en 1945. Expert judiciaire auprès de la Cour de cassation et de la Cour d'appel de Paris) étudie le profil psychologique du suspect. « Psychopathe ». Sa personnalité est "totalement compatible avec un passage à l'acte meurtrier sous le coup d'une frustration" 

Septembre 1999. Franck C., mis en examen, est écroué 

 

Les parents de Franck C. engagent le détective privé Roger-Marc Moreau. Il prouve qu'après le restaurant, Franck C. est rentré chez lui. Il a visionné un film 

La défense (avocat Daniel Lalanne du barreau de Bordeaux) fait écarter le rapport de la profileuse, qui n'a jamais rencontré Franck C. 

Michèle Agrapart-Delmas a outrepassé son rôle technique, en intervenant pendant la garde à vue pour guider les gendarmes. Une partie du dossier pénal est annulée 

Le dossier d'accusation se vide 

Détention provisoire, onze mois en prison. Le 19 septembre 2000, Franck C. est remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire. Il reste mis en examen 

Angoulême. La première juge d'instruction chargée de ce dossier, Élisabeth Decencière-Ferrandière est persuadée de la culpabilité de Franck C. Parlant du peintre, elle déclare aux parties civiles "On n'a pas la certitude qu'il a agi seul, mais il est peu probable qu'il ait des complices, car il ne fait confiance à personne" 

La juge est dessaisie de l'enquête par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, pour "partialité en faveur de la partie civile" -cas rare 

Estimant que les droits de Franck C. n'ont pas été respectés, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux ordonne que le nom et le prénom de l'artiste peintre charentais soient rayés de l'ensemble du dossier 

 

2008. Indemnisation pour détention abusive. En justice, Franck C. obtient 120 000 € de dommages et intérêts 

 

David Parra. Au sujet des soupçons qui pèsent sur Franck C. "je pense qu'il est impliqué dans ce meurtre, directement ou indirectement, mais il n'est pas le seul. Je pense qu'ils sont plusieurs" 

 

 

Cinq juges d'instruction, nombreux rebondissements 

Octobre 2010. Ordonnance de non-lieu. Affaire classée 

 

 

Septembre 2017. Sortie scolaire, à 2 km du lieu du meurtre. Au pied d'un arbre, une lycéenne (16 ans) découvre un pull vert et une boîte rose, abandonnés 

Des cartes de fidélité Auchan ou Conforama, un badge Intermarché, une souche de chéquier du Crédit Agricole 

Avec ses camarades de classe, dans le cadre d'un atelier artistique, l'adolescente manipule les objets trouvés. Puis elle les conserve dans sa chambre 

Intriguée, avec sa mère, elles recherchent le patronyme Francesca Parra, sur Internet 

L'affaire judiciaire refait surface   

18 juillet 2018. Réouverture de l'information judiciaire 

 

David Parra. Dans la boîte, "des éléments signalés dans le procès-verbal de plainte pour vol de Paquita, en août 1998" 

 

Les effets de Paquita Parra sont analysés. Ils n'ont pas séjourné pendant deux décennies dans la nature. Le dépôt est récent 

 

 

3 septembre 2018. Digne, entourée des photos de sa fille, Carmen Parra (née en 1932), la mère de Paquita. Villebois-Lavalette. « J'attends toujours la vérité. Ma maison, je la range le mieux possible, pour qu'elle soit contente. C'était sa maison » 

 

Jean-Marie Parra. « Peu de temps avant son décès, Paquita a acheté cette maison, seule, à Villebois-Lavalette. Elle était indépendante » 

Jean-Marie et son frère David. « Ces derniers jours, plusieurs témoignages concordants ont été recueillis. Ils mettent en cause un homme » 

 

 

4 septembre 2019, cimetière de Villebois-Lavalette. Le corps de Paquita est exhumé. Nouvelle autopsie 
 


 

29 juin 2021. Quatre personnes de l'entourage de Paquita Parra sont placées en garde à vue. Vérification des emplois du temps 

Le frère aîné de Paquita, David Parra est placé en garde à vue 

36 heures de garde à vue. Remis en liberté. Les enquêteurs reprochent à David son activisme pour connaître la vérité. « Pour retrouver l'assassin de ma sœur, je suis prêt à faire dix gardes à vue, s'il le faut. Mais depuis un an, rien n'a avancé » 

 

7 septembre 2022. Lassé, fatigué, Salvador Parra, le frère de Paquita. "Nous avons perdu un temps phénoménal pour résoudre l'assassinat de Paquita" 

 

Pour les frères de Paquita, leur sœur a été victime d'un crime crapuleux, en lien avec les chéquiers volés quelques jours avant le drame 

Christine Maze, leur avocate. Une piste intéressante. La scène de crime, la volonté de faire disparaître les preuves, peuvent laisser penser que le / les coupables sont des professionnels. L'un des protagonistes détiendrait chez lui, des armes, qui n'ont pas été expertisées à l'époque 

 

Bordeaux. Christine Maze, l'avocate de la famille. "Ce dossier particulier demandait un traitement particulier, avec des moyens qui manquaient à Angoulême. Le fil de la recherche de la vérité a été perdu. Le dossier a été transmis au pôle du tribunal de Nanterre" 

« Le ou les protagonistes susceptibles d'avoir causé la mort de Paquita sont tous identifiés dans le dossier. Il faut identifier le coupable » 

Pôle judiciaire national dédié aux affaires non résolues, créé le 1er mars 2022. Enquête toujours en cours, le dossier ne relèverait pas du pôle de Nanterre 

 

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