Lettre à ma conseillère Pôle-Emploi

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Chère Conseillère Pole-Emploi, 

J'ai appris aujourd'hui par un de vos pairs employé par une agence de travail temporaire, que je ne suis pas assez qualifiée pour prétendre à un poste d'assistante, même si j'ai déjà occupé cet emploi. Je lui suis reconnaissante d'avoir été honnête. Et en même temps, je ne peux pas dire que j'ai été surprise par ce constat, puisque je postule sans résultat à des annonces pour ce type d'emploi depuis un moment déjà. Un an en fait, une année au cours de laquelle pas une fois vous n'avez trouvé le moment pour me dire que vu le nombre de personne ayant un diplôme dans cette branche et la quantité d'offre de poste, peut-être devrais-je me pencher sur d'autres options. Un an durant lequel je vous ai vu deux fois : la première pour mon inscription et la deuxième à ma demande. 

Ne vous méprenez pas, je ne vous blâme pas tant que ça. Bien sûr un conseil pertinent aurait été le bienvenu. Mais j'ai été de l'autre côté de la barrière moi aussi, j'ai fait partie un moment du domaine de l'insertion et je sais comment ça fonctionne. Je sais que vous avez un portefeuille de demandeurs d'emploi qui dépasse l'entendement. Que vous avez des priorités à gérer, des statistiques à remplir. Je sais que les bénéficiaires des minima sociaux sont en haut de votre liste, qu'il vous faut renvoyer rapidement les "chômeurs longue durée" sur un emploi durable, même si par durable l'administration entend emploi à partir de 6 mois de durée. J'ai conscience que votre emploi aussi est précaire, et que peut-être même sans le savoir j'ai changé de conseiller depuis mon dernier rendez-vous. 

Ce que je remarque toutefois c'est que ce qui importe le plus c'est la formation. Qu'importe la capacité d'adaptation et d'innovation, l'envie, la motivation, sans le diplôme les portes s'ouvrent beaucoup plus difficilement. Peut-être est -ce plus simple dans de plus grandes villes que la mienne mais j'en doute. La formation, le diplôme, ce bout de papier, précieux sésame pour intégrer un poste, une entreprise, une équipe, c'est quelque chose que je n'ai pas. J'ai un niveau d'étude - 3 ans après le bac - une culture générale pas trop mauvaise, une curiosité d'esprit et l'envie de faire quelque chose de ma vie. Mais il n'y a pas de diplôme qui sanctionne cela (d'ailleurs vous n'avez jamais trouvé ça étrange ce terme de "sanctionner" ?). C'est le résultat de choix que j'ai fait mais je ne les reproche à personne. 

Vous par exemple, quel diplôme avez-vous ? Il existe aujourd'hui un titre professionnel pour exercer ce métier, il est accessible en financement région si on bosse suffisamment son dossier d'inscription. Ah oui, il est aussi accessible en CIF (Congés Individuel de Formation) à quiconque à cumulé assez de droit pour payer, et aussi à ceux qui sont en reconversion professionnelle après un licenciement économique par exemple. Ces derniers sont prioritaires d'ailleurs, et c'est bien en un sens de pouvoir se former si facilement après un tel tournant dans sa vie professionnelle. Et puis il y a aussi tous les autres professionnels de l'insertion qui viennent d'horizons différents, en grande majorité du commerce parce qu'on a l'habitude de travail avec des objectifs. Je ne sais pas ce qui me rassure le plus, savoir que  dans une autre vie vous étiez commerciale ou que vous avez été parachutée à votre poste parce que vous justifiez du diplôme qu'il faut. 

Il est probable que vous soyez une bonne professionnelle mais je ne pense pas que vous ayez les moyens pour vraiment accompagner les gens comme ils le voudraient. Vous n'avez ni le temps, ni le soutien de la hiérarchie et vous n'avez pas souvent la confiance de ceux qui sont en face de vous. Mais si nous ne devons compter que sur nous-mêmes pour trouver un emploi, si ceux qui doivent nous conseiller se limitent à nous donner les informations que nous avons déjà, qu'elle est l'utilité d'une machine comme Pôle Emploi ? Sur des millions de sans-emploi, combien vont entendre le bon conseil, combien vont rencontrer la personne qui sera vraiment à leur écoute et leur apportera une aide judicieuse ? 

Chère conseillère Pôle Emploi, je ne vous en veux pas, d'ailleurs je ne vous ai jamais attendue pour chercher du travail. Quand je retrouverai un emploi, je pourrai au moins me dire que je ne le dois qu'à moi-même

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