Lettre à Pinocchio.
robeen
Nous sommes tous des imposteurs.
Qui usurpent volontiers l'identité d'un autre.
Qui troquent une personnalité contre quelques secondes fictives.
Pour prolonger la fiction, nous créons des idoles : religieuses, spirituelles, artistiques, virtuelles, peu importe! Tant qu'elles constituent un échappatoire.
Au diable Freud, au diable son "ça", son "moi" et son "sur moi"! A quoi bon s'interroger sur la multiplicité de notre être, si notre salut réside dans le paraitre?
Nous travestissons notre conscience à coup d'artifices.
Nous sommes de ceux qui refusent d'être.
Nous sommes de ceux qui ont peur d'une fin sans début, sous les ficelles que la main du destin a tendues.
Nous sommes de ceux qui se rêvent héros indestructibles.
Nous sommes de ceux qui se pensent invulnérables, sagement caché derrière un masque d'indifférence.
Orphelins d'une réalité déchue, nous créons nos pères de substitution pour éviter de cogiter une fois la nuit tombée.
Pour oublier de se souvenir que derrière une fumée opaque, au fond d'un verre, entre les lignes d'une prière se cache un être fragile et mortel.
Pour éviter de sentir, par peur de ressentir.
Mieux vaut se persuader de l'enfer, comme s'il ne pouvait en être autrement. Mieux vaut croire son cœur en pierre, plutôt qu'oser écouter ses battements.
L'amour est un tyran qui asservit nos inclinations quand ces personnages nous offrent l'illusion de briser nos chaines.
Hélas, l'ironie est qu'en érigeant cette forteresse de froideur, nous bâtissons un rempart contre la vie.
Vaincre la mort est chose aisée pour une marionnette inanimée.
Nous devenons les spectateurs de notre propre existence, nous éteignons la lumière dans l'obscurité de nos êtres.
Et vous?
N'oubliez jamais que la vie suivra toujours son cours, elle ne s'arrêtera pas, pas pour vous, ni pour moi.
Et viendra le jour où vous vous retrouverez devant votre épitaphe, épitaphe sur laquelle sera gravé le nom d'une personne qui aura de oublié de vivre par peur de mourir.
Les mots deviendront aussi vides de sens que votre tragique existence.
Et toi?
Et toi, tu es là, marionnette désabusée, cherchant à te frayer un chemin à travers la réalité. Vers ta réalité.
Il n'est pas trop tard pour vaincre le passif, quand bien même il n'existe aucun remède à la vie. Rien ni personne n'empêchera ton coeur de saigner, aucun héros, aucun masque, aucune supercherie.
Alors vis, bordel! Respire, ris, pleure, crache, crie, brûle, hurle! Mais surtout, aime. Aime.
Délaisse ton personnage et soit la personne.
Tu ne deviendras jamais un véritable petit garçon si tu continues de mentir à toi-même, à croire qu'il ne reste que toi pour ne pas voir ton nez s'allonger.
Coupe tes fils.