Lettre ouverte à la Vie

Ana Elle (Cendrillon Des Routes)

A Lana.

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Chère Vie,


J'ai longtemps hésité avant t'écrire.

Il se trouve que je vois des choses, comme la deuxième étoile à droite, et tout droit jusqu'au matin ! C'est Peter Pan qui a dit ça, comme il a dit aussi : Vivre, ça doit être sacrément une belle aventure ! Je vois des magiciens, je vois des feux de forêt, des comètes, des aventures… Je vois des sortes de fils d'or, qui nous relient les uns aux autres, comme des routes magiques pleines de hasards et de situations. Je vois des fées, des combats et des dragons !

La plupart des gens ne se rendent pas compte de la magie qui nous entoure. Pour la plupart des gens, elle n'est qu'un leurre. Moi je crois juste qu'ils en ont peur. Je crois profondément que chacun d'entre nous, quelque soit son âge, est né à une époque magique. Je crois en la magie. Petits confettis d'existence qui tout autour de nous, brillent et dansent. Mais l'éducation et la norme retirent violemment la magie de notre âme et nous rend plus faible face au drame.

Les serments, les devoirs, les corrections, nous hurlent de devenir grand, très vite et très bien. Et on oublie vite ce qui nous illuminait gamin. La vie, elle-même, devient dure, et triste. On se plaint, on se dépêche, on ne fait plus attention. Si vous saviez, si tu savais Vie, comme je rêverais detesentir là,tout contre moi. Si tu savais comme j'ai envie de te chérir et de t'aimer avec la même fougue et la même naïveté que les êtres ont dans « conte de fée ».

Je suis là, allongée dans ma chambre d'hôpital, et je les contemple, je les contemple tous dans leur état gris pâle, je contemple ces adultes à travers leur marée noire de tristesse. Je les regarde simplement courir dans leur détresse. Ils sont si tristes, et je crois bien que très peu s'en rendent compte. Ils ne savent pas pourquoi. Pourquoi ? Parce que ça dépasse leur entendement. Ça va au-delà. Du bien. Du mal. De la logique. Et puis parfois… je dis bien parfois, parce que je trouve ça bien trop rare, parfois seulement, un grand s'arrête et regarde la buée sur la vitre où le squelette dessiné d'un cœur s'y attarde. Mais c'est aussi l'odeur du sucre multicolore humé dans une fête foraine. C'est ces tous petits instants perdus qu'ils retrouvent une toute petite seconde. Ils se surpassent. Ils se surpassent avec toute la violence et la foi que cela implique, et ils surpassent ainsi leur monde. Au sport, on appelle cela « passer sur son second souffle ». Moi je dirais que ça s'appelle rendre les coups. Voilà… Ils viennent d'entrer dans un royaume magique ! C'est ce en quoi je crois.

J'ai beau être fragile, j'ai une immense force intérieure, une patience sans limite, et un amour qui n'est pas prêt de mourir. Et je sais, je sais, je sais que là, cette chose, cette source obscure et sans fond, cette aube en manteau noir qui n'a pas de nom, voudrait que j'arrête de t'aimer Vie, mais ça m'est impossible. On me demande la seule chose qui m'est impossible !

Oui, c'est vrai ! C'est vrai que cette histoire ne colle pas au standard du conte de fée. Je ne suis qu'une petite fille perdue, sensible et intimidée par cette saloperie de maladie, et je ne suis pas une Princesse, je suis une guerrière ! Et mon Prince Charmant c'est toi, jolie Vie. C'est toi, toi et toi seule. Pas cette Leucémie. Et tu sais, à nous deux on est loin d'être ordinaire !

Je t'aime tellement que ça me donne des crampes partout, tu entends ? Tous les tuyaux, tous les tubes et toutes les machines qui me veinent jusqu'à toi, c'est rien comparé à ce que je peux te donner.

Et peut être que tu perds beaucoup trop de choses et beaucoup trop gens, trop facilement, et c'est peut être même pas grave étant donné qu'on est des milliards et des milliards d'âmes perdues dans cette immensité qu'est l'amour, mais tu vois, moi si je perds… si je te perds Vie je suis perdue. Je suis perdue.

On a le droit de conduire à  dix-huit ans, parfois même seize, ce même âge où on peut choisir de quitter l'école, ou bien de travailler, ou s'engager dans l'armée et côtoyer des guerres. Quand j'y pense, je manque d'air ! Parce que… je n'ai que deux ans. Seulement deux ans, et je n'ai même pas encore appris à être propre, je n'ai même pas encore eu la chance d'aller à l'école. Ça me rend complètement folle ! On parle d'âges en ce qui concerne ses droits et de ses devoirs, mais la vérité c'est qu'il n'existe pas d'âge pour connaître l'amour. L'existence nous est exposée et inculquée avec des marqueurs de temps qui nous aident à rationaliser son effet sur nous. Mais ça n'a aucun sens ! Essayer d'expliquer à des parents pourquoi leur enfant de deux ans n'aurait peut être pas le droit de vivre tout ça ? Il n'y a pas d'âge pour désirer vivre ! Alors voilà, oublions les rationalisations et les logicités ! Moi tout ce que je te demande, du plus profond de mon être et de mon âme, c'est un peu de sérenditpité

Shakespeare à dit : L'amour n'est pas l'amour s'il fane lorsqu'il se trouve que son objet s'éloigne. Quand la vie devient dure, quand les choses changent, le véritable amour reste inchangé.

Alors voilà, je t'aime… Vie. Je t'aime. Je t'aime malgré tout ce qui peut m'éloigner de toi. Je t'aime et je t'aimerai toujours. Et ça… j'en ai le droit !

Ne m'oublie pas.


Bien à toi.

Lana

 

 

 

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