L'Europe et les pêches marocaines

Robert Drabowicz

« Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà » écrivait Pascal. Le moins que l’on puisse dire est que dans l’état actuel des choses, ce ne sont pas nos producteurs fruitiers qui pourraient contester cela. Bien au contraire, puisqu’on les a vus récemment manifester leur colère et leur réprobation au passage des camions venant de l’autre côté des Pyrénées, justement. Donc de l’Espagne, donc de… l’espace économique européen. Que s’est-il passé pour attiser tant de hargne et de grogne ?

Très simple et très connu, parce que déjà joué et rejoué maintes fois. Du reste, sans que cela ait changé quoi que ce soit.

Des fruits passent « l’ex » frontière en provenance d’Espagne. Ils sont destinés à être vendus sur le marché français. Les pêches sont plus particulièrement dans le collimateur. Rien d’extraordinaire à cela, si ce n’est que « leurs » fruits sont loin d’être aux mêmes normes que celles imposées aux producteurs fruitiers français. D’autre part, leur coût de production est nettement inférieur au nôtre. Conséquence : prix concurrentiels imbattables. Onde de choc : mévente au détriment de la production française. Ce qui est en cause ? Au principal, l’Europe et le laxisme espagnol, car bien incapables de faire respecter le cahier des charges instauré par la législation européenne.

Subsidiairement, les producteurs espagnols, car ils ne respectent pas la réglementation européenne. Autre cause que l’incompétence de la presse française n’a pas su rappeler et dénoncer : les Marocains. Ils sont à l’origine de la plus grande partie économique « souterraine ». Les Marocains arrivent en masse en Espagne afin de récolter, pour des salaires de misère, la production fruitière. Facile donc, dans ce pays permissif, pourtant encadré par une législation européenne commune, de produire du fruit à bas coût. Est-il seulement utile de se poser la question de savoir s’ils sont déclarés ? Et sait-on que la plupart dorment dans des cabanes, sans aucun support d’hygiène ? Remerciements, au passage, à la presse française qui n’ignore rien de ce problème, mais qui semble s’en foutre royalement.

Force est de constater que nous sommes loin de la contrainte française ! Et, par conséquent, de ses coûts. Malheureux producteurs français… obligés de devoir subir une Europe à deux vitesses !

Quand se décidera-t-on d’arrêter d’étrangler nos producteurs en mettant fin définitivement à cette pratique concurrentielle déloyale ?

Quand est-ce que nos journalistes sauront faire leur travail correctement dans ce genre d’affaires ?

C’est sûr : une affaire DSK est bien plus croustillante et rapporte beaucoup plus d’argent. Là, on fouille, on déterre, on peaufine, on tripatouille, on a droit au moindre détail. Même celui dont tout le monde se fiche comme de l’an 40.

Vive l’Europe ?! Celle qui devait nous rendre plus heureux…

Que les eurosceptiques et prédicateurs de l’apocalypse européenne patientent encore un peu : l’Europe commence à brûler ses dernières cartouches ; elle est au bord de la banqueroute. Bientôt tous « ses pauvres » (Irlande, Portugal, Espagne, Italie et autres) vont l’entraîner dans leurs naufrages. La Grèce n’est que la (première) partie « bien » visible de l’iceberg. Elle ne remboursera jamais sa dette, car elle n’en a pas les moyens. Elle demandera davantage d’argent, toujours plus d’argent. Un trou sans fond, en quelque sorte… Et nous, les petits Français ? Eh bien, nous allons payer. Indirectement, certes, mais comme la planche à billets n’existe pas, des coupes sombres ne manqueront pas d’être opérées sur les différents budgets de la Nation.

Diable ! Il faudra bien compenser. Mais jusqu’à quand et jusqu’à quel point ?

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