Manger comme jamais

weshaggy

Qui n'a jamais eu un petit creux ?

Je m'en veux. Je n'aurais pas du. J'ai franchi le cap, ça y est. Je ne peux plus me voiler la face.

Ma balance affiche le chiffre fatidique des 90 kilos. Ça fait des mois que je me mens à moi même. Des années même.

Je grossis petit à petit depuis plus de dix ans, sans arriver à me stopper. Je me disais il y a quelques années : « tant que je ne dépasse pas les 60 kilos, ça va ». Puis les 60 kilos sont passés, et finalement je me disais « tant que je ne dépasse pas les 65 kilos, ça va ». Puis les 65 kilos sont passés et ainsi de suite jusqu'à aujourd'hui. 90. Quatre-vingt dix. Kilos.

Et puis comme je m'en veux, je me réfugie dans la nourriture. Et puis, comme je mange, je mange n'importe quoi bien sûr. J'engloutis le premier aliment qui me vient sous le nez, et généralement ce n'est pas de la salade ou une pomme, saine pour le corps et l'esprit ! Non, non, non ! Un paquet de chips, un beignet, un kitkat, qu'importe mais étrangement je ne me jette jamais sur quelque chose de léger et diététique. Foutu sucre et foutu addiction. Foutu sel aussi, et puis foutu gras. Vous connaissez le slogan « Ne mangez pas trop gras, trop sucré, trop salé ! » qui passe sur toutes les chaînes où les légumes sont mis en scènes, et dont la voix-off sacrément débile et enfantine me trotte dans la tête pendant au moins une bonne heure après l'avoir entendu. Reprenons le fil de mon histoire. Et puis, comme je mange, je m'en veux. Sacré cercle vicieux, fou moi donc la paix !

C'est décidé, cette fois, psychologiquement, le QUATRE-VINGT DIX ne passe pas. Il faut absolument que j'y remédie. Je ne me reconnais plus dans le miroir. Je ne sais pas pourquoi tant de laisser aller, la facilité sûrement. La paresse est mère de sûreté, l'effort n'est que mal récompensé. Non, ne pas commencer à raisonner de cette manière.

Je commence le footing, et cela, dès ce soir.

Je tiens parole.

Je cours. Toutes les semaines. Puis tous les deux jours.

Je me fais des amis à force de croiser les mêmes coureurs chaque fois, je les considère comme mes compagnons de route pour mon « rétablissement corporel ».

Je ne peux maintenant plus m'en passer.


Trois mois se sont écoulés.

Je n'ai rien perdu de mon poids. Pire, j'en ai pris. Oui je sais, le muscle est plus lourd que la graisse. Patati patata.

Oui, certes, mais même mon corps n'a pas changé le moins du monde.

Mes compagnons de route me motivent, m'encouragent, me disent que c'est plus lent chez certain, que le mécanisme se met en route petit à petit, qu'il faut du temps.

Du temps.


Un an s'est écoulé.

Du temps, j'en ai pris. J'en ai usé, abusé, j'ai couru comme jamais j'aurai cru pouvoir le faire.

Je ne cris pourtant toujours pas victoire.

Je frôle les 100 kilos à présent.

C'est à ne plus rien y comprendre.

Après mes débuts et le manque des résultats, j'ai réduit mes portions alimentaires et rééquilibrée mon alimentation, mais toujours rien.


Deux ans.

Et 110 kilos. C'est incroyable. Je continue de prendre dix kilos par an, mes efforts sont...je ne sais plus quoi...je ne comprends pas...je continue pourtant toujours ...je cours...Deux fois par jour...ça devient totalement...Fou, folle, je deviens folle. J'ai du me tromper...mal appréhender...perdue.


Trois ans.

Vous vous doutez de ce que je vais dire ! J'ai repris oui ! Et plus encore que d'habitude ! Mais c'est une croissance exponentielle ! Je suis l'exception qui confirme la règle ! Peuchère ! On va finir par me mettre dans un zoo, avec une roue comme pour les hamsters pour me faire courir non stop et les gens viendront saluer ma prise de poids tous les jours ! J'imagine déjà les gros titres pour défrayer la chronique ! « Courir pour grossir, venez la découvrir ! ». Je perds les pédales ! Et j'en ris aujourd'hui ! Ah oui j'en ris ! 130 croyez le ou non ! 130 !


Trois ans et demi.

J'ai tout arrêter, régime, sport. Tout. A quoi bon ? Cela ne sers vraisemblablement à rien. Pourtant j'ai pris goût à ce mode de vie. Voila pourquoi j'ai eu tant de mal a tout arrêter, espérant toujours que mes efforts payent. Je perdais pieds, il faut que je change de tactique.


Quatre ans.

Je crois rêver.

Je mange, je mange, je mange ! Mais quel plaisir de manger autant ! Et je perds du poids ! Je n'ai jamais autant manger de ma vie, et je n'ai jamais autant perdu de ma vie. Quarante kilos en moins. En mangeant, sans sport, sans effort. Mon corps est étrange ! Jalousez-moi de perdre si vite sans effort !


Quatre ans et demi.

J'ai retrouvé le poids de mes quinze ans. 50 kilos.

Je me trouve maintenant trop mince, avec des bouts de peau qui pendent un peu partout. Perdre 80 kilos en un an, en mangeant à volonté, ce n'est pas rien.

Je crois que mon corps se moque vraiment de moi.

Il faut que je grossisse. Je ne veux pas devenir anorexique.

Je vais aller courir ce soir...


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