Moi ou désillusion

epice

Les jours passent et les fréquences de nos rencontres s'amoindrissent.

Nos histoires entrelacées se démêlent peu à peu. Mais on se dit qu'on va rattraper le temps perdu ; chacun de notre côté. Qu'on va renouer avec notre vie quasi-commune d'antan. On le pense, mais on continue « notre » histoire, chacun de son côté.

Les jours passent, et notre relation s'étiole.

Quand on commence à se rendre à l'évidence – « le temps perdu ne se rattrape jamais » – le temps nous réunit à nouveau. Nous redonne une seconde chance. Celle de formuler de nouveaux souhaits ensemble ; de prendre des résolutions ensemble ; de bâtir des projets ensemble.

Pour ce qui est de les réaliser, le temps est traître, et nous joue à nouveau des tours. Mais cette fois, un fossé s'est creusé. Fossé relativement franchissable, si nous restons unies par la pensée. « Cette distance nous sépare, mais n'aura jamais raison de nous, si nous nous restons fidèles. » On s'accroche à cette conviction, chacun de son côté du fossé.

Les jours passent…

Nos rencontres passées deviennent horriblement nostalgiques. Les jours où nous aurions pu nous retrouver quand il était encore temps, nous manquent cruellement. Mais on s'est promis… d'être fidèles. Et on s'accroche toujours à cette promesse. On s'y attache tellement fort que l'on refuse de croire que tout ne sera plus comme avant. On ferme les yeux. Même lorsque le temps nous met face à cette réalité [cruelle]. Même lorsqu'on découvre que la promesse n'a guère été tenue par l'autre. Même lorsque la réalité et ses circonstances nous forcent à nous rendre à l'évidence.

On veut toujours y croire, se nourrissant de cet espoir illusoire ; se repaissant de cette langueur malsaine. On veut y croire, perdus entre illusion et désillusion.

Un, a trahi.

On, n'est plus.

Tout a été balayé. Effacés, les souhaits, les résolutions, les projets, les illusions.

Tout, ne sera plus comme avant.

On, n'a jamais existé.

Nous ? Peut-être. Dans un souvenir lointain. Dans un de ces moments nostalgiques… C'est si vague à présent. Au final, Moi, a toujours dominé.

Promets-moi.

Sois-moi fidèle.

Regarde-moi.

Tu es à moi.

Tu m'as trahi…

Moi ; moi.

L'évidence fait souvent comprendre que "Tu", ne comptes pas. On, ne vit que pour Moi. On, n'est là que pour Moi. La seule personne que l'on aime le plus est Moi. Alors on ne s'entoure que des personnes qui satisfont le mieux nos désirs personnels. Dans ce cas, se faire trahir par autrui ne revient-il pas à réaliser qu'Autrui ne satisfait plus mes désirs ? Ne correspond plus au profil que Moi, lui avais donné ; attribué ? N'agit plus comme Moi aurais voulu, aimé qu'il agisse ?

Pourquoi ?

On réalise que pendant tout ce temps passé « ensemble », On, était seul. Sans l'Autre ; en pleine illusion. Et là, On, a peur.

Peur que cela continue. Peur que cela ait été la seule chose de vraie, dans nos illusions.

Et on se surprend à souhaiter de tout son cœur que tout cela n'ait été qu'un cauchemar, un mauvais rêve matinal, une illusion que Moi à crée, dans son infini désir égoïste d'être aimé…

De se faire aimer.

Moi ; moi.

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