Mon Amour psychotique

elioh

Journal de N.J. Page 1

 J'ai toujours été solitaire. La seule chose en quoi je croyais, était le dicton "mieux vaut être seul que mal accompagné". Depuis, ma meilleure amie était la solitude. Elle demeurait la seule personne en qui j'avais confiance, la seule qui savait me protéger.
Évidemment il y avait mes parents, mais la vie était tellement différente une fois en dehors du foyer familial.

 J'ai appris au fil des jours à me fondre dans le décor. Je n'ai jamais eu besoin de ces stupides personnes, aussi appelées collégiens. De toute façon ils m'ignoraient royalement. Excepté lorsque j'étais victime de leur moquerie. Juste quelques fois par semaines, rien de grave.

 Un jour, un garçon vint à ma rencontre. Je ne l'avais jamais aperçu auparavant, sûrement était-il un élève discret. Il possédait les cheveux d'un blond tellement clair qu'au premier coup d'œil je pensais qu'ils étaient blancs. Son regard doré pétillait, comme les chocolats au sucre surprise. Son visage entier rayonnait. Je me demandais ce qu'il me voulait. C'était le premier qui ne semblait pas vouloir m'insulter. Il planta ses prunelles jaunes dans les miennes, me demandant silencieusement de ne pas le repousser. Pour être tout à fait honnête, je n'osais pas le chasser. Ce dernier me proposa un marché. Si je lui faisais des cours particuliers en maths et en français, il me garantirait ma protection tel un ange gardien. J'éclatai de rire. Sérieusement, pour qui me prenait-il ? Un ange gardien ! Mais il me faisait tellement pitié avec son regard de chien battu, que j'ai accepté sans broncher. Peut-être même qu'il allait s'avérer intéressant.

Les jours défilaient. J'étais prise au piège, sous l'emprise de son rire bizarre, de sa simplicité touchante et de sa gentillesse de labrador. Malgré moi, on se rapprochait de jours en jours. On devenait inséparables.

Peu de temps plus tard, nous commencions à sortir ensemble. Je savais que ça ne signifiait rien. Seulement en dépit de mon indifférence mes sentiments m'avaient devancé. Après tout, que vient faire le mot "rien" là de-dans ? Toutes les relations pour "rien" finissaient comme ça : l'un finissait par réellement tomber amoureux de l'autre. Et ça, c'était problématique.

Ses notes ainsi que notre popularité augmentaient considérablement. Je ne me souciais guère de cela, tout ce qui comptait pour moi était de rester auprès de lui. Nous étions devenus des modèles, le couple parfait qui semblait durer et se renforcer au fil des mois.

Mais les vacances arrivèrent plus vite que prévu. Durant celle-ci, nous restions en contact via réseaux sociaux. Entre deux rendez-vous médicaux, je lisais les messages qu'il me laissait, à m'en faire sourire stupidement.

Lors de la rentrée, le début de la fin commença.

Il se comportait froidement avec moi. Je ne compris pas, jusqu'à ce que j'entende crier aux quatre coins du collège qu'il cherchait une petite amie sérieuse. M-Mon cœur éclata en vingtaine de gros morceaux. Comme une bouteille de bière que papa laissait parfois tomber. Je me sentis trahie par ma propre stupidité. Pourquoi y ai-je tellement cru ? ça fait mal mine de rien. Il n'y était pour rien, pourtant je lui en voulais. ça m'étouffe ! Les jours suivants étaient mornes. Peut-être, n'ai-je pas fait assez d'effort pour le garder ? Cela me faisait tellement mal quand je le voyais entouré de filles.

<< J'aime tellement les filles. Tu es si belle. >> m'a-t-il avoué une fois.

<< Bien-sûr, j'arrive. Je te suivrais jusqu'au bout du monde s'il le fallait. >>

<< Faisons un duel.

- Non, j'ai trop peur de perdre.

- C'est comme si nous dansions, vois-tu ? Comme une danse endiablée. >>

<< Tu dis que tu es enrhumée ? C'est seulement pour ça que je ne peux pas t'embrasser ? De toi, j'attraperais même un cancer incurable. >>

<< Veux-tu m'épouser ? Je t'offre cette bague en pâquerettes. Tu ne peux pas refuser, sinon je risque de te harceler jusqu'à ce que tu acceptes. >>

Puis la solitude me rejoignit. Ainsi que les moqueries, de plus en plus insupportables. Et lui, disparaissait petit à petit.

<< Très bien Ninon. Comme te sens-tu aujourd'hui ?

- Je ne le vois plus... j'ai envie de... Nero me manque... Je veux...

- Ne cède pas, continue à écrire et à dessiner. Extérioriser tes sentiments te permettra de passer plus vite à autre chose. Madame Jardin, votre fille prend-elle assidûment les médicaments prescrits ?

- Toujours, docteur.

- Je vais lui en donner de nouveaux afin que ce sentiment de "manque" s'étouffe. Ninon. Il ne faut pas qu'"il" revienne. Tu m'entends ? Madame Jardin donnez un mouchoir à votre fille. Ninon. L'école se passe bien ? Bon. Continue de bien travailler. Donc je disais, des antipsychotiques Zyprexa... les Leponex sont pas mal non plus...

- Chhh ma chérie... arrête de pleurer maintenant. Nero n'est personne, je sais que tu en as conscience. Il faut que tu arrêtes de te créer des gens comme ça. Ton père et moi te soutenons... le docteur aussi te soutient. Aller aller, nous n'avons jamais pensé que tu étais folle. >>

Signaler ce texte