Nouvelle vie ? Nouvel enfer ?
Johanne L
Que m'est-il arrivé ? J'essaye d'ouvrir les yeux, de bouger un orteil, un doigt, un muscle, rien. J'ai l'impression de dormir, pourtant je suis réveillé vu que mon cerveau cogite a toute vitesse, quel jour sommes-nous ? Quelle heure est-il ? Je ne sais pas. Je n'entend que très faiblement les bruits autour de moi.
Un cliquetis métallique à gauche, et un faible bip à droite. Etrange. Je dois rêver, oui c'est ça ! Je suis entrain de rêver ! Mais, une seconde, est-ce que l'on peut se rendre compte que l'on rêve, lorsque justement on rêve ?
Il faut que j'arrête de me poser de telles questions, cela me fatigue, il serait préférable que je ferme, enfin, pour reprendre l'expression car mes yeux sont techniquement déjà clos, les yeux.. Qu'est-ce ?! Je ressens un long fourmillement le long de mes membres, mais je ne sais toujours rien bouger, mes paupières n'exerçent qu'une légère révolte inutile. Combien de temps vais-je encore rester dans cet état ? Nouveau moment de conscience, quelqu'un pleure mais je ne la reconnais pas. Puis soudain ! Miracle ! Mes yeux ! D'un coup ils se sont ouverts, comme si tout ce temps dans l'inconnu, n'avait été qu'une nuit ordinaire. Je suis aveuglé par les néons, ma vision est floue, j'ai des fourmis dans tout les membres.
Une femme accoure me voyant les yeux grands ouverts, elle semble apeurée, me regarde, ne dit pas un mot et repart aussi vite. Quelques minutes ou heures plus tard, je ne sais pas, j'entend une voix masculine m'appeler, j'ouvre lentement les yeux, et aperçois un inconnu, il m'explique qu'il est médecin et qu'il est heureux de mon retour. De mon retour ? Il semblerait que je sois tomber dans le coma suite à un accident mystérieux, je n'en ai aucun souvenir. Il me dit aussi qu'ils ont du pratiquer pas moins de 13 opérations afin que je sois comme avant, le seul problème, je n'ai plus aucun souvenir, mis à part mon nom. Je sens que l'on fait rouler mon lit, mais je suis trop faible pour ouvrir les yeux.. sensation de froid, je dois être hors de l'hôpital mais pourquoi ? On me fais une piqûre et je m'endors..
Il me semble que je reviens à moi, j'ouvre doucement les yeux, agite mes doigts, tourne ma tête, replie mes jambes, il me semble que tout est rentré dans l'ordre. Une lampe est allumé à côté de mon lit, je suis.. je suis.. Il me semble que je suis chez moi, le toucher de ma table de nuit, de l'encadrement de mon lit ravive ma mémoire...
MAIS ! Je suis chez moi ! Dans mon appartement ! Comment est-ce possible ?! J'essaye de sortir du lit, aucun problème, je marche presque normalement, je suis juste raide d'être resté couché aussi longtemps. Tout est dans son état initial, parfait. Une seule chose nouvelle, un livre, posé sur ma table basse. Je n'ai pas envie de faire de nouvelle découverte pour l'instant j'y reviendrai plus tard, je me dirige plutôt vers la cuisine histoire de boire un verre d'eau, et je me rend compte à ce moment là à quel point je suis assoiffé et affamé. Je vais vite me faire quelque chose à manger et puis je retournerai me coucher. Je commençais à couper du pain quand soudain, mes mains raidies ont fait déraper la lame, qui m'a ouvert le pouce. Je m'attend à voir couler du sang, mais rien. Etrange. La blessure doit être superficielle, bien qu'elle m'ait semblé profonde. Je vais plutôt aller me recoucher. J'ouvre les yeux en sentant la caresse du soleil sur mon visage. Me relève un peu dans mon lit et contemple ma chambre, quand mon regard dévie sur une tâche bleue qui a taché les draps. Qu'est-ce que ça peut bien être ? Et là, je vois, l'entaille de ma main, également bleue, pris de panique je cours dans la salle de bain et la nettoie. Affolé, je cours au salon. Prend le téléphone qui tombe à plusieurs reprises, enfin, je compose le numéro de l'hôpital, mes mots sont saccadés, tremblants, incertains.
Le médecin finit par me dire de lire le manuel qu'il a déposé sur la table basse. Je raccroche. Long moment de silence pesant autour de moi, j'ai l'impression que le temps s'est arrêté, les oiseaux se taisent, les taxis ne klaxonnent plus, les moteurs sont coupés. Je n'entend que mon souffle. Je tente une main tremblante vers ce fameux manuel. Elle tremble. Le livre tombe.
Plusieurs fois. Enfin je le saisis, ouvre péniblement la couverture, une lettre tombe au sol, je la lirai plus tard.
"Chapitre 1: La découverte. Cher 00123593200145, vous avez du découvrir votre nouvelle particularité, voici quelques explications qui pourront vous être utiles dans le futur qui devrait être assez long. Je suis le docteur Verley, c'est moi qui ait pratiqué les opérations sur votre organisme. Vous avez été sélectionné, après un accident grave, pour tester la médecine du futur dont je suis le créateur. Pour ne pas vous embrouiller avec mon jargon médical, je vais faire simple et sans circonlocutions, votre coeur, votre sang, vos organes, votre métabolisme, votre organisme, bref.. Tout ce qui tient en vie un individu normal a été remplacé par un gel bleu qui remplit toute les fonctions vitales. Il doit être remplacé tout les 25 ans, et vous protège des maladies et de tout les fléaux que connait notre humanité à l'heure actuelle. Vous êtes en quelque sorte, presque immortel. Cela est dur à assimiler c'est pourquoi ce guide va vous aider tout les jours."
J'en reste bouche bée. Muet. Immobile. Figé. Embrouillé. En colère. Rabaissé. Soumis. Triste. Heureux. Perdu. Je suis traversé par une foulée de sentiments contradictoires. À ce moment précis, il y a 6 470 818 671 personnes dans le monde.Certains prennent peur. Certains rentrent chez eux. Certains racontent des mensonges pour s'en sortir. D'autres font simplement face à la vérité. Certains sont des êtres maléfiques en guerre avec le bien, et certains sont bons et luttent contre le mal. Six milliards de personnes dans le monde, six milliards d'âmes.
La mienne est partie. Je joue en enfer. Seul. Ou pas. Vu mon numéro de matricule, je ne dois pas être le seul à servir de cobaye. Je feuillette le "manuel", chaque chapitre est censé m'aider a comprendre comme doit aller ma vie, que manger, boire, comment dormir, courir, respirer, me comporter, chanter, danser, pleurer, rêver, tomber. Chaque geste est pensé, préparé, rien n'est spontané, sauf mes pensées et encore je n'en suis pas sur. Je ne dors plus depuis quelques jours..
J'essaye de comprendre ce qu'il va m'arriver, et de décider comment choisir mon destin. Je reste allongé pendant des heures à m'inventer des scènes de ma vie future je l'espère mais aussi de ce qui pourrait m'arriver si je m'abandonne complètement à mon nouveau “statut”, je ne trouve pas d'autre mot pour décrire ce que je suis devenu. Je ne ressent plus rien, ni faim, ni soif, ni émotion quelconque. Je suis un corps immortel sans âme (du moins c'est mon avis) conditionné a n'éprouver aucune contrainte de la vie humaine.
C'est à la fois désavantageux et à la fois agréable, je n'avais jamais ressenti autant de joie à courir sous la pluie, pouvoir sentir sa fraîcheur, sans risquer de tomber malade et surtout je n'avais pas froid, mon corps l'étant déjà. J'avais aussi les orages en sainte horreur, (quelle ironie d'utiliser le mot “sainte” alors que mon âme appartient au diable), maintenant je resterai des heures assis sur le trottoir a regarder les éclairs déchirer le ciel noir.Comment ai-je pu dénigrer autant de beauté au par avant ? Je ne sais pas, mais mon immortalité si je peux l'appeler ainsi m'aura au moins apporté quelque chose de bon. C'est déjà cela.
J'ai pris une grande décision ce matin, je n'en peux plus d'étouffer dans cet appartement, a ruminer mes pensées sans cesse. J'ai décidé de commencer mes recherches, je m'explique, j'ai l'intention de trouver les autres cobayes, les autres moi en quelque sorte, histoire d'en savoir plus et pourquoi pas de sauver mon âme, nos âmes. La seule question que je me pose est: est-ce que j'aurais l'occasion d'échapper à l'emprise de mes "géniteurs" en quelque sorte ? Je ne trouve pas de réponse. Je vais donc tenter le tout pour le tout, adviendra ce qu'il adviendra, je dois savoir. De quoi pourrais-je avoir besoin, je ne mange plus, ne bois plus, ne ressent plus le froid, je suppose que je n'ai donc pas grand-chose à emporter. Par où commencer.. L'hôpital, c'est le seul endroit où je pourrais trouver des informations sur mes semblables.
Maintenant reste à ne pas me faire remarquer, mais cela va être facile, j'ai découvert qu'une force et une vitesse incroyable pouvaient m'animer en cas de besoin ou d'envie, je devrais donc pouvoir me déplacer en vitesse sans me faire remarquer. J'agirais de nuit.. Il ne me reste plus qu'à attendre.. Quatre heures du matin, je vais commencer à me préparer. Je tremble, étonnant n'est-ce pas, je vais jouer la prudence et tout de même me déguiser afin de prévoir toutes surprises.
Je ne me suis jamais senti aussi bien ! C'est exaltant ! L'ivresse de la vitesse, cela prend tout son sens maintenant. Le vent siffle à mes oreilles, me fouette le visage, m'enivre comme l'alcool, et me saôule de bruit. Arrivé devant l'hôpital, je doute, je recule. Mais je dois aller jusqu'au bout, ma vie en dépend, du moins ma vie mentale. Je m'avance, pousse la porte, entre, il fait calme, l'infirmière de service dors dans la salle qui lui est réservée, je peux voir sa tête pendre dans le vide par l'entrebaillement de la porte, elle a la bouche ouverte et une bouteille à la main, elle doit sûrement boire pour oublier les horreurs que l'on pratique ici, je continue d'avancer jusqu'au bureau et m'arrête. Il y a un imprévu. Il y a un coffre avec "Dossiers Confidentiels" écrit dessus, les informations que je cherche doivent certainement se trouver dans ses dossiers mais comme ouvrir le coffre ? Je me laisse glisser lentement sur le sol et me prend la tête dans les mains, foutu, c'est foutu ! Dans un accès de rage je donne un coup de pied dans le coffre. L'empreinte de ma chaussure y reste imprimée, surpris je retente l'expérience avec mon poing, ce qui a pour effet de déformer encore un peu plus la paroi du coffre qui commence à devenir bancale. J'attrape un coin et prenant appui contre le bureau, je tire, la porte commence à franchement se laisser aller, encore un petit effort. Dans un grand bruit de fraille, la porte cède et me donne le champs libre, l'accès aux dossiers. Ma mission pouvait reprendre son cours. Coup d'oeil à gauche – rien. Coup d'oeil à droite – rien. C'est le moment, il est devenu impossible de reculer maintenant. J'ouvre le tiroir dans un grincement, qui me semble assourdissant, pourtant personne ne vient voir. Il n'y a eu ni alarme, ni problème, c'était presque facile, ou alors justement trop facile.
Je n'ai jamais vu un tiroir si long, si plein, il va me falloir quelque chose pour transporter les dossiers. Un chariot d'infirmière devrait faire l'affaire pour un moment du moins. Je commence à prendre les papiers tant espérés, quand j'entend un mouvement, comme un bruissement d'air et d'étoffe. Je m'immobilise. Retient mon souffle. Rien ne se passe, je dois être en train de devenir paranoïaque. Les dossiers sont sur le chariot, je les charge en vitesse dans mon sac et part comme un voleur, car après tout c'est ce que je suis en quelque sorte non ? Une fois rentré, je m'affale dans le fauteuil après avoir délaissé mon sac dans l'entrée et étonnamment je m'endors. Je suis réveillé par mon voisin du dessus, apparemment décidé à fêter son insomnie en dansant dans son salon. Je vais me mettre à lire mon butin, à dans quelques heures. ...
Je ne comprend toujours pas ce qui les motive à nous choisir, nous. Mais il ne faut pas que je me concentre sur des questions qui resteront pour le moment sans réponse, ce n'est pas ça qui me fera avancer. Ce que j'ai lu m'a fait prendre conscience de l'ampleur de notre situation, je peux dire avec certitude maintenant "notre", car si ce n'est pas facile pour moi, ça ne doit l'être pour aucun de nous. J'ai toutes les informations nécessaires afin de trouver ces personnes et d'en apprendre plus sur eux. Une seule contrainte je dois me déplacer comme tout à chacun car même si je suis à présent immortel grâce à mon sang bleu et gélatineux, courir et utiliser mes forces surhumaines, il faut bien l'avouer, me fatigue considérablement, car malgré tout et d'après ce que j'ai lu, leur méthode n'est pas encore au point et quand je lis les comptes rendus fait après les premières opérations, je suis en bon état et surtout je ne souffre pas, ce qui est un grand avancement d'après leur travaux. Mais une chose m'inquiète, il parle d'une boisson à trouver, il ne faut pas en boire souvent non, ce n'est pas le problème, une fois par an suffit apparemment, le problème c'est que c'est à nous de la trouver, voir si l'on est digne de notre nouveau statut, ils pensent vraiment nous rendre service ou quoi ?
Et cette boisson n'est pas du sang, non, ce sera trop simple à trouver, trop banal, vu le nombre d'histoire de vampire à notre époque. C'est de l'essence de fleur de montagne, pas n'importe laquelle, l'edelweiss. Mais ce serait toujours trop simple, elle doit être cueillie un soir de pleine lune avant d'être soumise à l'enfleurage afin d'en extraire l'huile qui elle même devra reposer dans l'alcool pendant 48 jours et seulement être consommée, pour nous garantir la continuation de notre, je ne trouve pas le mot adéquate, mobilité ? Presque. Survie ? Le mot est trop important. Pour faire simple, si on ne veut pas se changer en momie, et ce n'est pas une hyperbole.
Tout ça pour dire que je vais devoir voyager comme tout le monde, en train, en bus, en métro et peut-être en avion qui sait. Je vais d'abord classer les dossiers par ordre d'adresse. La première se trouve à Paris, je ne sais pas comment je vais les aborder.. Une rencontre anodine suivie d'une amitié et d'une confession ? Je risque de me faire jeter. Mais si j'y vais de but en blanc, là je risque de faire peur. Je verrai. Mais d'abord, je dois faire le voyage, partir en train me semble le plus facile et le plus pratique, ainsi je ne me ferai pas remarquer. L'humanité me manque, entendre les gens rire, se chamailler, me rend triste, car je suis seul et aucun de mes gestes n'est naturel, j'ai l'impression d'être une marionnette grandeur nature. Dormir ? Ce n'est pas la peine d'y penser. Le voyage a été long, mais je suis arrivé à Paris.
J'ai demandé mon chemin et suis enfin devant la maison de ma première semblable. Sonner ? Frapper à la porte ? Attendre ? Sonner et opter pour une discussion franche, honnête et directe. Premier coup de sonnet rien. Deuxième coup même résultat. Troisième coup bingo on m'ouvre. Elle est très belle, contrairement à ce que l'on pourrait penser, elle n'est ni élancée ni filiforme, elle est délicate, pas très grande, avec de belles formes, une longue chevelure rousse et des yeux bleus gris incroyables, et la description est faible, sa peau est laiteuse et semble douce comme une peau de bébé. Je suis stupéfait. Les "légendes" sont donc vraies.. L'on peut souvent lire dans les romans à quel point les personnages surnaturels sont d'une beauté remarquable, mais celle que j'ai face à moi est bien pire que ça, presque trop parfaite, irréelle. Mais je divague. Ce n'est pas en m'épanchant sur cette inconnue qui me semble pourtant si proche que je vais avancer. Son regard n'est pas en accord avec son langage corporel, ses yeux exprime de la surprise, pas celle de voir un inconnu sur le devant de sa porte, non celui de voir quelqu'un comme elle, tandis que son corps essaye de faire croire à une surprise d'un inconnu.
Mes pensées s'embrouillent un peu. Elle ouvre un peu plus grand la porte afin de me laisser passer, me dirige vers un salon, à son image, splendide. Me propose à boire, je refuse, on ne sait jamais. Je lui explique le pourquoi de ma venue, mon réveil incertain, les questions, le vol des dossiers, ma quête pour les trouver, et donc la raison pour laquelle j'ai débarqué devant sa maison. Elle m'observe et m'écoute en silence, un sourire plaqué et figé sur son visage d'ange dangereux, non vicieux. Tant de perfection ne peut que cacher quelque chose de plus sombre. Son dossier ne stipule pas son état, ce qui est étrange c'est qu'elle semble aussi bien que moi, même en étant la première, peut-être justement grâce à cela. Pourtant les suivants semblent avoir subit des dommages. J'ai finit de parler, elle m'observe, toujours en silence. Se lève enfin, sans un mot, se dirige vers la cuisine, je suppose. Revient quelques minutes plus tard, peut-être deux peut-être quinze, je ne sais pas j'ai perdu la notion du temps. C'est son large sourire qui m'intrigue. Elle finit par parler, me propose de m'héberger, j'accepte volontier car la fatigue commence à se faire sentir .
Grave erreur ! Je me réveille dans un hôpital, attaché au lit par de grosses chaînes et les bras remplit de baxters. La tête me tourne, ma vue est floue, mes mains engourdies, mes jambes.. Est-ce que je les aient toujours au moins ? Car je ne sens plus rien. J'ai l'impression d'être de retour au début de ma "nouvelle" vie. Ce mot, nouvelle, me semble bien trop positif pour qualifier la vie qu'on m'a offerte ? Non. Obligé à subir. J'ai pensé à me suicider, mais c'est bien connu, il est impossible de tuer un immortel, logique. Il me reste la solution de ne pas boire le remède, de me sentir paralysé petit à petit, le problème c'est que l'on vit toujours, mais enfermé dans son propre corps, existe-t-il pire prison ? Mon avis est que non, vous passez votre vie a ressasser les bons et surtout les mauvais moments de votre vie en vous disant j'aurai du apprendre à jouer du piano mais je n'aurai pas du faire tel ou telle chose. Vivre dans l'éternel regret.
Celui d'un baiser volé juste pour un instant alors qu'on le voulait éternel, ou un à plus longue durée que l'on aurait aimé juste passager. Les médicaments doivent me faire divaguer. Les médecins Frankensteins doivent surement vouloir que j'oublie mes sentiments humains et mes idées, mon âme en clair, mais alors pourquoi puis-je encore penser ce que je veux ? Je suis peut-être différent de cette femme immonde qui a du les prévenir de mon investigation et les aider à me contrôler. J'imagine déjà, "page 500 du manuel d'éducation du parfait petit immortel docile: aider a capturer, torturer, les traîtres voulant sauver leur reste d'humanités, si vous coopéré, vous aurez droit à notre reconnaissance éternelle." Foutaise ! Ils, du moins elle, préfère donc rester comme ça, à leur manger dans la main, en servant d'animal, de cobaye.
Je ne dois pas être le seul à vouloir m'accrocher à mes sentiments, mes pensées, ma vie, ma mort même. J'aurai du étudier les dossiers plus profondément, ceux qui avaient des choses à perdre et ceux qui en avaient à gagner. La rouquine devait y gagner pour rester la tranquille et me livrer sans scrupule. Première chose, m'échapper d'ici, avec du repos les chaînes doivent être facile à briser. Aucun bruit dans le couloir, l'infirmière est passé il y a bien deux heures, elle est l'étage au dessus je l'entend s'affairer autour du lit je suppose. Les médecins ne sont pas dans l'enceinte de l'hôpital la nuit, j'ai peu de temps mais ce n'est pas impossible. Si mon coeur pouvait encore battre, se serait à la chamade, deux minutes chronos et me voilà à courir dans la rue comme un drogué, les yeux rouges, la vision floue, le regard hagard, la démarche gauche.
Je dois rentrer chez moi, retrouver les dossiers avant eux et trouver ceux qui comme moi ont du mal a s'adapter. J'ai du mal à marcher, leurs médicaments sont puissants, mes idées ne sont plus très claires, mais je dois m'y accrocher pour ne pas sombrer.
Mon appartement n'est plus sur je dois fuir. Pour aller ou ? Peut importe ils ne doivent pas me trouver, j'embarque les dossiers et mon "manuel" peut-être me permettra-t-il de mieux prévoir les réactions de mes semblables et ainsi d'éviter de retourner ici ou, cette fois, mon séjour pourrait être fatal car en nous donnant la vie, ils doivent surement savoir nous la reprendre aussi. Le progrès scientifique c'est ce qui finira par tous nous tuer, car il faut toujours le faire progresser, toujours aller plus loin, toujours se mettre en avant avec des solutions d'avenir, ce n'est qu'une compétition comme une autre, c'est vrai qu'a certains moments, la science a été bénéfique pour l'humanité, mais c'est aussi une arme puissante. Le nombre d'expérience qui on ratés, car après tout le but de toutes ces avancées, c'est de trouver le remède miracle contre la mort, enfin avoir accès à l'immortalité. Depuis la nuit des temps, des scientifiques consacrent leurs vies à la recherche utopique de l'immortalité. Et me voilà, comme sujet d'expérience immortelle, seulement tout ne marche pas comme ils le voudrait, nous devenons des animaux sans sentiments, sans états d'âme, ils sacrifient des vies comme la mienne pour cette recherche, pour les autres bien entendu. Car tout le monde a peur de la mort et une solution à ce fléau changerait complètement le monde, le mettant en danger aussi. Mon sac à dos est prêt, j'ai les dossiers et le manuel, je n'ai plus qu'a partir. Ils n'ont pas de critères précis pour nous choisir apparemment. Des banquiers, des infirmiers, des femmes au foyer, des sans emplois, des artistes. Je vais me concentrer sur ceux qui y ont perdu dans l'histoire, les banquiers, les artistes. Mais j'ai un problème si comme moi en se réveillant, ils ne se souvenaient de rien ?
Mes souvenirs reviennent par flash petit à petit mais quand est-il pour eux ? J'avais décidé de prendre l'eurostar, de me rendre à Londres, c'est de la que viennent la majorité des immortels, et me voilà arrivé. J'ai pris une chambre d'hôtel afin de continuer à me pencher sur mes recherches. Quelques artistes vivent dans le coin. Mais je dois changer de technique, être plus prudent. D'abord s'intéressé à eux et seulement ensuite être franc, au risque de se faire jeter. J'ai décidé d'aller me promener du côté de chez eux, pour par hasard bien sur, tomber sur l'un d'eux. Ils doivent être reconnaissable à leur beauté comme la rouquine. Il fait gris et il menace de pleuvoir, mais que serait Londres sans cette grisaille perpétuelle ? Les artistes sont alignés près du Tower Bridge, mais deux attirent mon attention plus que les autres, pourquoi ?
Ils sont des yeux pénétrants, un les a verts striés de brun et l'autre bruns presque noir, on aurait presque peur d'y sombrer. Je m'approche nonchalant, jetant des regards détachés à leur travail, majestueux je dois dire, nos "pouvoirs" doivent les aidés ce qui n'est pas très fairplay pour les humains vivant de leur oeuvres. Mais je ne suis plus là pour m'apitoyer sur mon sort, car ça ne fera rien avancé. Le premier fume une cigarette discutant avec l'autre, et tout à coup se taisent en me voyant approcher. On-t-il reconnu ce que je suis ? Que je fais partie des leurs ? Il me semble bien. De but en blanc je leur dis que nous avons certainement des choses à nous dire, ils proposent d'aller prendre un café un peu plus loin. Je choisis finalement de leur dire directement, ça ne sert a rien de se cacher derrière des banalités. Je leur explique que pourquoi je suis la, que j'ai l'intention de m'opposer, que je ne veux pas devenir un mouton, je leur explique aussi ma mésaventure avec la rouquine et comment je suis finalement sorti de l'hôpital, j'explique aussi comment j'ai trouvé leurs dossiers et je leur demande enfin si ils veulent venir avec moi, m'aider, retrouver leurs sentiments. Ils semblent dans un premier temps réellement surpris, puis traversent une foule de sentiments, je les voit défiler dans leurs yeux. Et d'un coup sans prévenir ils éclatent de rire, se prennent dans les bras en s'écriant "ENFIN".
J'avais donc vu juste, ceux qui ont perdu leurs vies, leurs statuts sociaux, leurs amours, seront prêt à m'aider contrairement à ceux donc l'immortalité les a rendus importants. Nous finissons par décider de trouver les autres prêt à nous aider. Nous avons réussi à constituer un petit groupe d'un quinzaine de personnes ici à Londres, prêtes à nous aider, prêtes à se sauver. Nous ne savons pas encore comment agir, ni se défendre en cas de problème, nous pensons plutôt d'abord nous concentrer sur les dossiers, étudier nos comportements et ceux des autres, voir comment on pourrait neutraliser ceux qui se mettraient en travers de notre chemin mais surtout comment arrêter les délires scientifiques de nos géniteurs. Ce qui m'étonne le plus c'est que comparé à la rouquine, nous ne sommes pas aussi beaux, aussi irréelle qu'elle semblait l'être, cela aussi pourrait nous aider à identifier ceux qui ont des sentiments (nous) et ceux qui sont corps et âme dans l'immortalité. Notre seul point commun, les yeux. Ils sont vifs, spéciaux, uniques. Il faudrait que nous puissions renverser la situation. Être en position de force. Mais comment accuser leur projet ? Se reveler au monde? Non. On veut récupérer nos sentiments et notre vie pas être mis à mort. Les défier ? Ils savent comment nous contrôler. Le seul moyen serait de les surprendre, et de les soumettre pour qu'ils soient obligés de nous écouter, obligés de nous rendre notre liberté.
D'abord, trouver leur repères, ensuite savoir comment y entrer et les prendre par surprise et enfin redevenir nous. Les artistes s'occupent du premier point, les suivant comme s'ils cherchaient de l'inspiration en flânant dans les rues de la capitale anglaise. Les architectes règlent la partie numéro deux, trouvent les plans du bâtiment, les accès, les pièces cachés. Et le reste prépare un plan pour les surprendre et les maîtriser. Notre plan peut paraître simple mais en pratique ce sera légèrement plus compliqué je pense. Je vais superviser et aider à la phase trois.
*Quelques jours plus tard*. Les artistes ont repérés leur local, et les architectes ont presque finit d'étudier les plans. Quand au bataillon d'attaque si on peut dire, est fin prêt, nous attendrons qu'ils aient finit de travailler dans leur laboratoire, qu'ils soient remontés manger et enfin endormis dans le canapé après avoir trop bu. Deux heures trente du matin, il est temps de passé à l'action.
... Que..Que..Que.. Je suis plongé dans l'obscurité, dans le silence. Je n'ose pas bouger. Où sont les autres ? Comme moi, paralysé, le souffle coupé ? Mes sens sont en alerte. D'un coup un néon vif, accroché au plafond, s'éclaire. Je suis aveuglé par sa lumière, il me faut quelques minutes pour récupérer ma vue totalement. Aucun de mes membres ne répond, je suis attaché par des chaînes, ceinturé, ligoté. Mais seul. Les autres lits autour de moi sont vides qu'est-il arrivé aux autres ? Ont-ils déjà souffert ? Je ne l'avais pas remarquée mais la rouquine est là dans un coin sombre. Elle se dirige vers moi sans un regard, car ses yeux sont vitreux, elle doit être droguée. Et me plante une aiguille dans le bras puis une autre, je ne les sens pas, je les voit. Et d'un coup je perd connaissance.
Je me réveille dans le flou, dans une autre pièce il me semble. Je suis entouré de silhouettes, je ne distingue pas plus. Une lumière forte, rouge, mais seulement par intermitence. Et me rendors. C'est la troisième fois que je me réveille et cette fois j'entend des voix, empressées, intimidées, bizarres. J'entre ouvre les yeux pour ne pas me faire remarquer, et reconnais mes artistes, mes "amis", ils sont agenouillés devant une zone ombragée, je n'arrive pas à voir ce qu'elle dissimule. C'est donc ça, ils m'ont tous vendus, et cette fois je peux être sûr de ne pas en réchapper. Je dois être surveillé pendant qu'ils cherchent le meilleur moyen de me punir pour mon insubordination et pour avoir voulu entraîner les autres avec moi. Mais je n'ai pas peur.
Je préfère subir leur colère et qu'il me détruisent plutôt que de vivre comme eux. La nouvelle pièce mystère devient noire. Un bruissement de tissu se fait entendre puis rien pendant quelques secondes et enfin une respiration lente, suivie d'un rire froid, a en donner la chair de poule. La lumière revient enfin.. la chose penchée sur moi est indescriptible. Son visage est diforme, pleine de pustules virulentes, ses cheveux noirs sont moisis, mais ses yeux.. ses yeux sont d'un bleu océan placide et clair.
"bonjour 00123593200145, je pensais bien que nous aurions des problèmes avec toi. Tu as pas mal résisté aux opérations et nous aurions du te garder à l'oeil. Ce n'est pas comme ça que tu es censé nous remercier pour ton immortalité, ton éternelle jeunesse, ta force et ta vitesse. Je me vois donc dans l'obligation de sevir et crois moi bien ça ne m'enchante guère. Un homme aussi intelligent que toi aurait été un bon élément."
J'essaye de bouger, de parler pour comprendre. Mais il m'est impossible de bouger, de parler, je suis seul avec mes pensées. Il me regarde me débattre silencieusement avec mon corps. Un large sourire aux lèvres. Il se retourne. Il a une deuxième tête dans le dos ! Elle me regarde froidement, affichant le même sourire diabolique. On dirait un docteur Jekyll mister Hyde en un. Ensemble pour toujours à jamais. Les humains ne se doute pas du nombres de créatures qui les entourent, je ne m'en doutais pas non plus à l'époque, mais ici, il m'est impossible de ne pas y croire.
Tout les contes, les histoires, les mythes, seraient donc vrai ? Ce qui naît de l'imagination humaine ne serait donc que la face cachée du monde.. Ou pire serait-elle elle qui créérait tout ces monstres ? Doucement je retombe dans ma torpeur, ils n'en ont certainement pas finit avec moi, mais je suis lasse, je n'ai plus la force de me battre contre ce qu'ils m'injectent.
Adieu sentiments, adieu souvenirs, adieu monde humain imparfait mais adoré, adieu vie d'immortel que je hais je vais te retrouver, ils vont m'y obligés et je serai comme tout les autres, condamné à les servir sans réflechir en laissant toute ma vie derrière moi. Sans racune dirait l'autre. Et bien si. On dit parfois que la première fois qu'on pleure quand on naît c'est sur notre ancienne vie. Je commence ma nouvelle vie obligatoire, mais je continuerai de pleurer sur mon ancienne à jamais..
Dorénavant, je le sais, je sais que je ne vis pas dans un conte de fée mais bien dans la réalité..