# Défi 12 : Thief Party
Yeza Ahem
Le timing est parfait. Après 8 mois de préparation à récolter des informations, à provoquer les bonnes rencontres, à me créer un passé et un présent, il est enfin temps de passer à l'action.
Le mois d'août darde ses rayons sur la campagne florentine, et plus particulièrement sur la demeure princière du comte Augustino Ficaccini. Je suis invitée à la Garden Party célébrant l'anniversaire du filleul du maître de maison.
Dans l'immense parc, des enfants jouent, deux hommes bronzent au soleil sur le rebord d'une piscine en marbre, quelques ados font mine de goûter aux antipastis proposés sur des tables pour mieux dissimuler le fait qu'ils se passent un flacon d'eau de vie, sûrement une grappa millésimée... Quant à moi, je fais la conversation, sourire enjôleur aux lèvres, à un avocat très mûr, mais aux ardeurs d'un jouvenceau. Je ne laisse rien paraître de mon impatience à retrouver mon sac, dissimulé dans un cagibi au 1er étage lors de ma dernière visite, et contenant mes pinces monseigneur.
Quand un nuage très chargé cache soudain le soleil, je simule un frisson pour justifier de retourner chercher mon châle, laissé à l'intérieur près de l'entrée.
Toujours souriante, je traverse le jardin, rentre dans la villa, et vais récupérer mon précieux sac.
Derrière la deuxième porte à droite, qui cède facilement, se trouve le cabinet de travail du comte et sa collection si précieuse de timbres. Je sens l'adrénaline monter et je sors d'un pilulier le premier des trois bonbons aux plantes sauvages que j'ai prévus pour la journée. Le contact sucré m'apaise en me ramenant, pendant une fraction de seconde, à mon enfance choyée.
Il ne me reste plus qu'à désamorcer ce système de sécurité si ingénieux, inventé par un créateur de génie japonais, qui protège le trésor de mon autre. Grâce à cinq allumettes placées sur les bonnes encoches de la boîte à secret, le tour est joué, et le déclic se fait !
Le timbre ne paie pas de mine. Il représente deux cyclistes en tandem et une date, 1893. Il ne manque pas une once de sa dentelure. Il est parfait. J'exulte en mon for intérieur. Il est temps de prendre un second bonbon...
Une fois le timbre dissimulé dans une pochette spécialement étudiée que je colle à même ma peau, sous ma poitrine, je redescends et vais récupérer mon châle. Selon ma montre, 4 minutes 37 secondes se sont écoulées depuis mon entrée dans le bâtiment.
Je ressors et vais vers une table où trônent des verres à cocktail colorés. Je me saisis de deux verres et repars vers mon laissez-passer, l'avocat trop heureux de m'exhiber à ses côtés. Il me faudra bien ma troisième pastille sucrée pour ne pas succomber au désir de me sauver, réussir à patienter .
Le soleil est revenu. Décidément voilà une bien belle journée
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