Partie 13

Soda Pop

On entre, les gonzes ?

Notre réputation de fêtard et notre souhait de rencontrer Harald IerBlåtand « à la dent bleue » nous a précédé (si chez nous les pigeons véhiculent l'information, chez eux c'est le goéland Nordique qui est sollicitée. Aucune différence n'est à noter quant à la façon de transmettre le courrier, si ce n'est que leur message sent plutôt la marée !)

Et donc, comme par enchantement, deux affreuses armoires casquées de 2 mètres chacune (au bas mot !) nous déverrouillent les lourdes gravées en relief dans le style « Thriller » de Michael Jackson, mobilisant à bloc mes trompes d'Eustache ! Puis, un insolite que je n'avais point encore aperçu se détache alors d'entre les deux menhirs blonds en question, et s'avance vers nous : Le Godi (1). Il est beaucoup moins grand qu'eux de deux fois, mais rondelet et suiffeux. Tiens, avec ce qu'il s'est collé sur la perruque, on pourrait  graisser les deux moyeux de notre chariote ! Il s'adresse à moi en Français d'Afrique du Nord, non parce que le Français est la langue officielle du Danemark, mais parce que ce « frjalsgjafi » (à qui l'on a redonné la liberté, si t'as bien suivit au chapitre précédent !) adore le couscous, le thé à la menthe, la danse du ventre et l'arrière boutique des beaux mâles !

-       Au nom di Sa Majesté li Roi Harald IerBlåtand, m'y fais grand honneur d'accueillir missager d'un autre grand souverain. Sois li bien venu au palais royal, Emile Lion d'Aquitaine !

Nous nous serrons énergiquement la paluche et je m'écarte légèrement afin de présenter ma bande d'affreux (Mercedes Jouidupo dé Lintroductionne, Lanceleau Danlac et Oleu' Gröpaff ) Mais mon chevalier « Rond de la Tablée » devance mes civilités...

-       Sir Lanceleau Danlac, protecteur du moine que tu vois là, mon pote. La santé est bonne ? Les affaires marchent ? Les mouflets travaillent bien à l'école ?

-       Tout va très bien, assure le royal messager, ravi de tant de sollicitude. Puis ajoute : Si ti veux, ti passes li Garde Royale en revue ?

Et de nous entraîner, le temps de garer notre bus en bois, vite fait bien fait sur un parking bouseux, vers la Horde du Royal Médokk (HRM) : la Garde d'apparat du Royal Palais en question. Nous marchons Lanceleau et moi-même devant le front des troupes. Un peu baraqués les vikings du Roi ! Le plus petit est aussi grand que les deux portiers de tout à l'heure ! T'as qu'à voir ! Faut les admirer, dans un garde à vous impeccable, tous blondinets, la grande hache scandinave (2)au côté, bouclier au dos, le menton relevé et le regard lointain.

Lanceleau pince l'oreille du dernier, en un geste hautement napoléonien :

-       C'est bien, mecton, approuve-t-il, c'est très bien, tu feras mes compliments à tes copains !

Il tend un écu au guerrier.

-       Vu qu'il fait bien froid, vous irez écluser à l'occasion un gorgeon de pif chaud, du côté de notre camion de livraison, à la santé  des Burdigalais ! 

Le soldat n'empoche pas la tune, mais il la fourre dans son semblant de braguette (dès qu'on l'aura inventée !) d'un geste preste.

-       Ah ben dis donc, je comprends pourquoi qu'on appelle ça des bourses ! ricane le chevalier

(à suivre)


(1).Le Godi : Les hommes, et plus rarement les femmes, pouvaient accéder à la fonction de Godi (pluriel.Godar). Plutôt riches et influents sur le plan politique, ce sont des chefs de clans. Cette fonction peut être rachetée ou héritée. Ils siègent aux jurys des Things, et Hreppar (singulier. Hrepr : sorte d'assurance tous risques, solidarité entre clans). Ce sont des administrateurs, des hommes de lois, en charge des pratiques, coutumes, lors des grandes dates de l'année, (équinoxes, solstices, Jol...) et lors des grands évènements (naissance, mariages, funérailles, mémoire des Ancêtres...). Ils ne sont ni des prêtres, ni des druides, ils n'ont pas de religion, pas de dogmes ni de temples, ni caste religieuse...Ils devinrent des prêtres lors de la christianisation.

  (2). Armes scandinaves : Les armes scandinaves ne sont en rien supérieures à celles des Francs. Les guerriers sont généralement armés de haches, de grands glaives lourds, de lances, de javelots et de boucliers. À la grande hache scandinave (tenue à deux mains), répond la qualité des épées et des broignes (protège thorax) franques. Ils utilisent aussi des épées d'origine anglo-saxonne. Mais c'est l'élément tactique des Vikings et non l'armement qui garantit leur efficacité au combat. Ils utilisent notamment l'effet de surprise. Mais cet avantage disparait lorsqu'ils s'engagent dans la remontée des fleuves et dans l'arrière-pays car la nouvelle de leur présence est rapidement transmise de village en village. Les sources franques révèlent que les envahisseurs savent se retrancher dans des fortifications qu'ils élèvent eux-mêmes. Lors d'un raid, les Vikings tuent ou emmènent des captifs. La nouvelle de ces violences cause la terreur chez les autochtones qui s'empressent de fuir ou de verser un tribut. Cette intimidation est une arme de dissuasion redoutable dont les effets sur l'adversaire, quoique non quantifiables, jouent sûrement un rôle important dans le succès des incursions vikings en Francie occidentale.


Signaler ce texte