PéTRONILLE EN ALSACIE - épisode 1

Dina Mann

EPISODE 1 : Il était une fois...

 

Il était une fois,

En des temps fort peu lointains,

Et même actuels,

En une contrée fort filandreuse,

Et même adipeuse,

Une demoiselle,

Ni en guenilles ni moll'd'la ch'ville,

Une pimprenelle,

Ni bien nommée : PétroniLLe.

PétroniLLe de La Motte en Biais aurait pu s'appeler "Désirée", mais encore eût-il fallu qu'elle le fût.

Le problème prénominal de cette enfant indue se posant, ses géniteurs en concoctèrent un (prénom) avec les moyens du bord : le père raffole de l'odeur du pétrole, la mère s'émoustille de celle de la vanille, le choix s'est imposé : Pétronille leur fillotte allait s'appeler.

Ainsi s'assurèrent-ils quelque garantie contre la future rébellion de cette enfant qui un jour serait grande. Ils s'imaginèrent promptement la scène des grandes accusations :

« De toutes façons vous m'kiffez pas, vous m'avez jamais kiffée ! » (Oui le jeune s'exprime ainsi... hélas).

Le couple géniteur pourrait toujours prétendre le contraire :

« Comment oses-tu, insolente de-mes-couilles-et-des-ovaires-de-ta-mère ! Nous t'avons dotée du prénom le plus original du Monde Connu, élaboré avec tout l'amour de parents adorateurs de sa progéniture et toi, oui toi, tu craches ton venin de pucelle sur nos échines courbées ! Toi, adolescente pré-pubère mal-embouchée-qui-devrait-se-faire-sauter-fissa, n'as-tu point honte de l'abomination verbale dont tu nous offenses ?! Serait-ce là ta manière de nous remercier, Nous, qui t'avons créée, chérie et adorée jusqu'à la moelle ? Soit... qu'il en soit ainsi ! Rends-nous l'attribut prénominal dont nous t'avons honorée ou va-t-en loin, très loin, très très loin, là où l'inconnu a meurtri plus d'un cœur. »

Volte-face théâtrale du père suivi de la mère silencieuse,

elle, mais n'en pensant pas moins.

La scène se tint effectivement, heureusement pour tous plus tôt que prévu, alors que PétroniLLe venait de fêter sa huitième année de vie pourrie captive de l'ignominie familiale.

Quant à se faire sauter, elle était déjà sur le coup depuis belle lurette, et quant à être embouchée, elle l'était plus que de raison.

La scène se tint donc, peu ou proue dans les termes attendus, à la différence du final qui fut bien plus expéditif.

Emporté par son rôle de paternel excédé, PétroniLLe-Père arma sa jambe métallique d'infirme (c'est prouvé, un cabossé dans la trame narrative ça ajoute à la tension dramaturgique. Ou pas.), l'élança en arrière et d'un puissant mouvement de bascule déquilla sa progéniture (bon débarras), laquelle atterrit loin, très loin, très très loin de là.

Se remettre d'un catapultage qui vous colle un 8G dans les gencives, ce n'est pas une mince affaire, surtout quand on n'est cosmonaute ni de naissance, ni de formation. Mais PétroniLLe géra le jet lag avec l'arrogance des insolents de son âge. Quelques minutes après le crash suffirent à notre héroïne des temps fort peu lointains et même actuels pour rassembler les morceaux, avec ma foi, une créativité toute pétronillienne... Toujours l'arrogance des jeunes qui pensent mieux savoir que tout le monde, à commencer par Dieue Elle-même, qui aurait franchement pu y penser... à mettre les lèvres vaginales à la place de la bouche !

Non mais c'est vrai quoi, là au moins les choses sont claires et puis de grands penseurs avaient vu juste : « je te parle pour te niq*** / tu me niq*** quand tu me parles. » (sic: Dialectique bipolaire de la projection moïque à réversibilité narcissique, Pi YIN., 412 avant Blanche Neige).

Précisons toutefois que par un procédé non encore dévoilé (patience), PétroniLLe sera bien vite réordonnée. Toute vérité n'est pas bonne à exposer dans cette contrée encore inconnue, sans parler de l'exclusion, des moqueries (souvent), des insultes (abondamment) et des séances de tabiolage (tabassage + viol) filmées au téléphone portable, ce qui ne manquerait pas de desservir plus que de mesure notre héroïne que le pixel anémié a tendance à empâter (notez l'assonance en « a ») et même surempâter.

Mais, encore ignorante des menaces menaçantes qui menaçaient de s'abattre sur sa naïve personne, PétroniLLe en était là :

« Qui suis-je ? Où suis-je ? Dans quel état j'erre ? »

Cheveux en papillote, moule bavarde et bouche sèche, yeux décalés de leur orbite selon un collapsus vectoriel avoisinant les 8 degrés.

Douée d'un sens certain de la débrouille et ayant oublié d'être conne, PétroniLLe s'enquit du premier panneau d'affichage qu'elle croisa. Par chance (et parce que les narratrices le veulent bien), le dit panneau, au format outrageusement impressionnant pour une petite fille juchée au sommet de ses huit petites mais non moins déjà densément remplies années, n'était ni plus ni moins qu'un repère topologique en 3D² (un plan quoi) de la contrée sur laquelle notre héroïne des temps fort peu lointains venait de se ramasser avec force dégâts (pour la contrée, mais nous y reviendrons).

 

Notre héroïne tenta d'en déchiffrer les inscriptions :

« Frus-tisch-ter-schill-sheim, O-ber-mol-kir-sche-ffer-si-sheim, Pfa-ffen-bi-tter-bach. Putain c'est QUOI ce foutu pays de-bordel-de-merde-j'men-fous-plein-la-glotte ?!!! »

Pour tout dire (et pour celles qui ont suivi), elle s'en mit plein la chatte.

PétroniLLe recula d'un pas, se contorsionna sous tous les angles géométriquement disponibles pour visualiser la contrée plus globalement.

« Mais c'est QUOI cette forme à-la-con-de-chez-ça-me-mord-le-noeud ?!!! »

Aïe ! L'hérédité...

Comme quoi même un shoot de 8G suivi d'une reconfiguration maison ne suffisent pas à gommer l'empreinte de la gouaille paternelle.

Sentant son adrénaline virer à la glycérine, PétroniLLe se précipita sur une valeur sûre et s'enlampa une bonne bouffée de Zoprak à l'inhalateur fixé sur le cadran antérieur droit du repère topographique en 3D². L'emplacement de l'appareil était étudié de sorte à ne léser personne, pas même les enfants, SURTOUT PAS les enfants.

Quiétude oblige.

>>> Intermède historique : Le Zoprak est aux temps fort peu lointains et même actuels ce que le goubon dans le biberon était aux temps fort lointains et même immémoriaux : le meilleur ami de la paix. <<<

Quiétude acquise, PétroniLLe reprit :

« Putain... la loose... j'ai atterri sur un oiseau... enfin une cigogne (ce dont l'informait aimablement le paratexte)... connais pas... mais apparemment j'suis dans son cul (ce qu'indiquait tout aussi aimablement la pastille rouge estampillée "vous êtes ici").

 

Oui, PétroniLLe s'était donc fichée dans un trou, un trou nommé ALSACIE

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