POLISSONNES I : De Concert

Dina Mann

POLISSONNES  I  Nouvelles Érotiques

De concert (extrait)

(…)

Sans aucun doute branchée, la boîte était carrément bondée. Lean m’a pris la main pour m’entraîner jusqu’au bocal du DJ. Un jeune garçon aux muscles luisants et au sourire maquillé l’a accueillie avec de grands gestes puis lui a fait un signe, le pouce levé.

 

Aussitôt le rythme craché par les dizaines de hauts- parleurs est devenu plus lent, plus sensuel et la masse des danseurs a commencé à chalouper en hurlant.

 

J’ai senti son corps se coller contre le mien et m’entraîner à son rythme. Son souffle glissait dans mon cou, descendait en frisson jusque dans mon ventre.

 

J’ai fermé les yeux.

 

La voix du chanteur coulait avec suavité entre les beats du tempo et les chœurs graves tandis que des échos électroniques soulignaient la mélodie. Tous les corps paraissaient dans la même extase, chaloupant au même rythme sous les lasers qui décoloraient les regards et déchiraient les visages tendus vers l’infini.

 

Je planais, comme lors du concert. Non, mieux. Plus physiquement. Mon corps se déliait aux vibrations, bougeait avec une aisance dont elle ne perdait pas une variation. Nous n’étions plus qu’un seul être aux sens décuplés, aux membres complices, aux souffles unifiés.

 

Cette fois ma bouche est venue elle-même chercher son baiser. Je ne sais pas depuis combien de temps nous dansions ainsi, ça n’avait plus aucune importance. J’avais faim de nos corps unis, j’avais soif de sa bouche.

 

Nos langues ont entamé leur propre danse, nos hanches se pressaient de plus en plus près jusqu’à ne même plus laisser la musique nous séparer, jusqu’à nous envoler dans ses accords les plus secrets.

 

Ensuite j’ai senti ses mains se promener sur mon corps, accompagner les soupirs, les provoquer, ses mains glisser dans mon dos et caresser mes fesses, ses mains s’emparer de mes seins et les affoler en pincements, ses mains entrouvrir mes cuisses, souligner la géographie de mon sexe.

 

Je me suis collée un peu plus à elle, enfonçant ma langue dans sa bouche pour agacer la sienne à mon propre rythme.

 

Sa main a dégrafé mon pantalon et s’est forcé un passage dans mon gouffre humide. J’ai hurlé sur ses lèvres. Les autres corps formaient un rempart qui nous protégeait du monde, ses doigts jouaient en moi et je me liquéfiais pour mieux les accueillir. Elle m’a retournée pour me presser contre la paroi du kiosque, son autre main est venue fouiller mon sexe et s’agiter autour de mon clitoris, son tempo se déployant au rythme des percussions afro dont ses doigts et son bassin me gratifiaient en va-et-vient acharné. J’ai senti la furie monter en moi, j’ai accéléré encore le tempo afin que ses doigts arrachent de mon bouton sa sève sucrée et s’enfoncent toujours plus pour venir m’ouvrir les portes du plaisir.

 

J’ai joui pendant plus d’une éternité de basses assourdissantes et de percussions diaboliques, j’ai joui en vagues, en soubresauts, en tremblements, j’ai joui en cataclysme et en arc-en-ciel, j’ai joui en saccades et en longues plaintes, j’ai joui encore quand elle est revenue, j’ai joui en glissant ma main vers son sexe pour l’envahir à mon tour, maladroitement, glisser entre ses lèvres collées de mouillure, chercher sa fente et son bourgeonnement, m’y imposer, j’ai joui en l’emportant vers ces sphères où elle me faisait planer, j’ai joui en lui arrachant sa jouissance de mes doigts autoritaires, en faisant exploser son ventre et son clitoris de mes doigts insatiables.

 

Ensuite, on a dansé encore, jusqu’au bout de la nuit.

Lesbienne.

 

Je ne m’étais jamais posé la question

 

Tu peux sourire et remballer ton ironie.

 

Lean était en dehors je t’ai dit, en suspend. Et moi à côté. Juste à côté.

 

Ce n’était ni sa présence ni son absence, ni son regard inquiet ni son teint pâle, ni ses mots ni ses sourires, ni son rire décalé ni ses silences. C’était tout à la fois.

 

C’était elle et je ne l’avais pas vue venir.

 

Alors tu peux rire, franchement même.

 

Dina MANN - Oeuvre soumise à droits d'auteur

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