(Psycho) Les petits pois magiques de Mendel.

Hervé Lénervé

Ah, ces moines ! Ils nous feront toujours rire.

§21

N'importe quel étudiant de première année, dans n'importe quelle discipline des Sciences Humaines a entendu au moins une fois le terme de « lois de Mendel » alors que l'intéressé est mort sans en connaître l'expression.

Mais revenons un peu en arrière, le 6 janvier 1884 Gregor Johann  Mendel s'éteignait. Ne commencez pas à vous réjouir en pensant. « Yes ! La rubrique est finie. » Non, faut pas rêver non plus, elle ne fait que commencer, elle ne peut pas être si courte, soyez réalistes. C'est la même chose pour un film où le héros meurt juste après le générique, on se dit chouette, on sort du cinoche, on mange un truc vite fait dans un fastfood et on va se coucher. Bé, non ! Il y a des flash-back et le héros mort continue de hanter l'écran pendant deux plombes.

Quelques jours après la mort de Mendel, par malveillance, ses archives personnelles étaient brûlées, j'allais dire à leur tour, entraîné par le rythme mélodramatique du récit. Mais non, Mendel mourut de sa belle mort, disons de sa mort naturelle, puisqu'il faut bien en dire quelque chose, mais pas sur le bûcher de toute façon. Il avait eu une vie de chercheur bien remplie et certains retinrent son nom pour ses travaux en météorologie, mais certainement pas comme le père fondateur de la génétique moderne qui n'existait même pas dans les esprits de ses contemporains qui comptaient aussi un certain Charles Darwin dont l'Histoire s'enticha, allez y comprendre quelque chose avec celle-là ? J'ai bien fait d'avoir eu de mauvaises notes dans cette matière à l'école. Il faudra attendre encore soixante-trois ans avant que ne soit identifiée la structure en double hélice de l'ADN par Watson et Crick.

Alors, une question pertinente se pose… et je vous la pose :

-         Comment aurait-il pu comprendre les lois héréditaires sans connaître le processus interne des transmissions génétiques ?

Comme vous n'avez pas les moyens de me répondre et que c'est vraiment frustrant pour ceux qui ont déjà la réponse… je m'auto-réponds :

-         En comptant des petits pois.

Mendel compta plus de petits pois dans sa vie qu'un village n'en mangerait dans sa vie. Cela ne veut rien dire ma comparaison, mais bref, il en compta beaucoup, quand même, en séparant les pois lisses des pois ridés, comme on sépare le bon grain du chagrin, facilement reconnaissables à leurs mines de poupons joufflus ou de vieillards cacochymes. Il suivit génération après génération les descendants des nourrissons ou des vieillards et finit en désespoir de cause par en tirer des pronostics sur les récoltes à venir. Alors qu'avant, on se basait  sur l'observation des fourmis pour pronostiquer : si elles montaient plus qu'elles ne descendaient, la récolte serait pourrie de petits pois ridés… beurk ! On pouvait également utiliser des osselets, c'était bien aussi, pas plus efficace, mais plus ludique.

  Ces observations empiriques l'amenèrent à constater que les caractères se distribuaient toujours dans les mêmes proportions génération après génération. Il suspecta l'influence de gènes (allèles) dominants ou récessifs cachés quelque part dans l'individu avant que les chercheurs n'entrevoient le concept même de gènes.

En génétique moderne on admet des caractères exprimés, visible (phénotype) et une structure interne aux individus générant ces caractères (génotype). Mendel n'observait donc que le phénotype de « ses » petits pois, pourtant avec de l'obstination de la rigueur et beaucoup de café, cela fut suffisant pour établir ses lois statistiques génétiques toujours à la mode chez les scientifiques, tique, tique, aujourd'huique.

C'est toujours fastidieux et très rébarbatif d'expliquer les lois héréditaires en génétique alors que c'est relativement simple dans les cas de croissements simples, mais comme les notaires, eux-mêmes, préfèrent ne pas traiter ces affaires, je ne m'y risquerai pas.

Nous savons aujourd'hui que nos paires de chromosomes, je dis nos en faisant l'inférence que vous en ayez aussi, sont porteurs sur une position donnée (locus) d'un gène dominant et d'un autre récessif (allèles). C'est la combinaison de ces deux allèles qui donne le caractère exprimé, visible (le phénotype) de l'individu.

Donc les générations F1, F2, F3 etc. peuvent amener des surprises plus que les courses de bolides qui voient toujours les moteurs les plus puissants gagner et par conséquent, les notaires toujours rouler en berlines allemandes, haut de gamme.

Bon, il commence à se faire tard, donc je ne prendrai qu'un seul cas simple, et un petit digeo, pour illustrer de belles couleurs cette rubrique. Justement, la couleur des yeux pour changer des petits pois. Mademoiselle Marie-Joséphine de bonnes familles se marie avec le gentleman Richard. Ils ont, tous deux, les yeux clairs, beaux et bleus comme il se doit. Tous leurs enfants auront les yeux bleus, car l'allèle bleu étant récessif, les parents sont obligatoirement homozygotes (tous deux porteurs de la combinaison bleu-bleu, le ciel de Provence, dans leur génotype, autrement l'un, des deux, aurait eu les yeux marron lavasses et vitreux comme tout le monde.) Or un des enfants est affublé d'une paire d'yeux bovins, car Marie-Joséphine a fauté, un jour de grandes solitudes, avec un beau brigand venu brigander sous ses fenêtres, alors que Richard s'affairait en déplacement d'affaires avec sa belle assistante. Si le moine Mendel s'était occupé davantage de son Bon Dieu plutôt que de fourrer son nez dans les affaires des autres, le couple aurait accueilli la naissance du garçon avec déception certes, mais se serait habitué, car le morveux avait de beaux cheveux bruns comme son papa (biologique). Maintenant à cause de Mendel, Richard mit une mandale à Marie-Joséphine pour lui apprendre la politesse de ne pas le cocufier dès qu'il était parti exercer son dur métier avec sa belle assistante et la Marie, couche toi là, en fut défenestrée. D'où, chute et décès pour Marie, menottes et inculpation pour le mari qui en fut, quand même marri, d'avoir agi ainsi. Voilà comment Mendel a commencé à pourrir la vie des couples adultérins. L'histoire a bien fait de ne pas retenir son nom et je n'aurai  jamais dû en parler, allez ! On l'oublie !

Bisous.

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