Quand la Solitude devient une amie

sylvenn

Noires Heures - Essais

A vingt ans, j'ai fait un pas en avant en perdant tout ce sur quoi je construisais mon identité. Le prestige, le statut social, la réussite au sens où les gens l'entendent. J'ai réalisé que cette course était vaine. Qu'elle n'était pas faite pour moi. Dans la décennie qui vient de passer, j'ai accumulé des expériences d'un genre nouveau. Entouré par des gens qui comme moi, s'apercevaient qu'ils avaient porté un masque, mais qui comme moi ne se sentaient malgré tout pas à leur place. Avec l'effondrement de ce nouveau mode de vie, quelque chose doit aujourd'hui m'apparaître comme une évidence : je cherche encore, à tort, à m'identifier à ceux que je ne suis pas. Je ne suis pas un athlète, un carriériste, un maître dans l'art de passer son temps à le remplir. Et alors ? Je crois qu'il est temps que je change d'environnement, pour changer mes paradigmes.
***
Voir autre chose.
Ne plus chercher à s'occuper pour rien.
Ne plus chercher à plaire aux autres.
Ne plus chercher à être séduisant.
Ne plus chercher à réussir.
Seulement chercher à plonger entièrement dans ce que j'aime faire. Maintenant.
Pourquoi me lèverais-je tôt comme tout le monde si je n'en ai ni l'envie, ni le besoin ?
Pourquoi ferais-je du sport, de la musculation, de la gymnastique, si je n'en ai rien à foutre de ressembler à ces mecs alors-même que je ne suis pas comme eux ?
Pourquoi je m'empresserais de faire des millions d'activités chaque jour si je n'en ressens pas l'envie ?
Pourquoi je devrais orienter ma vie, mes décisions, autour de ce qui fait plaisir aux gens, à mes amis, mes proches, ma famille ?
***
Toute cette dévotion, tous ces sentiments que j'ai dû taire, toute cette vie que j'ai sacrifiée se transforment à présent en une haine indicible retournée contre le monde. Parce que je vois comme tout le monde fait semblant, et attend de nous que nous fassions de même. J'étais le meilleur à ça. L'empereur du théâtre, le roi des caméléons. Mais quelque chose a toujours sonné faux en moi et en les autres. Quelque chose d'inconscient. Alors maintenant que je comprends comment tout ça est un mensonge, je m'apprête à quitter la scène. J'espère que de l'autre côté du rideau, il y aura autre chose… une autre vie, une vie réelle. J'espère qu'elle n'est pas qu'en moi. J'espère qu'il existe un endroit où tout est vrai, surtout les gens.
J'ai beau y penser, je n'y crois pas trop… la présence des gens quels qu'ils soient me fait peur, m'intimide. Je ne me sens plus moi-même avec aucun d'entre eux, pas même le plus proche de mes amis. Le SILENCE. La SOLITUDE.
C'est en celle qui m'a toujours tué que je place à présent tous mes espoirs. Mon dernier espoir. Celui de me sentir plein loin de ce monde, plutôt que de me sentir vide et noyé dans la foule.

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