Reflet de l'âme - chapitre 1 - partie 1

erusworld

La photographie est l'art de capturer la beauté, de retransmettre des sensations furtives avec un précision de maître. La vie de Maelys, cependant, ne tient qu'à un fil. Ou plutôt, à une photo.

La chaleur moite de New York était lourde et presque insoutenable en cette nuit d'août. Le temps semblait s'être arrêté. On n'entendait pas même le ronronnement d'un moteur dans les rues, chose incroyable pour une ville aussi grande, d'ordinaire toujours en mouvement. Le vent en personne rechignait à souffler, comme s'il n'osait pas perturber le sommeil des habitants de la cité.

Maelys jeta un coup d'œil à son réveil, il indiquait 3h du matin. La jeune femme laissa échapper un long soupir. Encore une nuit d'insomnie. Sachant qu'elle ne s'endormirait pas avant le lever du jour, la petite blonde choisit finalement de s'habiller pour aller prendre l'air.

Elle sortit de son lit en posant un pied après l'autre, sa chemise de nuit lui collant à la peau à cause de la chaleur. Elle choisit de la retirer, et se dirigea vers sa fenêtre et l'ouvrit dans l'espoir de retrouver un peu d'air frais. Du haut de son appartement au 3eme étage, Maelys jeta un œil vers la rue pour constater que seules quelques personnes se risquaient à traîner dans les ruelles à cette heure. Les éclairages artificiels de la ville frappaient l'intérieur de sa chambre d'une lumière pâle, qui dispensait la jeune femme d'allumer la lumière. Nouveau soupir.

Une nuit comme les autres, comme depuis des mois.

Maelys ouvrit sa penderie et piocha au hasard des sous-vêtements, un t-shirt et un jean avec lesquels s'habiller. Pas de maquillage, un rapide coup de brosse pour tenter de discipliner sa tignasse blonde. Elle attrapa son portable et ses écouteurs sur la table de la cuisine et sortit. Après avoir dévalé les trois étages par les escaliers – elle ne supportait pas d'attendre l'ascenseur – pour atteindre le rez de chaussé, Maelys sortit dans la rue et commença à marcher au hasard, longeant les trottoirs, les écouteurs vissés dans les oreilles, les notes fortes d'une chanson de métal résonnant dans la tête.

Au fur et à mesure qu'elle se mettait dans l'ambiance, la jeune fille ne put s'empêcher de chantonner à voix basse les paroles.

I'm not insane

Just looking like a scarecrow

Maelys appréciait le calme de la nuit, dans cette partie un peu isolée de la ville. Elle avait l'habitude de sortir en profiter lorsqu'elle ne parvenait pas à dormir, comme cette nuit. Comme toutes les nuits depuis des mois.

Depuis quelques temps, la malchance semblait s'être attachée à elle et ne plus vouloir s'en défaire. Du haut de ses 26 ans, la jeune fille s'était fiancée, avant de voir l'homme qu'elle aimait partir avec une autre, allant jusqu'à quitter le pays pour être sûr de ne plus jamais la revoir.

Depuis ce jour-là, Maelys enchaînait les nuits blanches et les aventures sans lendemain, s'enfonçant de plus en plus dans sa solitude, et avait quelques fois recourt à l'alcool, dans l'espoir de se sentir bien le temps d'une soirée, sans se soucier de l'état dans lequel elle se retrouverait le lendemain matin.

Peu à peu, ses derniers amis s'étaient éloignés d'elle, comme si elle leur portait la poisse. Au fil des mois la solitude était devenue de plus en plus présente dans la vie de Maelys, qui finit par apprendre à vivre avec, se refermant ainsi sur elle-même.

La jeune femme reprit soudainement contact avec la réalité, sa musique venait de s'arrêter. Maelys s'adossa au mur d'une des maisons qu'elle longeait et sortie son portable de sa poche pour remettre le son. Un mouvement au coin de la rue la fit sursauter, elle regarda autour d'elle mais ne vit rien. Après avoir scruté attentivement toute la rue pendant quelques secondes pour se rassurer, la jeune femme continua sa route calmement. Ses nombreuses sorties nocturnes lui avaient au moins appris qu'il n'était pas utile de s'inquiéter du moindre bruit, si l'on ne voulait pas devenir parano. Comme disait son ex fiancé, « la ville est vivante, elle respire et bouge avec nous ».

A la simple évocation d'Evan, le cœur de Maelys se serra. Même sept mois plus tard, le sujet restait douloureux.

Perdu dans ses pensées, la jeune femme se dirigea peu à peu vers une zone plus vivante, et finit même, après plus d'une heure de marche et de nombreux détours, par rejoindre Time Square. Cette partie de la ville qui ne dors jamais et où l'agitation est perpétuelle sous les grand panneaux lumineux accrochés aux murs des immeubles. Maelys jura d'abord silencieusement contre son instinct qui l'avait guidé dans cette zone trop bruyante, alors qu'elle ne cherchait qu'un peu de tranquillité. Après avoir fait quelques pas dans la foule, la jeune femme finit par prendre du plaisir à observer les touristes autour d'elle, qui prenaient des photos sans se soucier de l'heure tardive. New York, la ville qui ne meurt jamais. Le fait que toute cette agitation se concentrait en des lieux précis et fuyait son quartier pour la nuit n'était cependant pas pour lui déplaire.

Maelys sortit une nouvelle fois son portable de sa poche pour en augmenter la volume, les touristes étaient définitivement trop bruyants pour elle. Au même moment, celui-ci se mit à vibrer dans sa paume. Elle venait de recevoir un message. La jeune femme fronça les sourcils. N'ayant pas vraiment d'amis, elle recevait très peu de textos, sauf éventuellement de sa mère, qui s'assurait qu'elle allait bien. Se demandant ce qu'on pouvait lui vouloir à cette heure avancée de la nuit, Maelys ouvrit le message en question. Il provenait d'un numéro masqué. Nouveau froncement de sourcils. Le message était court, deux mots et une date.

« Time Square, aujourd'hui, 4h25. »

Ne comprenant pas pourquoi on lui avait envoyé un tel texto et qui pouvait bien en être l'auteur, Maelys jeta un coup d'œil à l'heure. 4h20. Soit 5 min avant l'heure indiquée.

Songeant a une blague ou à un faux numéro, la jeune femme remis son portable dans sa poche et s'enferma une nouvelle fois dans sa musique.

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