Restauration, la Triologie, le Teaser

Melvin Dia

Teaser de la Triologie. Le retour d'un roi sur le trône de France ?

23 avril 2017 ST DENIS - Premier tour de l'élection présidentielle.


Diallo posa la main sur sa poitrine, côté gauche. Ça ne se calmait pas… Il réglera cela plus tard. Oui, il fallait qu'il consulte mais aujourd'hui sa santé passait au second plan. Dix minutes, encore dix longues minutes avant d'être délivré.

Les estimations tombaient les unes après les autres : contradictoires. Cela se jouerait dans un mouchoir de poche.

Sophie courut vers lui alors qu'il s'apprêtait à descendre l'escalier. Diallo l'arrêta.

Tu devrais te ménager.

Je ne suis pas malade…, dit-elle en posant la main sur son ventre. Tout va bien !

Diallo ressentit à nouveau la douleur dans sa poitrine. Elle n'était pas malade, mais lui…?

A cinq mois de grossesse, elle parvenait toujours à dissimuler. Elle avait certes pris quelques kilos, mais rien de bien flagrant. On pouvait sûrement mettre cela sur le compte d'une campagne éprouvante.

Comment en étaient-ils arrivé là ? Tous : Eux, le pays, la France toute entière… La question trottait dans la tête de Diallo, tandis qu'il descendait les escaliers aux côtés de Sophie pour se rendre au bureau du Prince. Son épouse se trouvait à la porte. “ Son Altesse travaille à son discours, il a demandé à ne pas être dérangé ”. Diallo et Sophie se regardèrent. Si cette campagne les avait tous changé, la Princesse était sans doute celle dont la transformation était la plus flagrante. Elle avait prit la confiance disait-on dans les couloirs du QG. Diallo s'impatientait, il avait le sentiment qu'on l'empêchait de faire son travail.

- Les résultats vont bientôt tomber. Il va falloir arrêter notre stratégie, dit-il.

- Ne vous inquiétez pas de mon mari, nous sommes parfaitement conscient des enjeux de cette soirée. dit la Princesse.

Diallo voulut répondre mais c'est Sophie qui reprit la parole :

- Très bien, nous allons l'attendre dans la grande salle. Je vais faire patienter la presse.

Diallo regarda Sophie, elle avait fait le bon choix. Chacun tentait de marquer son territoire à l'approche des résultats, chacun était dans son rôle… Sophie, celle qui savait trouver les mots justes malgré une situation délicate. Sophie, celle à qui il devait sa présence ici et celle à qui le pays  devait cette étrange candidature. Ils traversèrent la vaste pièce où était réunie l'équipe de campagne ; tous ces bénévoles qui pendant des semaines avaient sacrifié de leur vie et avaient tant donné d'eux mêmes ! À présent, chacun retenait son souffle. Huit minutes encore...

Les deux amis s'arrêtèrent sur le balcon-terrasse où le Prince viendrait, si les résultats lui étaient favorables, remercier la foule. À St Denis ! Cela s'était révélé judicieux d'installer le QG de campagne dans cette ville populaire et où les corps de tant de Rois de France reposaient encore. Le Prince y avait tenu. On l'avait critiqué mais cela avait fonctionné au delà de toute espérance. Cela avait complètement relancé sa campagne alors qu'elle piétinait.  Une manière de réconcilier deux France…


- Si on perd, tu sais ce que tu vas faire ? demanda Sophie.

- Reprendre une vie normale… sourit Diallo.

- Une vie normale ? Tu crois vraiment qu'on pourra y revenir ?

Diallo garda le silence.

- Surtout, tu sais pour qui il appellera à voter, toi, Mr le directeur de campagne ?

Diallo regarda plus bas. La foule avait commencé à se masser sur la place pour suivre les résultats sur l'écran géant. Ils étaient enthousiastes, les Dyonisiens rassemblés dans la rue. Ils y croyaient, eux, à cette victoire.  “PP XXI” scandait la foule ! PP XXI où la réunion de Prince-Président et  de Louis XXI.

- On n'a pas encore perdu... Ni gagné d'ailleurs ! Ça va être serré, reprit Diallo qui voulait y croire.

Sophie respira profondément. Quelqu'un, un bénévole vint à leur rencontre : “ Dans trois minutes ! dit-il. Trois minutes ! “ Bientôt la délivrance. Les grandes chaînes et les instituts de sondage étaient incapables de donner une estimation fiable. Le trio de tête, dans les estimations qui tombaient, se tenait au coude à coude. Mais il faudrait bien céder au rituel et annoncer deux qualifiés.

Diallo et Sophie reprirent en silence, avec le bruit de la foule derrière eux, le chemin de la salle de conférence. Diallo regarda le pupitre ou dans quelques minutes, après les résultats, le Prince ferait sa première déclaration. Il avait en mémoire aussi les moqueries dont il fut l'objet quelques mois plus tôt quand il s'était lancé dans la bagarre au côté cet héritier des Bourbons : “ Que vas-tu faire dans cette galère ? T'es royaliste maintenant ? “ Il avait hésité, soupesé… Était revenu en arrière et avait finalement pris sa décision qui l'avait conduit ici.

Avait-il trahi ? Qui n'avait pas été amené à revoir entièrement ses positions ? Beaucoup de questions légitimes mais dont il n'avait pas le luxe de répondre ce soir.  Il restait encore bien des combats même en cas de victoire : un second tour, des législatives, des ralliements à confirmer, et une constituante...

Des bruits, des rumeurs faisaient écho d'une attaque imminente, une nouvelle ! Où ça ?  Diallo avait appris à vivre avec ce flou, cette incertitude permanente et surtout cette peur. Comme l'ensemble de la population qui vivait avec ces menaces suspendues au-dessus de leur tête depuis de mois. De toute façon la réalité avait toujours pris tout le monde de cours. L'horreur n'avait pas failli en imagination dans ce pays en proie à la guerre civile. La différence ? À présent il était directeur de campagne. Maîtriser la peur, la dominer avait été un des axes de la campagne. Il faudrait aller au bout. Même la peur au ventre et sans rien montrer.

Diallo arrêta Pierre Alonso, responsable de la sécurité du Prince et ancien flic  et donc bien informé.

_ Des nouvelles sur cette attaque ?

_ Rien de probant pour le moment… On reste vigilant. dit l'homme de sécurité en reposant le doigt sur son oreillette.

- Et la sécurité du Prince ?

_ Au plus haut niveau.

_ Très bien. Ne le lâchez pas des yeux dès l'annonce des résultats.

Le jeune homme acquiesça d'un signe de tête et repartit à son travail. Le portable de Diallo vibra. Un message : Vincent  “ il semble qu'on se retrouvera pour la bataille finale !”. Avait-il des chiffres que lui n'avait pas ? De ce trio de tête :   Droite extrême, Droite Républicaine ( cela faisait sourire Diallo ) et le parti du Prince-Président, qui serait qualifié ?

C'était une  belle soirée d'avril en région parisienne, mais aussi ailleurs en France. Une de ces soirées que l'on passe entre amis, à boire en terrasse, pic-niquer, à flirter… En temps normal… La normalité avait perdu ses boussoles. La peur s'était installée et, de gros nuages, prêts à péter, s'amoncellaient au-dessus du ciel électoral. Tous ces morts, ces violences, ces attentats et ces affrontements des derniers mois avaient changé le pays, avaient produit cette campagne inédite … En quelque sorte ce flot de l'Histoire l'avait ressuscité. Mais Diallo se voyait aussi comme un survivant. Oui plus rien ne serait jamais plus comme avant...


20 : 00. Les visages apparurent sur les écrans télé. Le coeur de Diallo fit un grand bond !

À suivre...

Texte: Melvin Dia.

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