Rimes assassines

vmc

De loin, à distance, c'eût été comme une lâcheté, une demi victoire au goût d'inachevé.
Bien sûr le résultat eut pu être là, mais finalement, l'aboutissement importait peu.
Non, c'était bien l'approche au plus proche, la captation totale, l'absorption du feu,
capturer l'essence vitale, saisir la brume énigmatique, toucher le mystère de l'entité.

Fondre brusquement, comme l'oiseau de proie, sur la pâture innocente, terrorisée,
l'étreindre dans ses serres, l'étouffer sans la serrer, dans sa propre terreur séquestrée.
Plonger son regard au plus profond du sien, voler son âme, la voir s'étioler sous ses yeux.
Sentir son souffle, sa chaleur, son sang battre en baignant l'instant entre ses doigts vigoureux.

La tenir là, immobile et battante, le coeur mourant, expirant en quelques battements pieux,
voir dans son regard l’incompréhension, le questionnement, un voeu aux cieux,
muets, mur à prières, ex votos et sacrifices murés dans un entêtement silencieux !
Un silence funèbre, funeste, ceignant la vie qui mourrait peu à peu !

De son couteau banal, de sa lame sans larme, dans le coeur si simple, fragilisé,
devant tant de haine, battait à tout rompre sans fin, indécent, des flots dispendieux.
Il cherchait dans le regard mourant l’envolée vitale, la fuite de l’âme, tactile, sous ses yeux,
dans les yeux étonnés et crédules commençant à douter de Dieu, dans un silence résigné !

Les orbites virèrent ainsi que leur regard, à mesure que le teint sans oxygène, expirait au bleu,
dans la moiteur liquide abreuvant sa main d’un je ne sais quoi de jubilatoire, presque amoureux,
forçant à la garde dans un mouvement fiévreux, l’assimilation, la digestion maléfique,

curieux, jouissait de voler l’âme fragile, idiote, sous son envolée mystique !

Collé à sa proie mourante, il n’avait capté qu’une once de la vie expirante,
son souffle, sa tiedeur, ses questions sourdes suppliantes
une idiote trop muette, mourante trop absente.

Demain sans faute, il réitérera sur une autre passante....

... jusqu’à capter enfin le fantôme de ce moment divin
saisir le passage de la vie vers un horizon lointain ?
Toucher du doigt sa peur propre, son propre malheureux lendemain !

Signaler ce texte