Romance à deux voix

pierrederosette

Texte pour illustrer le tableau Colin Maillard, pour le concours Fragonard

Romance à deux voix

 

Le beau petit marquis

Et la petite marquise

Jadis follement épris

D'une passion si exquise

Malgré le poids des ans

Et l'ombre des amants

Près du feu qui crépite

S'aiment encore tendrement.

 

Ils sont vieux aujourd'hui,

Leur voix n'est qu'un soupir

Mais la petite marquise, et le petit marquis

Près de l'âtre qui luit

Evoquent leurs souvenirs,

Délicieuse rêverie :

 

 

Elle :

Sous les ramilles

De la charmille

Le beau Camille

M'entretenait

 

Il me disait des mots si doux

Des mots si fous

Des mots que vous

Ne saurez jamais

 

Lui :

Sous les rameaux

Près du hameau

Je lutinais

La belle Margaux

 

Je me souviens de sa pudeur,

Et de la discrète la rougeur

Qu'à son visage enchanteur,

Faisait monter mes quelques mots

 

Elle :

Il me parlait de mon cœur tendre,

Et du sien qui était à prendre,

Et de la nécessité, sans attendre

De les unir à tout jamais

 

Lui :

Les yeux baissés, elle se taisait,

Mais son sourire la trahissait  

De moi je la sentais s'éprendre.

Je cherchais alors un bosquet

Où cacher nos naissants secrets

Loin des regards indiscrets

De nos camarades braillards

 

Elle :

Alors en fin d'après midi

Il m'éloigna de nos amis,

Et de leur Colin-Maillard

 

Seul nous vit nous éloigner,

Avant que nous fussions cachés,

Derrière un buisson de laurier

Le facétieux Fragonard…

 

Lui :

Fragonard, mon vieux frère,

Trouveras-tu jamais la couleur ?

Trouveras-tu le trait, la manière

Pour peindre ce tableau enchanteur ?

 

A la palette, et au pinceau

Sauras-tu rendre la magie

Du délicieux après-midi,

Où la petite Margaux

Offrit ses lèvres au jeune marquis ?

 

Qu'il était beau l'amour !

Et qu'elle était bien douce

La belle à qui, en douce,

Moi je faisais la cour !

 

Elle :

Qu'elle était tendre la vie !

Et qu'était beau l'amant

Qui me disait tendrement

Qu'il me trouvait si jolie !

 

Ensemble :

Et sous ces frondaisons,

D'autres amants viendront

Qui comme nous s'aimeront

Et que tous oublieront

 

Fragonard, immortalise

Nos amours présents,

Pour que dans deux cent  ans,

Le beau Camille et sa marquise

Fassent encore frissonner les amants.


Ensemble, l'un à l'autre :

Toi qui fût tout ma vie

Tu es ce soir toute mon âme

Et au seuil de l'éternelle nuit

Laisse-moi être toute ta flamme…

 

Camille et Margaux, dans l'air du soir

Évoquaient cette lointaine journée

Avec comme témoin de leur premier baiser

Une toile délicieuse signée Fragonard,

Qu'éclairait faiblement un feu cheminée...

 

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