Royaume décadent

maximed

Le pavé était humide et le temps plutôt mitigé. Le soleil, ce fier astre de lumière d’habitude étincelant, était en cette froide journée d’hiver caché derrière une couche de nuage qui ne laissait filtrer qu’une poignée de rayons. Les employés de la boutique aux esclaves, quant à eux, suivait l’immanquable routine du levé de rideau. Certaines marchandises, profitant du maigre répit que le pays de Morphée offrait, furent réveillées par l’odeur alléchante qui venait du magasin face à leur foyer. Leur ventre criant famine, on du rapidement les nourrir à grand renfort de soupe chaude. Piètre nourriture pour n’importe quel sorcier mais, pour ces êtres dont le seul but était de servir son prochain, ce maigre velouté de légume signifiait la fin d’une torture atroce qui rongeait les entrailles depuis quelques heures déjà. Les plus affamés se jetaient sur les écuelles qui leur était déposé grâce à un ingénieux mécanisme de trappe car, bien évidement, aucun vendeur n'oserait entrer dans les cages qui retenaient captif les esclaves, question de sécurité oblige. C'est donc avec un air résigné qu'une femme âgée d'une quarantaine d'années arpentait les rayons, traînant derrière elle un chariot où reposait un chaudron.

Insensible aux lapements qui l'entourait, l'Awiel prit le temps de s’asseoir en tailleur avant de saisir son bol à deux mains, profitant ainsi du maigre réconfort que lui offrait la chaleur que diffusait son breuvage. Contrairement aux autres prisonniers, il n'abordait pas cet air sinistre commun à tant d'autres personnes dans son cas. Lui savait rester optimiste, essayant de garder le sourire afin d’accroître ses chances d'achats. Essayant de ne pas paraître négligé, il arrivait à garder un semblant de propreté par rapport à ses congénères. De plus, il se plaisait à berner ses sens en s'imaginant goûter les merveilleuses sources des différentes odeurs qui se répandaient par la porte entrebâillée. Avec émotion, il se rappela du dernier vraie repas qu'il avait pris en compagnie de maîtresse. Le goût des pommes de terres, le grand fondant lentement sur la langue du jeune homme, un nombre incalculable de sensation s'était ainsi gravé dans la mémoire de notre optimiste esclave. Goûtant sa soupe du bout des lèvres ; il se mit à observer la foule de ses yeux vairons, s'amusant à imaginer le foyer de chaque personne la constituant. Certains semblaient vivres dans des palaces, au vue des armoiries qu'il abordait fièrement sur leurs habit de cuir. D'autres, plus discret, se frayait un passage à travers cette marée humaine. Probablement des maris infidèles, essayant de s'absenter le moins de temps possible du domicile familial.

Après quelques minutes de jeu, les yeux du jeune homme se plantèrent dans ce d'un homme à l'apparence lugubre. Ne semblant pas gêner le moins du monde, l'homme observa le garçon quelques secondes avant d'esquisser un pas de danse. Du moins, c'est ce que crû l'Awiel, tant la manière de se mouvoir de cet étrange individu était singulière. Bougeant tel l'eau sur du granit, ce dernier savait prévoir les mouvements de foule et semblait s'amuser avec elle dans un jeu dont les règles étaient parfaitement maîtrisées. Appréciant le spectacle en public attentif, le jeune esclave faillit ne pas voire la fiole qui glissa des mains de ce sombre artiste urbain. Le récipient, qui avait une apparence normale, se brisa dans un bruit cristallin, libérant quelques instant plus tard un liquide ambré. Contrairement à toutes attentes, pas une once de colère ne traversa son propriétaire. Une odeur nauséabonde se fit alors sentir tendis que les passant s'écarter prestement de cette flaque à l'apparence salissante.

Mais étrangement, personnes ne remarquaient le tremblement imperceptible du sol, comme en témoignait le ménisque frémissant des diverses liqueurs présentes sur le comptoir de la boutique, alcool qui était offert à chaque transactions avec quelques clients fortunés. Bref, ce fut dans l'incrédulité la plus totale que surgit d'une rue parallèle un être difforme, diverses excroissances purulentes ayant poussées sur son dos nu.

Derrières lui ce tenaient une dizaine de sorcier téméraires armés, essayant de venir à bout de cette créature vraisemblablement née dans les enfers souterrains d'Ombreville. Tendis que la foule fuyait dans un concert de crie apeuré, les sorciers laissaient déchaîner un flot de magie destructrice sur cette abomination. Ce n'est qu'au terme de quelques minutes de sanglant combat qu'un sortilège bien placé fit exploser les pustules dorsales de la créature. La réaction entre le liquide sortant des blessures de la bête et la chaire des combattants fut horrible à voir. La peau qui était auparavant d'une couleur tout à fais normal passa rapidement au violet, gonflant peu à peu jusqu'à briser les os son porteur. Le terrifiant bruit se répercuta dans la rue désormais vide de monde, glaçant les entrailles de L'Awiel. Lui qui essayait de garder bonne figure était intérieurement apeuré par l’événement qui venait de se dérouler devant lui. Malgré sa connaissance de la rue, c'était la première fois qu'il voyait par lui même un de ces déchets arcaniques chassé par des aventuriers en manque de gloire et de richesse.

Horrible destin que d'être transformé de façon inévitablement pas des flux magiques. Mais c'était les règles de ce royaume décadent, où chacun était susceptible de perdre la raison après un certains temps d'exposition à la magie...

Une fois cette pensée balayait, le jeune homme reporta son attention sur les vendeurs, le contre-coup de leur trop plein émotionnel se faisant déjà sentir. Sortant des paquets de tabacs aux différentes vertus ventés par leurs emballage, les hommes se retrouvèrent dans l'arrière boutique tendis que la seule femme présente se servait un verre de liqueur, surveillant son royaume...

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