Scène - Maquis
novembre
La scène est à la nuit étoilée du maquis ivoirien. Depuis les rades en bois et en tôles de la buvette, des dialogues truculents épicent l’ambiance de la boite de nuit à ciel ouvert, qu’enluminent par leurs couleurs vives, variées et postées des lampions et des guirlandes d’ampoules peintes – rouges, vertes, violettes. Des ombres dansantes se jettent aux façades brûlées des cases de pierres et de terre rose, ocrées qui cadrent la fête. Sous l’unique palmier de l’arrière-cour, qui trempe dans le vent tiède, on entend les accents relevés des fêtards en chemises blanches se dandinant doucement sur le son disco, on chancelle un moment à l’odeur agressive de leurs eaux de Cologne cheap. Sur la piste de danse, les corps découverts sont beaux, lents comme des plantes tropicales, ralentis dans la moiteur en d’eurythmiques langueurs : leurs épaules puissantes comme des pommeaux d’épées et leurs jambes démesurées nocturnement délèguent leurs puissances à des bras nus gorgés de muscles et de soleil. Au bout de la nuit, centre de la fête, la voyelle étoilée – le nombre gravite autour d’elle – est défaite en son adolescence. Les reflets des gammes sur sa peau la font sonner comme un hallali aux insurgés ; au devant de sa sonnerie éblouissante comme une éclipse, les hyènes aux yeux de phosphore roulent leurs rires poussiéreux, les panthères déroulent leurs virilités ténébreuses. Puis les gestes souples et les mines tannées se poursuivant sur le plateau de l’après-nuit, elle, le cœur gonflé comme une voile, par les venelles sablonneuses du village s’en retourne vers sa case beige, les ombres de ses jambes épointées comme des compas dansotant encore sur les murs et les sables bleus.