Toute en Nuances

ysalis-ks

Toute en Nuances.

6h15. Bientôt, le jour allait se lever. Par la fenêtre ouverte, le vent, caressant et léger, rafraîchissait la pièce et me faisait doucement frissonner. Sensation agréable et apaisante.

J'étais allongée tout contre mon amant endormi ; c'était notre première nuit ensemble. Nous avions décidé que nos rencontres resteraient des heures hors du temps, volées à notre quotidien. Grâce à ces retrouvailles incertaines, parfois dans l'urgence, le désir ne serait jamais terni par nos vies monotones et pourtant trop agitées. Cela dit, souvent, nous prenions aussi le temps de disserter sur divers sujets... Après avoir été diabolique, Gabriel devenait mon ange.

Je repensai à ce qui m'avait amenée dans ce lit. Tout avait commencé avec un message reçu un soir, suite à une après-midi particulièrement intense. « Tu me plais à chaque fois un peu plus. Chaque visite apporte une nouvelle couleur... et je les aime toutes », m'avait-il écrit. J'avais alors imaginé quels pouvaient être ces camaïeux, et avais décidé d'instaurer un jeu pour nos prochains tête-à-tête : Gabriel devrait deviner mes attentes, envies et émotions à la couleur de ma lingerie. Je lui avais exposé mon souhait et il avait accepté, intrigué.

Il avait été à la hauteur de mes espoirs. Il aimait m'effeuiller lentement, se donnant le temps de me découvrir pour me redécouvrir, toujours différente.

Un jour, en dentelles couleur crème, telle une jeune mariée, j'avais prétendu ne vouloir que de la tendresse, de la délicatesse. On aurait presque pu croire à ma pureté. De ses lèvres douces et ourlées, mon partenaire m'avait offert une parenthèse rafraîchissante. Et m'avait privée de certains plaisirs qu'il avait fait mine de juger trop osés. Telle était prise qui croyait prendre !

Une autre fois, je m'étais imaginée rose bonbon. Bonbon à croquer ? Seins sucrés à lécher, et tactiques gourmandes incitant à sucer... Roses aussi, les marshmallows complices de nos amusements.

Broderies chocolat ? Chocolat, pour plus de sensualité encore : nos souffles et nos langues mêlées, les mains de mon amant pour d'exaltantes caresses. Le goût de sa bouche, le parfum de sa peau, et les frissons qu'il avait fait naître chez moi. Ce jour-là, il m'avait bandé les yeux, attaché les poignets dans le dos avec des rubans de satin, et tout fait pour exacerber mes sens.

Dessous bleu-ciel, envie de bleu du ciel, d'évasion, d'eau. Gabriel, sur un coup de tête, m'avait emmenée à la mer, et j'avais pu profiter de la plage hors saison. Le vent, le bruit des vagues, l'odeur du sable... je m'étais faite chatte au soleil d'automne, je savais que mon mâle appréciait.

Le noir avait été tout à l'opposé du deuil : j'étais devenue provocante, pour des heures de séduction, à explorer de nouveaux désirs jusque là gardés secrets. Me révéler, oser et célébrer la vie, telle était l'idée. J'avais senti la voix grave de mon homme troublée, tandis que je lui dévoilais guêpière, porte-jarretelles et bas...

Dans cette indécente progression était ensuite venu le rouge. Imprudente, j'avais encouragé de délicieuses tortures, recherchant dans ces expériences brûlantes une nouvelle liberté. Mon tortionnaire m'avait promis ces instants infimes où l'on oublie tout, et il avait tenu parole.

Le bleu-vert avait marqué un retour aux confidences. J'avais besoin parfois de murmures, de mots doux, avant ces silences rassurants où il n'est plus besoin de parler. J'avais trouvé, en écoutant bien, quelques notes de sérénité... Puis nous nous étions endormis, corps rapprochés, doigts emmêlés, profitant d'une courte sieste.

Et il y avait eu « aujourd'hui ». Je ne portais rien, sous ma robe longue en tissu Liberty. Sous ces fleurs de toutes les couleurs, j'étais nue, confiant à Gabriel qu'avec lui, je me sentais acceptée « absolument » : il comprenait et aimait en effet toutes mes nuances.

Je m'étais laissée aller sous ses mains, lui offrant mes courbes. Les heures avaient passé. Nous avions envie de prolonger cette complicité... j'étais restée dans ses bras pour la nuit, malgré ce que nous avions convenu depuis plusieurs mois.

6h30. Bientôt, le soleil peindrait le ciel en bleu marine, rajoutant un peu plus tard quelques touches de mauve sombre, avant de se fondre en teintes plus douces, roses, dorées et turquoise. Seule éveillée, je profitais de l'obscurité calme, songeant à cette « première nuit », marquée d'un sentiment nouveau...

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Texte initialement publié sur le site NeoPlaisir - participation à un concours.
http://www.neoplaisir.com/sexyblog/Le-webzine-des-sextoys-et-de-toute-lactu-coquine/concours-decriture-erotique-2012/concours-decriture-erotique-2012-texte-19-dysalis-k.s..html

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