"Toute ma vie j'ai rêvé d'être une hôtesse de l'air, mais pas d'avoir un cancer du sein" et suites
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"Toute ma vie j'ai rêvé dêtre une hôtesse de l'air, mais pas d'avoir un cancer du sein" et suites
PROLOGUE
Toute ma vie……………j’ai écouté et observé les autres plus que moi-même.
Aujourd’hui c’est devenu une nécessité il faut que je parle de moi.
Je ne suis pas un écrivain ou alors en gestation, une gestation aussi longue que celle d’un éléphant.
J’ai d’abord voulu m’adresser à mes enfants en me disant que si je venais à disparaître, je me devais de leur laisser une trace écrite de ma vie.
J’ai toujours eu le regret que mes parents et grands-parents n’aient pas écrit ce qu’ils avaient vécu: deux guerres mondiales pour mes grands-parents maternels, l’exode de Russie et les deux grandes guerres pour mes grands-parents paternels, une guerre mondiale pour mes parents.
Le fait que mes grands-parents paternels fussent juifs et révolutionnaires en 1915 avant la révolution de 1917 et donc contraints de fuir ajoutait à ma curiosité.
Mon père, lui avait été résistant et avait aidé des juifs à passer en zone franche, il avait même été emprisonné pendant la guerre à la prison des Tourelles à Paris.
Mon grand-père maternel, chargé de famille et trop âgé lors de la seconde guerre mondiale avait été gardien de l’Arc de Triomphe
Mais de tout cela je n’ai que peu de souvenirs et encore moins de récits.
J’ai toujours pensé qu’il aurait fallu pousser cette famille « atypique » (un euphémisme dans le cas de ma famille) à écrire ou enregistrer leur histoire sur un magnétophone.
Pourquoi ne l’a-t-on pas fait ?
Actuellement en matière de mémoire familiale, il ne me reste que Maman et Lydia la seconde épouse de mon père que je m’empresse de questionner et qui cautionnent ou non mes souvenirs.
Et puis pourquoi ce titre, hommage à Jacques Dutronc ?
Et bien oui je suis de cette génération ou l’on rêvait d’être hôtesse de l’air et ce rêve, si peu ambitieux soit-il pour certains, je l’ai réalisé.
Par contre avoir un cancer du sein je n’en n’avais aucune ambition.
Alors ce que je souhaite avec ce récit c’est dédramatiser cette maladie et faire découvrir ce qu’est le quotidien d’un malade.
Expliquer, décrire, tenter d’analyser c’est enlever une part d’angoisse crée par la peur de l’inconnu.
Si ce récit n’a que cette utilité il aura atteint son but.
Le 23 octobre 2009
Aujourd’hui c’est ma cinquième chimiothérapie! Cela fait réfléchir.
J’ai appris le 15 avril de cette année qu’une « petite tumeur » cancéreuse (au début les médecins vous disent toujours qu’elle est petite et sans gravité: effet d’annonce et consultation d’annonce) poussait dans mon sein gauche.
En fait de « consultation d’annonce », les médecins étant souvent absents lors des vacances scolaires, en l’occurrence c’était celles de Pâques, ce n’est pas la radiologue qui avait effectué ma mammographie annuelle de contrôle (j’avais fait le choix de l’annualité des contrôles: grand bien m’en a pris) qui m’a reçue mais son collègue masculin, très bel homme genre bronzé par le ski et sûr de lui, qui m’a annoncé sans fioriture le diagnostic.
Aurais-je préféré une véritable « consultation d’annonce » ainsi qu’il l’est recommandé dans tous les fascicules concernant le cancer?
Je n’ai pas la réponse à cette question, n’en n’ayant pas bénéficié.
Ce qui est sûr c’est que lorsque je suis sortie de ce rendez-vous il pleuvait et j’ai appelé Jean mon compagnon en lui demandant de venir me chercher j’étais venue en tramway.
Je lui ai dit que c’était à cause de la pluie, mais en fait j’étais tellement abasourdie que j’avais besoin d’une présence.
Après une intervention le 24 juin 2009 par une jeune chirurgienne très compétente et un diagnostic déjà moins favorable puisque de 8 millimètres la tumeur est passée à 3,7 centimètres avec un curage axillaire car neuf ganglions sur dix-sept étaient envahis.
Le pronostic « sans doute sans chimiothérapie post-opératoire » est devenu six séances de chimiothérapie, un mois et demi de radiothérapie et cinq ans d’hormonothérapie.
« La totale! » aurait diagnostiqué Eddy Mitchell avec son ironie que j’apprécie beaucoup.
La convalescence post-opératoire terminée nous avons passé deux semaines dans ma maisonnette de la vallée des Baux, puis quelques jours chez ma sœur près d’Alès.
Au mois d’août pour exorciser la maladie, pour réaliser mon fantasme d’écriture ou parce que j’ai réalisé que la mort ce n’était pas que pour les autres (auparavant j’avais toujours cru en ma bonne étoile), j’ai décidé qu’il fallait que je raconte ma vie à mes enfants, mes proches, à ceux que je pouvais quitter.
Mon optimisme inné n’était pas entamé mais l’idée de ne pas leur laisser cette trace m’était intolérable.
Et puis Jean, mon compagnon depuis deux ans, par discrétion ou peut-être parce qu’il n’en n’éprouve pas la nécessité, connaît peu mon passé.
Alors j’ai commencé à décrire de façon très factuelle sur mon cahier d’écolière, ma naissance, mon enfance et je me suis arrêtée avant l’adolescence.
C’est là que je me suis rendue compte que cette enfance à la fois « dorée car argentée » lorsque je la comparais à celle de Jean et ternie par le divorce de mes parents, j’en gardais peu de souvenirs car je pense en avoir occulté beaucoup d’épisodes.
Ma sœur Sylvie d’un an mon aînée, pourtant trahie à l’école par son manque de mémoire, est inépuisable sur notre enfance.
Et moi qui dispose d’une très bonne mémoire, je n’en n’ai pas pour me souvenir de mon enfance.
Il y a comme un blocage des faits dont je ne veux pas me souvenir: une mémoire sélective.
Alors à quoi bon raconter une histoire qui certes m’a construite mais dont je n’ai pas forcément envie de me souvenir.
De plus je ne suis pas et n’ai jamais été tournée vers le passé: le propre des optimistes qui, lorsqu’ils ont des problèmes pensent toujours que demain sera meilleur.
Et puis le paradoxe n’est pas ma tasse de thé, breuvage que j’adore et que la chimio m’empêche de boire.
Pourquoi me forcer à raconter le passé alors que c’est l’avenir qui me préoccupe actuellement?
Je bouillonne de sentiments contradictoires: je suis une contradiction à moi toute seule.
Depuis l’annonce de ma maladie je me tourne vers le passé mais ne veux envisager que l’avenir.
Je me révolte d’être malade: pourquoi moi et pas une méchante: il y en a tellement!
Et en même temps je suis fataliste: je suis malade, je suis dans la maladie et il faut que je me soigne.
Le problème c’est que je ne sais pas vraiment qui aura l’envie, la gentillesse de me lire: mes proches, mes amis, et si c’était comme j’en rêve plein de lecteurs anonymes touchés par ma maladie.
Ou alors plein d’hôtesses de l’air en devenir ou dans les airs?
Car j’aimerais être publiée, que plein de gens découvrent ce qui explose en vous quand à 60 ans, jouissant d’une bonne santé physique et mentale, refaisant votre vie avec un nouveau et adorable compagnon avec plein de projets en tête, une retraite tout juste prise ( en décembre 2008 ), vous ne pensez qu’à prendre l’avion, non plus de manière professionnelle mais pour votre propre plaisir.