Une soirée

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Une soirée de plus où elle espérait s'amuser. Elle  partait à la rencontre de nouvelles personnes, pour ne pas s'ennuyer toute seule chez elle constamment. Elliane cherchait vainement à retrouver ce qu'elle ressentait avec ses amis dans le passé. Mais tout avait changé quand elle avait déménagé dans une nouvelle ville. Nouvelle ville : nouvelles études, nouvelles personnes, se réhabituer, retrouver ses marques. Elle avait rencontré des gens agréables, mais ce n'était pas la même alchimie qu'avec le groupe dans la ville précédente.

Cette fois là, Elliane avait été invité par un garçon qu'elle avait croisé une fois. Elle ne connaissait personne donc, mais c'était l'occasion de faire des rencontres. Elle était arrivée à 22 h, elle était donc passée inaperçue, la fête ayant déjà bien commencée. Tout le monde était rassemblé dans le salon de l'appartement, autour de la lumière tamisée. Il y avait une piste de danse improvisée sur sa droite, quelques uns étaient assis sur le canapé et les fauteuils sur sa gauche, un verre à la main droite et des cartes à la main gauche. D'autres étaient près de la table pleine à craquer de bouteilles d'alcool, vides pour la plupart. Un peu de chips aussi mais pas grand-chose par rapport à la quantité de boissons. Elliane rajouta sa bouteille sur la table, sachant pertinemment qu'elle n'en boirait pas une goutte. Elle se dirigea vers la piste et commença à danser. Elle aimait bien danser, même si elle avait l'impression totale de ne pas savoir. Elle passait outre. Un gars avec qui elle avait parlé vaguement en arrivant, avait commencé à danser avec elle. Ça ne la gênait pas tant qu'il restait à quelques centimètres d'elle. Elle était un peu prude sur les bords, encore innocente malgré ses vingt ans passés, cela la paralysait totalement. Plus petit qu'elle, un peu carré, un visage avenant, il ne lui faisait pas horreur mais ce n'était pas non plus son type. Ils avaient dansé ensemble sur quelques chansons, jusqu'à ce qu'il se rapproche un peu trop pour qu'elle le tolère. Elle partit de la "piste" pour aller dans la salle de bain.

On entendait la musique en bruit de fond derrière la porte, le rythme entêtant d'un "boum-boum-boum". Cette salle de bain était sympa. Elliane aurait aimé la même : une super baignoire à l'ancienne avec des pieds en bronze, un évier de la même matière que la baignoire, un miroir qui prenait presque toute la surface du mur devant l'évier. Pour une fois qu'elle pouvait se voir en entier dans un miroir sans avoir besoin de se mettre sur la pointe des pieds. Elle n'avait pas fermé à clé la porte, pas besoin, elle était juste là pour réfléchir. Elle alluma le robinet d'eau froide et le laissa couler, observant attentivement son reflet, ses deux mains appuyés sur le rebord du lavabo. Elle faisait à peine 1 m 60 et pesait un petit 45 kg. Elle semblait si fine, si fragile. Ses yeux bleus étaient joliment maquillés, relevant leur clarté. Sa bouche était couverte d'un rouge brut dans la mode des années 50, et ses cheveux noirs encadrant son visage en faisait ressortir la couleur. Si quelqu'un avait été avec elle, dans cette salle de bain, à ce moment là, deux sentiments contradictoires l'aurait envahit. Il aurait voulu la prendre dans ses bras pour la rassurer et lui redonner un peu de joie. Et de l'autre côté, il aurait eu l'impression qu'un simple effleurement de son corps l'aurait brisé en milles morceaux. Elliane avait le cerveau bouillonnant, trop de pensées se bousculaient dans sa tête, se demandant principalement ce qu'elle faisait là. Pourquoi insister quand rien n'arrive comme on le voudrait. Elle se disait à ce moment qu'elle ne devait pas être assez bien, assez sympa, assez joyeuse pour les autres, et qu'ils ne voulaient pas lui rendre ce bonheur de vivre qu'elle essayait de leur transmettre. Ce n'était pas uniquement une pensée dû à la soirée, c'était ce qu'elle se disait chaque jours.

Pendant qu'Elliane refermait le robinet, et par la même occasion, le fil de ses pensées, quelqu'un est entré dans la salle de bain. C'était une jeune fille appuyé sur un garçon. Le garçon n'était autre que celui qui l'avait invité : Mattis. Il semblait tracassé par l'état de cette jeune fille. Et c'était compréhensible, elle était complètement ivre, toute blanche et poisseuse de transpiration. Il l'appelait Sophia, lui disant de se ressaisir. Elliane proposa à Mattis de le remplacer auprès de la jeune fille. Il la remercia, soulagé, et les laissa seules toute les deux. Sophia commença à pâlir de plus en plus et vomit dans les WC avec une grimace de douleur. Elliane lui tenait ses cheveux et ses épaules pour ne pas qu'elle s'écroule. Ses pensées revinrent rapidement. Il n'y a pas si longtemps que ça, peut-être un peu plus d'un an, elle avait cette même habitude que Sophia. Boire. Boire pour oublier son manque de confiance, boire pour oublier qu'elle ne s'amusait pas tant que ça, mais tout de même un peu. Même si ce n'est que l'euphorie donné par les vapeurs d'alcool. Et elle finissait toujours par vomir ses tripes et se sentir si mal qu'elle restera couché presque tout le lendemain. Elle ne savait pas vraiment ce qui l'avait résolu à arrêter ce rythme de vie. Surement en partie à cause de sa maladie d'estomac. Peut-être aussi grâce à lui. 

Sophia resta malade pendant une bonne partie de la soirée.  Quand elle semblait aller un peu mieux, Elliane l'asseyait et lui passait un gant d'eau froide sur le visage. Elle voyait progressivement la clarté se faire dans son esprit, à travers ses yeux. Elle avait déjà eu une expérience dans ce genre à une de ces soirées. Un gros trou noir entre un énième verre bu et la période flou dans la salle de bain. Personne n'avait été là pour elle à ce moment. C'était quelques temps avant sa rencontre avec lui et tous les autres. Ils s'étaient rencontré à une fête organisée par un organisme mais où personne ne se connaissait vraiment. La parole s'est délié facilement grâce à l'alcool. De fil en aiguille, Elliane avait fini par oublier une partie de la soirée et s'est retrouvée dans une chambre inconnu, un lit inconnu. Heureusement, personne avec elle dans ce lit. Elle était chez un gars qui habitait juste à côté du lieu de la soirée. Son nom à lui, c'était Guillaume. Il était toujours calme et silencieux. Parfois trop silencieux et on se demandait alors quoi dire. Elliane avait compris au bout d'un moment que ne rien dire ça allait aussi pour lui. Et ils se sont rapidement rapproché tous les deux. De simple connaissance, ils sont devenus amis, et ensemble ils ont grandit. Elle ne buvait plus, lui ne fumait plus. Bien sur ça ne s'est pas fait en un jour. Elliane aurait tellement aimé plus. Mais Guillaume ne souhaitait pas l'encourager dans ce sens car leur amitié lui suffisait.

Les yeux de Sophia indiquaient clairement maintenant qu'elle était suffisamment lucide pour rentrer chez elle. Elliane l'aidait à se relever et la soutenait jusque dans le salon. Elle attrapait les affaires que lui indiquait Sophia. Mattis les avait aperçu,  prêtes à partir. Il vint leur dire au revoir. "Merci d'avoir été là! J'espère vraiment qu'on se reverra." Il embrassa sa joue avec tellement de tendresse. Elle se remémora alors Guillaume. Il lui avait un jour proposé de la rejoindre à la sortie de la Fac. Il lui avait fait la bise avec sa douceur habituelle, et ils marchèrent quelques minutes. Installés tous les deux sur la terrasse d'un café, sous le soleil du printemps, il semblait pour la première fois gêné d'être avec elle. "Je sors avec quelqu'un depuis quelques temps". Le silence qui régna à ce moment, le força à continuer, alors que depuis des mois il s'y complaisait. "Je tenais à te le dire en premier parce que je sais que tu m'apprécie beaucoup et je ne veux pas que tu en subisses les conséquences.". Elliane devait accepter la situation sans avoir la possibilité de râler contre quelqu'un d'autre qu'elle même, il avait été encore une fois trop gentil pour qu'elle puisse le blâmer. Sans rien répondre elle avait payé sa consommation et avait repris seule le chemin jusque chez elle. 

Sophia dû à son tour soutenir Elliane, qui s'était mise à pleurer sans raison en sortant de chez Mattis. Elle lui raconta toute l'histoire, et elle s'en retrouva allégée. Sophia lui proposa de rester dormir chez elle. Depuis que Guillaume lui avait annoncé ce soir là qu'il sortait avec une certaine Charlène, Elliane voulait pleurer mais pas une seule larme n'avait coulé sur ses joues. Et depuis, seule une grosse boule dans sa gorge se manifestait parfois quand elle y pensais. C'était la première fois, et surement la dernière, qu'elle se laissait aller. Cela l'avait libérée.

à suivre    

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