Mal

sesortirlesdoigtsducoeur

La réalité nous échappe souvent, mais nous, nous ne lui échappons jamais.

Connaissez-vous ce moment où l'on se rend compte que notre vie part en lambeaux ? Où l'on sait que le pire n'est pas passé mais reste encore à venir ? Nous sommes là, sans repères, et l'on ne peut rien faire si ce n'est attendre la déchéance. La volonté, le travail, l'acharnement ; quand rien ne saurait modifier notre destin et ses jours sombres ? Nous avons la sensation d'être une épave, un vieux chien galeux abandonné sur une aire d'autoroute. Les voitures, les gens, les vies et les destins passent et s'effacent, le jour se lève et la nuit tombe, mais nous sommes immobiles, au milieu de tout ça, de toute cette violente agitation, et faisons du sur-place. La lumière du soleil, l'éclat des étoiles ; non, plus rien n'aide à avancer. Notre âme est lourde, notre esprit comme séparé de notre corps, notre cœur ne cesse de trembler, et une douleur constante nous submerge ; comme un pieu enfoncé dans la poitrine. Ça hurle, ça secoue, nous ne sommes absolument plus maîtres de nos émotions. Quand un sourire arrive enfin à s'esquisser assombri, il disparaît aussitôt. Comme aspiré par un trou noir, comme noyé par les océans. Le temps est tout à la fois, rapide, lent, vide et plein. Chaque image semble être déjà vue parce que l'on souhaite que tout appartienne au passé.

Mais dans tout cet horrible chaos, on espère. Oui, l'espoir ne nous quitte jamais. Nous n'avons plus que lui, il est notre rempart, notre repère, notre boussole. Pourtant nous savons que cet espoir est inutile, infondé, inconcevable. C'est là que des larmes commencent à couler le long de nos joues, que notre tête nous donne l'impression qu'elle va exploser. Nous ne pouvons rien faire, parfois même notre destin et notre propre vie ne nous appartiennent plus. Nous ne pouvons que rester des témoins passifs et impuissants de notre existence. Nous vivons à la troisième personne, avons la sensation d'être observés à travers une vitre sans teint. Manipulés, tel des marionnettes. Non, tout cela ne peut être réel, cela ne peut m'arriver. Cela ne peut lui arriver. Et pourtant si. La réalité nous échappe souvent, mais nous, nous ne lui échappons jamais.

Si vous êtes dans ce cas là, espérer reste pourtant votre unique chance de survie.

Espérez, supportez et avancez.

Signaler ce texte