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S P Bonal

42 Wall&Martins Street, 10 heures. Wall&Martins Street était un quartier où résidaient les personnes à fort revenu. Ce charmant quartier héberge des hommes et des femmes vivant dans l’opulence et la luxure. Bon nombre de ses gens exercent dans les hautes sphères, profitant de la classe moyenne qui crevait de faim dans des appartements miteux. À cette époque, où la crise s’installait dans tout le pays, les pauvres se voyaient encore plus pauvres. Les puissants les dilapidaient de tous leurs biens petit à petit. La victime, monsieur Franz Uzel, était un grand pianiste. Il était réputé pour son doigté de génie. Dans ce cercle privé, les riches, il était une légende. Il était convié aux soirées les plus branchées, les plus somptueuses de L.A. à cinquante ans, il enchaînait les cocktails onéreux et les bales mondains. En cette matinée froide et humide, le pauvre homme se balançait au bout d’une corde de piano. En fond le Requiem de Mozart criait dans tout le salon. Le Kyrie Eleison tournait en boucle sur le vieux tourne-disque. Une ambiance lugubre planait dans la maison, le salon était peu éclairé. Seules quelques bougies faisaient office d’éclairage. Une lettre manuscrite trainait sur le coin d’une table en bois massif. - Mon dieux que c’est sinistre ici ! Arrête la musique John, l’ambiance est assez pesante comme ça. - Tu n’aimes pas le classique aussi ? s’enquit John en relevant le bras du tourne-disque. - En effet, je préfère le jazz ! Mon père était un mordu de Jazz et ma mère de classique. - Donc tu as baigné dans le classique ! - Oui, je ne dis pas le contraire, mais je n’aime pas ça ! Le légiste arrivait en blouse blanche chargé de matériel. - Si je peux donner mon avis, il faut écouter les deux ! Savez-vous que la musique procure du bien à l’esprit ? Il guérit l’âme ! - Pouvons-nous centrer sur le pauvre bougre pendu ? - Prestement Matthew, nous avons tout notre temps, le pauvre homme ne prendre pas la fuite. Juste en voyant le corps, le pauvre homme s’est pendu lui-même. Il n’y a rien d’autre à ajouter, il y a aucune trace de lutte. - Quoi ? Rien que ça ? - Tu t’attendais à quoi ? Il ‘n y a pas que des meurtres sanglants ! C’est votre première affaire, Warren a jugé bon de vous donner une affaire simple. Et chaque enquête mérite d’être élucidée. Je ferais une autopsie plus avancée à la morgue, mais la fin sera la même : ce pauvre diable s’est suicidé. Une pauvre femme pleurant à chaude larme se tenait devant la maison. Matthew et John bloc note en main marchaient d’un pas décidé vers elle. - Bonjour, madame, vous êtes la voisine qui nous a contactés ce matin ? - Oui, c’est une tragédie ! Pauvre monsieur Uzel, comment a-t-il pu commettre l’irréparable ? - Vous savez madame, parfois nos proches n’osent pas nous parler des problèmes qui les hantent. Ils les enfouissent au plus profond de leur esprit et attendent le dernier moment pour nous le révéler. Mais en général il est trop tard. Ces personnes sont imprévisibles, vous n’êtes en aucun cas responsable. La voisine, madame Summer, prenait place sur le divan. - Je le connaissais depuis plus de dix ans ! Je venais prendre le thé chaque après-midi chez lui pour lui tenir compagnie. Il était aimé de tous dans le quartier. - Avait-il des problèmes psychologiques ? demandait Matthew en notant chaque mot. - Pas que je sache monsieur. Il avait un réseau incroyable, des amis dans toute la ville. Personne ne voulait lui faire du mal. Qui plus est, il était un musicien de génie ! Je n’ai jamais vu une personne jouer aussi bien du piano. Il ne lisait pas de partition, il jouait tout simplement. Allez voir sa collection de vinyles. Il avait tout Mozart, tout Chopin et Schubert ! Nous passions des heures à en écouter en buvant le thé. Une fois fini, les deux inspecteurs quittaient la maison pour retourner aux bureaux. En conduisant, Matthew ne pouvait s’empêcher de repasser le dossier et le témoignage de madame Summer dans sa tête. - Il y a quelque chose qui cloche. - Comment ça, tu doutes pour le suicide ? rétorquait John en fumant une cigarette. - Dans le dossier dans la cinquième page, il est dit qu’il n’avait aucun suivi chez un psy. De plus il est stipulé à la dernière page en bas que monsieur Uzel selon ses amis était en parfaite santé mental et physique. Ce n’est pas cohérent ! - Comment fais-tu pour te souvenir de tous ses détails ? - J’ai une excellente mémoire visuelle ! Je me souviens de tout ce que je lis, vois. Ce n’est pas logique qu’il se soit suicidé. - Va raconter ça à toutes les familles qui ont eu un suicidé ! Le fondement même du suicide n’est pas logique pour une personne saine d’esprit! Pour la victime c’est normal, cela fait partie du raisonnement : je vais mal, tout est fini pour moi, donc je vais en finir. Ce n’est pas de chance pour ce pauvre bougre ! Alors on va passer une soirée au Blue Moon, tu vas voir des filles boire quelques verres et rentrer chez toi. Ce n’est pas le collègue qui te parle, mais l’ami ! Tu ne dois pas t’arrêter à ce genre de détails ! Je sais que tu n’as pas abandonné une seule enquête, mais là c’est différent. Le bonhomme c’est supprimé lui-même, si tu veux arrête-le. - Arrête avec ton humour à la con ! - Je veux t’aider Matth ! Cette affaire s’arrête là, allons au Blue Moon profiter d’une soirée torride. En arrivant au Blue Moon, les employaient saluaient les inspecteurs. John entrait en roi, il criait de joie. - Regarde ! Nous sommes les rois ici ! La musique hurlait, l’ambiance frisait l’hystérie. Les hurlements et les rires se confondaient. L’alcool coulait à flots et les filles étaient ouvertes à toutes sortes de pervertirons. Cette folie générale s’étendait dans tout le pays. Afin d’apaisé les esprits, la ville proposait aux basses gens de se pervertir à bas coût. Cette tendance obscène maintient le peuple, pendant que les puissants continuaient à les saigner. Même si l’âge d’or apportait joie, folie et luxure, elle pourrissait l’esprit et le cœur des êtres. Cette ville où tout était possible assassinait secrètement ses habitants.
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