5-Jenny ou l'Impensable Réchauffement

Christian

Les cendres de Jenny seront donc répandues, par un officier de justice, mercredi, dans 3 jours au jardin des souvenirs du Cimetière de Dublin".

 

Manchester

De retour au bureau, Ralph déplie l'affiche avec l'E.T des ufologues.
Une rapide recherche sur google et il trouve le site de cette association d'ufologie.
Il y trouve le nom de son président, l'association vient d'en changer. L'actuel président porte bien le nom de John Stoe que Jenny remercie en préambule de sa thèse.
 
Ralph est persuadé que la police retrouvera la trace de l'oncle de Jenny avec les infos détenues par l'Université au travers de l'école supérieure fréquentée à Manchester.
 
Il compte attendre le retour la police, après tout il n'a pas légitimité à le contacter directement.
 
Ralph décide de se remettre pleinement au travail pour terminer le rapport qu'il doit envoyer au Giec et il compte bien mettre en balance sa présence au groupement si son rapport n'est pas intégré dans la nouvelle mouture 2019 du rapport général.
 
Coincidences
 
Ralph reprend son étude destinée à mettre en exergue les corrélations entre production ou consommation de pétrole par pays avec les augmentations de température constatée depuis l'utilisation industrielle de cette huile noir soutirée des profondeurs de la Terre.
 
En ouvrant les données calculées et mises en graphique grâce à Deep Blue, Ralph se retrouve sur le dernier fichier affiché, les courbes et les données relatives aux USA qu'il a présenté à Jenny.
Il lui est difficile d'oublier leur conversation et surtout le choc électrique reçu avec le baiser du piercing de Jenny. Jamais coup de foudre n'avait si bien porté son nom.
 
Ralph se force à se concentrer sur ses graphiques de peur que les larmes ne l'envahissent à nouveau.
Cette attention forcée l'interroge soudain. Ces graphiques il les connaît presque par cœur, et pourtant alors qu'il vient d'ouvrir à l'instant ses fichiers, il a une très forte impression d'avoir examiné les courbes il y a quelques heures à peine, alors que la dernière fois c'était avec Jenny.
 
— ça est je sais où j'ai vu ces satanés courbes, dans le fichier Deep Blue traité avec le logiciel d'exploitation de Jenny.
 
Il pense que l'émotion doit troubler son jugement, ce n'est pas le moment, pense-t-il si je veux argumenter face à mes collègues du Giec.
 
Pour dissiper ce qui ne doit être qu'une altération de sa mémoire due à cet horrible événement , Ralph décide d'afficher les deux graphiques en partageant l'affichage de son écran, ainsi il aura les idées claires pense-il !
 
A la vue de son écran Ralph s'enfonce dans un océan de perplexité.
 
Toutes les courbes, les siennes et celle de Jenny affichent une très forte similarité d'autant quelles couvrent à peu près la même période.
 
L'affichage simultané de ces courbes achève de le sortir de sa torpeur nauséabonde. Non seulement elles ont un profil parfaitement similaire, de fait les coordonnées temporelles sont parfaitement identiques.
 
En parfait statisticien, Ralph sait très bien qu'il est impossible qu'un tel résultat soit le fait du seul hasard. Des données qui n'ont rien à voir entre elles hormis l'échelle de temps, ne peuvent produire les mêmes courbes.
 
Le premier réflexe de Ralph est de penser qu'il y a peut-être eu une erreur d'interprétation par Deep Blue du logiciel de Jenny. Peut-être que ses données sur les observations d'UFO n'ont pas été transmises et que Deep Blue s'est alors servi de sa propre base de données sur l'utilisation du pétrole.  
 
Le cerveau de Ralph vient de retrouver toute sa vivacité. Il reprend le disque dur sur lequel il a récupéré les données envoyées par Jenny à Deep Blue.


— Shit, aucune erreur possible Deep Blue a bien retourné les données de Jenny.
 
Ralph reste plus que dubitatif sur ce qu'il vient de constater. Tout ce qui s'affiche sur ses écrans est bien réel.
 
— C'est quoi cette folie ? La courbe d'évolution de la production de pétrole est complètement synchrone, avec la courbe sur les apparitions d'UFOS sur le territoire américain et ce depuis 70 ans.
 
Ce constat le déstabilise d'autant plus que Ralph ne voit vraiment pas avec qui échanger sur ces étranges résultats.
Expliquer qu'il détient ces informations par l'intermédiaire d'une étudiante Punk qui vient de se faire assassiner, informations traitées par Deep Blue alors qu'il n'en avait de plus pas l'autorisation.
 
Immédiatement il ne voit pas avec qui parler sans qu'on le prenne pour un malade perturbé par la mort de Jenny ou pire comme un suspect.
 
Il essaie de se raisonner, note ses questions fait une copie d'écran, des courbes en question et se promet de revenir sur le problème qui lui apparaît plus pour l'instant comme une interrogation statistique.
 
Il avait prévu une petite semaine pour rendre son rapport au GIEC et il a déjà deux jours de retard, il va devoir mettre les bouchées doubles.
 
Ralph devant l'urgence arrive à se raisonner. Il travaille d'arrache pied sur les présentation des données de consommation et production de pétrole qui lui permettront de mettre en évidence, sans contestation possible, les 10% de la population mondiale responsables du déséquilibre climatique dans lequel s'engage la planète Terre.
 
Son dossier désormais bouclé, il en est assez fier, surtout après ce début de semaine horrible qui aurait pu le perturber gravement, il commence la procédure officielle pour expédier son dossier via un téléchargement FTP sécurisé.
Il ouvre sa messagerie mail pour prévenir ses interlocuteurs de son envoi.
 
Mais, dans la partie réception de sa messagerie, un message avec avis de priorité clignote, il émane de la Police du district.
 
— "Monsieur, vous avez manifesté lors de votre déposition le souhait d'être prévenu si une cérémonie serait organisée pour les funérailles de Jenny Stoe. Il n'en sera rien, nos services n'ayant pu retrouver de famille proche. Ces cendres seront donc répandues par un officier de justice mercredi, dans 3 jours au jardin des souvenirs du Cimetière de Dublin".
 
Le message le laisse ahurit ! C'est comme si on lui annonçait à nouveau la mort de Jenny ou plutôt sa disparition totale, son anéantissement, dont on vient lui annoncé la programmation.
 
Ralph a soudain le réflexe de prendre son portable et d'appeler le Sergent Aston pour lui demander des explications. Pourquoi la police ne recherche-t-elle pas ses assassins, pourquoi elle ne fait pas plus de recherche sur la famille.
 
Si Jenny avait été une mère de famille respectée, chercheuse à l'Université, la police aurait certainement fait preuve de plus d'attention. Il se ravise, ne compose pas de numéro. Que pourrait-il arguer devant un juge qui vient de réduire en cendre cette jeune étudiante comme si il y avait urgence à la faire disparaître.
 
Ralph ne peut se résoudre à ce qu'il n'existe personne pour honorer la mémoire de Jenny.
Il cesse la validation de l'envoi de son rapport au Giec et retourne sur google pour trouver le numéro de téléphone de ce John Stoe Président de cette association d'ufologie.
 
— Bonjour, je cherche à Joindre votre président, pourrais-je le joindre rapidement.
 
— C'est à quel sujet et qui le demande ?
 
— Oui bien sûr, désolé, je suis Ralph Hunter, Directeur de thèse d'une étudiante de l'Université de Dublin, Jenny Stoe, je pense qu'il doit la connaître.
 
— Rappelez ce soir vers 19h nous avons notre réunion de bureau hebdomadaire, il sera là.
 
Ce n'est pas plus mal réfléchit Ralph cela me permettra de mettre les formes, peut-être qu'en fait il n'y a rien de formel entre eux.
 
A 19h précise Ralph renouvelle son appel.
 
— Bonsoir M.Hunter, on m'a dit que vous étiez le Professeur de Jenny ?
 
— Vous la connaissiez ? Elle a mis votre nom dans les premières personnes à remercier en exergue de sa Thèse
 
— Oui bien sûr ! C'est ma filleule, elle a donc réussie à mener à bien son projet de thèse sur les observations d'UFO ! Je suis surpris qu'elle ne m'en ait pas parlé, ça fait quelques semaines qu'elle n'a pas donné de nouvelles.
 
— Je suis au regret de vous dire qu'elle ne pouvait pas vous en donner, elle est décédée, elle a été sauvagement assassinée.
 
A l'autre bout de la ligne un long moment de silence, Ralph se morfond d'avoir été aussi direct.
 
— M. John Stoe ?
 
— Non c'est impossible c'est une malédiction qui nous poursuit !
 
— Pourquoi dites-vous ça ?
 
— Son père a été assassiné dans des conditions accidentelles étranges, elle n'était encore qu'adolescente ! Et maintenant elle, si jeune, un esprit brillant, une volonté à toute épreuve sous sa fragilité qu'elle cachait derrière son air punk !
 
— La police ne vous a pas retrouvé, un juge a donc décidé son incinération, ses cendres seront dispersées mercredi prochain au jardin des souvenirs du Cimetière catholique de Dublin.
J' y serai sachez-le, je préviendrai Daisy sa coloc également qui souhaitait aussi s'associer à sa mémoire.
 
— Je vous y retrouverai, merci de m'avoir prévenu, sinon je n'aurai rien su.
 
En terminant son appel, Ralph se met à douter sérieusement de la Justice de son pays, incapable, non ce n'est pas le bon terme, car quand elle veut, elle peut, non plutôt d'une justice pressée de clôturer un "dossier" d'une personne quasi anonyme.
 
Incapable de jouer à nouveau le porteur de sinistres nouvelles, il expédie un SMS à Daisy pour lui préciser la date de la dispersion des cendres de Jenny, en espérant qu'elle pourra se libérer.
 
Il lui reste 2 jours avant de rendre un dernier hommage à Jenny.
Il décide de remettre le résultat des travaux de Jenny à son oncle, sa thèse ne peut plus être présenté comme elle n'existe plus.


Pourtant cette problématique de similarité statistique le turlupine, il n'arrive pas à voir si cela est ou non possible.
Il décide de soumettre la question à un de ses collègues d'université, chercheur en mathématique proposé à la médaille Fields. Il ne va bien sûr pas lui parler d'UFOS.
 
— Hey Ric, pourrais-je passer te voir j'ai besoin de ton expertise, tu sais que j'e vais déposé un dossier qui va faire polémique au GIEC et j'ai besoin de tes lumières.
 
— OK, passes quand tu veux, mais question lumière apporte une lampe frontale, il n'y a plus d'éclairage dans le couloir qui mène à mon bureau.
 
— D'accord je serai dans ton bâtiment d'ici une heure au plus tard.
 
Les conseils lumineux de RIC s'avèrent effectivement très utile, le long couloir qui accède à son bureau est dans l'obscurité complète.
 
RiC, prévenu, a laissé la porte de son bureau ouvert pour pouvoir être repéré.
 
— Bonjour Ralph, ça me fait vraiment plaisir de te retrouver, je crois que nous sommes l'un et l'autre aussi accaparés et passionnés par nos travaux. Dis moi qu'est ce qui te préoccupe.
 
— Je vais déposé au GIEC le résultat de mes travaux sur les corrélations pays par pays entre consommation de pétrole, mais aussi production (certains pays ont les deux casquettes !) et l'augmentation de Co2 dans l'atmosphère. Ce faisant j'ai quelques craintes.
 
— Lesquelles d'ordres scientifiques, politiques.
 
— En fait les deux. Je m'explique je n'ai aucun doute sur la qualité des données que je vais présenter elles sont incontestables car issues de tellement de sources officielles.
 
— Alors où se situent tes doutes, je ne saisis pas trop.
 
— Dans la présentation de mes données il apparaît visuellement une corrélation indiscutable pour certains pays entre consommation de pétrole, augmentation de CO2 et augmentation de températures. Cela me donne un profil de courbe bien identifié. J'ai aujourd'hui peur que les pays, que je vais pointer, mettent cause cette corrélation en produisant une courbe similaire à celle que j'ai obtenu avec des éléments qui n'ont rien à voir avec la consommation de pétrole.
 
— Oui je vois ce tu suggères, tu auras un exemple qui te viendrait à l'esprit !
 
— Imagines par exemple sur une même période (70 ans) que l'on obtienne le même profil de corrélations entre le nombre ou les montant des tickets de caisse des supermarchés et le nombre de jours ensoleillés cela pourrait détruire mes argumentations et mettre en doute mon approche scientifique
 
— Rassures toi sur une aussi longue période, obtenir une telle similarité serait impossible où alors cela signifierait qu'il existe une corrélation entre les profils mais que la cause n'en a pas encore été découverte. Il ne pourrait y avoir de hasard cela a été démontré maintes fois depuis que les mathématiques existent.
 
— Merci RIc, en fait tu ne m'apprends rien, mais j'avais aussi besoin d'être rassuré car j'aurai certainement à subir des attaques virulentes. Tu sais comme moi que les Lobbies de l'énergie, sont prêt à payer des fortunes des chercheurs pour que ceux-ci viennent a leur secours en jetant des doutes sur nos travaux.
 
— Si c'est le cas tu me les envoies, j'aurai tôt fait de renvoyer à leurs chères études, ces mercenaires de la science qui n'ont, pour la plupart rien publié dans les revues à comité de lectures, et n'ont donc aucune légitimité dans leurs critiques.
 
Ralph est satisfait d'avoir avec lui un allié de poids dans la bagarre qui l'attend.



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