6 lettres, 3 mois et une valise

Partir. 6 lettres qui résumaient le rêve, la découverte, l'envie.

Partir c'était un fantasme.

Je ne sais pas comment il naît. Je ne sais pas si c'est parce le monde est bien trop vaste pour la vie que l'on mène.

Partir le plus loin possible c'était tout ce que je voulais. Je le veux encore. Différemment. Je le veux autrement.

Je crois qu'il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises raisons de partir.

Parfois il faut simplement que l'on aille chercher de l'oxygène ailleurs.

Il faut que l'on grandisse.

Pour enrichir nos écrits, nos pensées, nos sourires. Pour étayer les propos, rencontrer l'autre, celui qui ne viendra pas à nous.

Pour écouter des histoires, les mettre dans nos valises, les ramener.

Pour se soigner, guérir les blessures, gommer les cicatrices au cœur, les hématomes de la mémoire.

Partir c'était le fantasme.

Je regardais Into the wild avec des yeux envieux.

Comme si le fait d'effacer toute trace de soi rendait plus vivant.

Et puis j'ai regardé autour de moi, avant de partir. Un premier pas, 500 kilomètres, rien d'incisif. J'ai vu ma mère pleurer. Mes amis continuer leurs vies sans moi. Mes meilleures amies tomber sans pouvoir les aider à se relever.

J'ai vu le manque grandir.

Et je suis partie, à nouveau, sur un autre continent, plus longtemps, plus intensément. 

J'ai ramené un petit bout de Tunisie dans mes valises. 

Là-bas je me suis adaptée. J'ai douté, j'ai glissé, je me suis rattrapée, j'ai eu peur, j'ai souri. J'ai pris confiance. J'ai ouvert les yeux, j'ai pris de la hauteur pour voir le monde. 

J'ai respiré.

Je suis partie.