A chaque fois.

Marguerite De Branchus


À chaque fois, c'est la même rengaine : l'odeur de la mer, le bruit des pas qui s'enfoncent lourdement dans le sable, la sensation piquante du vent sur la peau, le grincement du sable sous la dent et ce puissant sentiment d'être seul au monde, au milieu d'une horde de touristes, de chouchous, de gamins qui courent de partout, de châteaux sables, de seins nus et de beignets.


C'est fou ce que les vacances peuvent nous faire retomber en enfance. Tu te repasse tes vacances en boucle. Non, pas celles-ci. Les autres. Celles quand tu étais enfant, celles d'avant. Celles où tu n'avais pas encore le choix du programme. Et tu te rappelles au jour le jour d'infimes souvenirs qui ont marqué au fer rouge ces joyeux moments. 


Des souvenirs au goût salé qui restent aujourd'hui de douces pensées qui sentent bon cette odeur de vacances et de cette sensation de peau qui tiraille après des heures restées au soleil : les petits suisses transformés comme par enchantement en glace dans le congélateur de la location, les petits fromages portion à ranger soit même dans un petit sac pour enfant, les allers-retours sur le bord de la plage à la recherche d'un mystérieux trésor, le rêve de posséder un jour le fantasmatique objet du monsieur qui passe chaque matin la plage au crible fin, les tentatives ratées de footing matinal avec tes frangines, le bruit de l'apéro qui chante sur chaque terrasse,  le bateau gonflable rafistolé des dizaines de fois qui prends le large en même temps qu'il prends l'eau, l'affreux parasol que tu ne voulais surtout pas porter sur le trajet du retour, les interminables randonnées forcées, la compétition des plus beaux coups de soleil, les cailloux entre les orteils, le sable dans le bac à douche, les restaurants attrape touriste, la sieste forcée où le silence et la blancheur du soleil de 15h oblige chacun à rester cloîtrer comme un forcené à l'ombre de la fraîche location...


Des rires, une peau qui respire les vacances, une humeur qui chante. A chaque vacance, tu revis les précédentes avec toujours autant de plaisir. A chaque fois, tu as oublié la location suspicieuse, la couverture qui gratte, le coup de soleil qui brûle le dos, les guêpes sur le melon, les piqûres qui n'en finissent plus, la danse frénétique des moustiques qui t'empêche de dormir, les toiles d'araignées dans le rideau de douche, la cohue dans les supermarchés, les restaurants attrape-touristes et l'affreuse vague qui te fais boire la tasse. 


A chaque fois, les vacances nous font passer la pilule des mauvaises expériences. C'est fou comme à chaque foi,  on n'en garde que le meilleur. Des souvenirs gorgés de soleil, d'eau de mer et de crème solaire que l'on conserve bien au chaud dans un coin de notre esprit pour affronter l'hiver en pensant à l'avance à la prochaine fois qu'on ouvrira les portes du congélo pour récupérer des petits suisses en bâtonnet, les mains toutes collées sucrés par le melon, du sable encore entre les doigts de pieds avec les cigales en fond sonore... 


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