A la manière de: La Mappemonde

boukinoli

Lorsque j'étais enfant, mon humeur vagabonde
Parcourait sans répit l'univers merveilleux;
Et, les yeux attachés sur une mappemonde,
J'ébauchais un voyage immense et périlleux.

J'explorais des glaciers rosissant sous l'aurore,
Des déserts assoupis, des archipels dorés,
Des torrents qui clamaient leur désespoir sonore;
Mon bateau déchirait des océans pourprés.

Mon essor m'emportait des pôles aux tropiques.
Dussent mes lendemains devenir des tombeaux,
J'allais toujours, toujours!....Mes haches et mes piques
Donnaient à mon destin des espaces nouveaux.

Sans avoir voyagé, j'ai vécu tous ces rêves.
Rien qu'en fermant les yeux, que d'ivresse ou d'effroi!
Ces édens radieux, ces enfers et ces grèves,
Je les croyais bien loin, lorsqu'ils étaient en moi!

Tous ces pays mordus par la glace ou la flamme,
Je les ai rencontrés dans mes propres tourments,
Car l'univers n'a pas l'immensité de l'âme
Il n'en a pas l'horreur ni les embrasements.

Seul, tandis que la nuit bourdonnait à ma tempe,
je me suis égaré dans des voyages fous,
Et les pauvres lueurs qui tombaient de ma lampe
Ont éclairé parfois les plus beaux d'entre tous.

La fausse obscurité de mes soirs de décembre
A recélé souvent des soleils flamboyants
Qui m'entraient dans le coeur, et, sans quitter ma chambre,
J'ai vu s'ouvrir sous moi des gouffres effrayants.

Le monde intérieur possède ses abimes,
Ces ciels, ses oasis, ses mirages lointains,
Ses suaires de neige, où dorment des victimes;
Il a des flots de lave et des volcans éteints.

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