À l'aube du crépuscule

manou-croze

La perfide envie d'en finir avec cette mêlée de larmes et de sang qu'est la vie l'avait atteint en plein cœur. La silencieuse agonie d'un esprit torturé arrachait les fragments d'identité qu'il lui restait un à un. Une déshumanisation lente et douloureuse s'était alors immiscée dans ses journées, et il avait abandonné ses croyances et ses proches pour s'écarter du commun des mortels et ainsi faire son choix.


Les mutilations qu'il s'infligeait se multipliaient au fil des mois, la mort s'enracinait dans son cœur, et des roses noires fleurissaient dans ses yeux. L'inévitable destin de l'innocent condamné ne pouvait être infiniment repoussé, ce qui le menait à la conclusion que seul son avancée serait envisageable. Il était hors de question qu'elle échappe à son contrôle, mais elle se nourrissait de ses peurs les plus enfouies pour influencer sa décision.


Il y a l'art et la manière d'atteindre l'ultime repos, et à ses yeux, la quête de la beauté de l'événement en question restait sa préoccupation majeure. S'élancer d'un sommet pour s'élever plus haut encore et défier ainsi les lois de ses physiciens prétentieux qui désirent régir l'univers de leurs théories insipides, s'attacher le poids de sa lourde conscience à la cheville et se laisser submerger par un torrent émotionnel suffocant, ou encore ingérer des pastilles colorées permettant de s'allonger et d'atteindre enfin cette quiétude tant désirée ?


L'hésitation était l'unique raison de son existence en ce monde, et son détachement de la réalité finirait par lui dérober ce court instant indéfinissable et immorale de ce qu'on appelle dans le jargon des communs : la Vie. Alors oui, il y a l'art et la manière de vivre, mais également de mourir.

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