A nos rêves
lune-noire
Minuit, j'ai les paupières lourdes, le cœur à l'envers, l'envie d'entrer dans mes rêves. J'ai chaud, je flotte. Je ne sais plus si je comate, ou si je dors. Je sais juste que je suis bien, que je ne veux plus bouger.
Minuit cinq, je ferme les yeux, et la première vision m'attaque. Ton rire si diabolique, et si merveilleux, riant à l'une de mes blagues les plus nulles. Alors j'souris les yeux fermés. Je plane, je vole, je ne veux plus bouger.
Minuit vingt, deuxième attaque, d'une seconde vision. Ta main dans la mienne, une rue, des passants. Baisers volés, sourires charmés, j'entends plus que toi, je ne vois plus que toi. Je suis dans ma bulle, je suis dans les plumes, c'est doux, c'est beau, je voudrais que le temps s'arrête. Je ne veux plus bouger.
Une heure trente, nouvelle attaque, encore et toujours tes yeux verts dans mes yeux gris. La communication s'effectue. Et j'ai envie de te voler un baiser, parce que t'es beau, parce que t'es grand, parce qu'il y a comme une danse de papillons dans mon ventre, et parce que je crois que ça y est, je sais. Je t'aime.
Trois heures cinquante, quatrième fois de la nuit. T'es où? J'ai peur de te perdre quand je ne sens plus ton souffle dans mon cou. Je ne t'entends plus parler. T'es fâché. Ta moue boudeuse est tellement mignonne, que je n'arrive pas à t'en vouloir. Silence. Et le feu de nos regards s'est éteint, subitement. Tu fuis mes yeux, pour lancer des éclairs tout autour de moi. Comme une mer déchainée dans un temps de tempête. Et pourtant, je plonge dans tes bras si rassurants. Je ne t'en veux pas non. Je t'aime. Et je ne veux plus bouger de là.
Cinq heures douze, encore. Je vois la Tour Eiffel, mais je ne sais pas ce qu'on y fait. Il n'y a personne autour de nous. Juste le bruit assourdissant de la ville des Lumières. Nous sommes allongés dans des sens opposés, sur du marbre. Nos têtes sont juste collées. J'ai l'impression de flotter sur un nuage. De me laisser porter par le temps. Il y a ta main qui chatouille mes cheveux. Je crois que c'est ça, le bonheur. Tes gestes délicats, bourrés d'amour que tu ne diras jamais. Et moi pendant ce temps, je voudrais ne pas bouger de là.
Six heures vingt-huit. Provocations de ta bouche qui réclame la mienne. Et je ne te résiste pas, non. Je te laisse faire, tellement c'est apaisant. Je suis presque là, à perdre connaissance. T'es obligé de me tenir par la taille, pour ne pas que je tombe. Je suis comme une marionnette, à demi-consciente. Je suis comme un oiseau en cage, essayant de voler. Je lutte contre je ne sais quoi, et je voudrais encore, rester là, avec toi.
Huit heures deux, on se balade dans cet immense parc. Je crois qu'on en est à notre première rencontre. Tu me poses des tonnes de questions, et puis tu restes distant. Je réponds à tes questions, sans oser lâcher prise. Et puis je ne sais plus trop, maintenant. C'est comme une alternance passé-futur. Tes regards gênés, quand je daigne te regarder dans les yeux. Tes mains qui se croisent et se décroisent, prenant les miennes, les lâchant. Il y a les effluves de ton parfum, qui me font penser au passé. Et dans le futur, t'es différent. T'es amoureux. Je suis amoureuse. Nos regards fous continuent leur course folle. Et même si quand je t'embrasse ça pique, je t'aime quand même. Tu restes mien. Tu restes à moi. Et je voudrais que tu restes là, avec moi, que tu ne bouges plus jamais de là.
Huit heures trente, le réveil sonne. J'allume mon téléphone, j'ai aucun message de toi, aucune nouvelle. Seule, une nuit est passée. C'est pas la fin du monde, non. Et pourtant si, parce que j'aurais eu besoin de recevoir un "J'ai rêvé de toi, cette nuit", histoire de me sentir un peu moins seule, dans les souvenirs de notre feu, qu'on a pas pu entretenir.