Abandon

franekbalboa

Je me rappelle...

Ces années collèges. Les années où pour certains tout allait bien, et moi aussi... Du moins jusqu'à une année où une prof a découvert que j'étais un élève qu'on qualifie de surdoué.

A cette époque je ne me considérais pas comme tel, aujourd'hui non plus d'ailleurs. Simplement un enfant avec des facilités. Mais elle ne l'entendait pas de cette oreille, cette prof. Elle proposa à mes parents de m'aider, selon elle, pour cela fallait-il qu'ils acceptent de me transférer dans un autre établissement. Un endroit où mes capacités seraient mises en avant, où mon ennui deviendrait assurément néant car je serai occupé en permanence. Cependant mes parents, aimant profondément leur enfant me laissèrent le choix.

Je refusais le dit établissement. Je sentis que le regard de cette prof changeait. Du tout au tout. On ne prenait plus de temps pour un élève qui s'en fichait. On l'attaquait, on l'insultait. Encourageant une classe jusqu'alors tranquille à s'acharner sur ce garçon. Abandonné. Voilà comment je me suis senti, une année durant, à me faire insulter, frapper, humilier.

Je répondais avec le sourire. La riposte était dangereuse car je connaissais un peu ma force et si je ne me contrôlais pas, cela pouvait partir très loin. Suite à cela, je me suis moi-même abandonné. Lâchant les études, me faisant souffrir également, j'en suis venu à une atroce conclusion: si tout le monde me faisait vivre ça, je le méritais. J'en ai pâti, et ne me suis jamais vraiment relevé...

Je pleurais le soir, en silence, sans aucune larme. Ma peine me faisait plus mal que tout, une blessure à vif. Fini la joie, le sourire, la douceur, la lumière. Bonjour les ténèbres, le visage fermé, la souffrance... Le travail n'a plus jamais été une source de motivation. J'écrivais des textes vides pour me rassurer. Mais je ne pouvais plus. Quelque chose en moi était brisé.

J'ai mis tant de temps à m'en relever, à comprendre ce qui ne fonctionnait plus, que lorsque j'y suis parvenu, l'école était bien derrière moi. J'ai appris à réaccepter celui que je suis, avec les qualités et les défauts, le passif, l'expérience, les peines, les joies... J'ai appris à me concentrer sur ce que je suis, sur le fait que les autres n'auront jamais qu'un avis, que je suis le pilote de ma propre barque, et que ceux qui ne souhaitent pas être du voyage peuvent toujours s'en aller. L'équilibre, instable comme chacun des pas que l'on peut faire, on peut le dire, on est sur un fil, mais je crois que le funambule que je suis devenu s'en sort plutôt bien.

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